Les Corses d’aujourd’hui veulent être les Catalans d’hier

corse catalogne

La France est sur le point d’accorder une autonomie politique à la Corse. Une promesse qui devra passer par les fourches caudines de la prochaine élection présidentielle. Peut-on comparer Corse et Catalogne ? Éléments de réponse.

« On soutient la République Catalane parce que c’est juste et parce que c’est un peuple ami », explique Jean-Guy Talamoni à la fin du mois d’octobre 2017. Le président de la Corse, est l’un des rares personnages politiques de premier plan à reconnaître la République (autoproclamée) de Catalogne, tout en admettant qu’un référendum d’indépendance n’était « pas pour demain » en Corse.

De fait, l’assemblée de Corse est bien loin de jouir des compétences et des prérogatives que détient la Generalitat de Catalogne, pour un conglomérat de raisons historiques et politiques. La Catalogne gère aujourd’hui sa propre police. Les Mossos d’Esquadra détiennent les compétences de polices intégrale sur l’ensemble du territoire catalan. La Catalogne peut également gérer en autonomie ses politiques culturelle, éducative, sanitaire tant qu’elles respectent la constitution espagnole. Une infime partie des impôts sont également levés par le gouvernement catalan.

Le poids politique

Cet éventail de compétences est le fruit d’habiles négociations politiques du très fin président catalan Jordi Pujol entre les années 1981 et 2001. Mais c’est surtout grâce à l’instabilité chronique et systémique espagnole. Avec la répartition à la proportionnelle des sièges de députés, le vainqueur des élections législatives espagnoles, lorsqu’il n’a pas de majoritaire absolue, doit chercher des alliés politiques. Ce fut le cas de la gauche en 1989 et 1993 et de la droite en 1996. Les circonscriptions de Catalogne envoient une cinquantaine de députés au parlement sur un total de 350.  Un poids politique important pour les souverainistes catalans qui ont su échanger leur appui politique contre des compétences.

Pacto del Majestic - Wikipedia, la enciclopedia libreLe président catalan Jordi Pujol et le Premier ministre espagnol José María Aznar à Barcelone en 1996 (EFE)

Des règles du jeu qui n’ont pas cours en France. Justement échaudé par les tripatouillages des arrières cuisines politiques de la IVème République, le Général de Gaulle a retiré tout système proportionnel pour le remplacer par un suffrage majoritaire. Pour être élu député sous la Vème République, l’impétrant doit réunir une majorité de votes sur son nom. Un système qui marginalise les plus petits partis (Rassemblement National, Les Insoumis, et les régionalistes comme les Corses), mais qui offre au parti vainqueur une majorité stable.

Charles de Gaulle : biographie du grand Charles de la guerre à Mai 68Les nationalistes corses furent donc isolés sur leur île tandis que les indépendantistes catalans enchaînaient les allers-retour en TGV entre Barcelone et Madrid.

Galvanisés par le roman national catalan, et forts de leurs compétences, les indėpendantistes, ne voulant plus se loger sous le toit de la constitution espagnole, ont renversé la table un mois d’octobre 2017 en enchaînant référendum d’auto-détermination et déclaration de sécession. Avec la suite que l’on connait : lourdes peines de prison pour les séditieux.

Le poids économique

La chevauchée catalane, que n’a pas connue la Corse, trouve également son origine sous les cordons de la bourse. Avec 16 % de la population espagnole (7,6 millions d’habitants), la Catalogne pèse 20,6 % du PIB de l’Espagne. Loin du compte, la Corse ne représente que 0,4 % du PIB de la France et 0,5 % de sa population avec 330 000 habitants.

Le poids historique

Par conséquent, les Corses d’aujourd’hui veulent être les Catalans d’hier. La région se rêve d’un statut d’autonomie que la Catalogne a signé après la dictature du Général Franco.  Le régime a mis à bas les identités locales de l’Espagne : la Catalogne, le Pays basque et la Galice. Régions qui se prévalent d’une ancienneté historique antérieure à la fondation de l’état espagnol, d’origine castillane.

Franco, el mayor generador de chistes de España | RTVE.esAu sortir de 40 ans de dictature et ayant à l’esprit la Concorde nationale, les pères de la constitution espagnole ont ouvert la porte à une décentralisation majeure du pays. Pendant ce temps, la Corse doit composer avec l’un des états les plus jacobins au monde. Il semblerait que l’état français deviennent plus souple avec l’âge et offrirait un statut d’autonomie à l’île.

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