Le Français Kevin Séraphin est arrivé cet été au F.C. Barcelone après avoir passé 7 ans en NBA. Il raconte son arrivée et la NBA dans un langage cash qui lui ressemble.
Photos: F.C. Barcelone
Après une année catastrophique, l’équipe du Barça de basket s’est reconstruite avec sept nouveaux dont trois Français: Adrien Moerman, Thomas Heurtel et Kevin Seraphin. Ce dernier s’est mis au basket à 14 ans après 7 années de football, sans pour autant penser qu’il serait un jour professionnel. Il s’est confié en exclusivité à Equinox cette semaine.
« Barcelone est ma ville préférée »
Pourquoi avez-vous décidé de venir jouer à Barcelone ?
Pourquoi? (il réfléchit). Je pense qu’il était temps. Quand j’ai appris l’après-midi que les Pacers – son équipe aux Etats-Unis – n’allaient pas forcément me garder, je me suis dit « Kev, c’est le moment ». J’ai appelé mon agent pour faire le nécessaire.
J’en avais marre d’être sur le banc et de recommencer tout le process dans une nouvelle équipe, de déménager quelque part, de refaire un training camp (camp d’entrainement d’avant-saison NDLR), travailler pour avoir sa place toute l’année et à la fin de l’année ce n’est même pas sûr que tu aies une place. J’avais envie de jouer.
En NBA, il faut faire ses preuves chaque année?
Oui, à part si tu as un gros contrat. Et ce n’est pas toujours évident. Certains coachs ont déjà leurs plans, comme aux Pacers où j’ai signé en dernier. Il y avait déjà Al Jefferson et Myles Turner. Myles c’est pratiquement impossible de prendre sa place. J’ai réussi à prendre celle de Al en playoff parce qu’il était blessé. C’est un combat tout au long de l’année.
Vous connaissiez Barcelone avant de venir?
C’était déjà ma ville préférée avant de signer. J’étais venu plusieurs fois en vacances.
Qu’est-ce qui vous a séduit dans le projet de F.C. Barcelone?
Je savais que le coach était intéressé pour me faire jouer. Il y a les moyens pour gagner et faire des grandes choses. Et ça toujours été un rêve de jouer ici, depuis que j’évoluais à Cholet (en 2009, il avait 20 ans NDLR).
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En Europe, le Barça est une référence. Je m’étais toujours dit qu’un jour j’aimerais jouer à Barcelone.
Vous êtes rentré en Europe après 7 ans passés aux Etats-Unis. Vous avez eu un choc culturel à votre arrivée?
Non. Je voyage beaucoup depuis que j’ai 16 ans. J’ai vu beaucoup de cultures, quasiment tous les pays d’Europe avec le basket que ce soit en Euroligue, l’Eurocup, la FIBA Cup, les Jeux Olympiques…
Quel est votre endroit préféré à Barcelone?
Avant je restais vers la plage du côté du Casino et du Port. Maintenant que je connais, j’ai pu voir le centre-ville. Je me balade un peu plus, je visite. Mais je vais toujours à la plage. Et mon endroit préféré, ça reste chez moi.
« En NBA être très bon ne suffit pas pour jouer »
On vous a vu sur les réseaux sociaux dans différents restaurants de Barcelone depuis votre arrivée. Quelle est votre nourriture préférée après autant de voyages?
Plutôt la viande qui est très populaire en Guyane, dont je suis originaire. Après, au restaurant j’y vais le week-end ou après les matchs. Sinon j’ai un chef chez moi car j’étais en surpoids quand je suis arrivé cet été. Je m’étais blessé en équipe de France (Séraphin a disputé l’Euro avec les Bleus NDLR), ce qui fait que je n’avais pas travaillé autant en cardio. J’ai joué l’Euro sur une jambe et j’avais un peu mal encore en arrivant à Barcelone. J’ai rencontré le nutritionniste, mon chef, et j’ai perdu du poids. D’ailleurs ça se voit : je faisais des matchs moyens en début de saison, et maintenant je monte en puissance.
Votre chef est-il en contact avec le staff technique?
Seulement avec le nutritionniste et le docteur. L’entraineur m’a dit qu’il me laissait gérer. J’ai un chef top qui m’a été recommandé par Marc Gasol. Ça marche.
En quoi la NBA est-elle vraiment différente de l’Europe?
C’est la qualité des joueurs. En NBA il y a des monstres dans chaque équipe. Les gens ne se rendent pas compte. Je les entends souvent dire « il ne joue pas, c’est qu’il est nul ». C’est seulement l’image de façade. Beaucoup de joueurs ne jouent pas parce qu’ils ont un mauvais niveau de jeu. Il y a beaucoup de facteurs qui vont faire que tu vas jouer ou non en NBA quand tu n’es pas une star.
Comme?
Le coach. Il faut qu’il t’apprécie, qu’il aime ton jeu et qu’il ait envie de te voir évoluer dans son système. Pareil pour les General Managers. Les contrats jouent aussi énormément. Par exemple à Washington il y avait deux joueurs qui prenaient 13 et 12 millions de dollars annuels alors que moi j’en touchais 2,8 millions. Dans ces cas-là, tu as beau faire ce que tu veux à l’entrainement, ces deux-là doivent jouer! Et ce n’est pas que pour moi, j’ai plein d’exemples comme ça. Quand c’est comme ça il faut saisir son opportunité si elle arrive, et ce n’est pas tout le monde qui a cette chance. C’est vraiment tout cela dont les gens ne se rendent pas compte.
« On est en train de se mettre en place »
Vous avez un caractère expansif. Vous l’avez toujours eu ou vous l’avez exprimé en arrivant aux Etats-Unis?
J’ai toujours eu un tempérament de leader. Mais quand j’étais jeune je ne savais pas comment l’exprimer. Mais ça allait se voir dans mon attitude. Là maintenant j’ai envie de pousser les autres. Quand Adrien loupe un shoot je vais lui parler. Pareil avec Thomas. On se parle tous. J’essaie juste d’avoir mon rôle dans l’équipe. C’est vrai que j’ai toujours au fond de moi ce côté showman. Et leader.
Comment jugez-vous le début de saison du F.C. Barcelone?
On est bien. On aurait pu être mieux. On est à 3 victoires en 8 matchs en Euroligue, et en championnat espagnol on est deuxième avec seulement 2 défaites en 9 rencontres. On est en train de se mettre en place. On perd en Allemagne alors qu’on en met 40 dans le premier quart temps. On a mal géré le match. C’est plus du mental. Je pense juste qu’il faut ajuster ça. En Euroligue on est largement meilleur que ce qu’on a montré. L’objectif est de terminer dans les 8 premiers et d’aller en play-offs.
Votre but est-il de retourner en NBA?
Oui c’est mon but. Il faut se fixer des objectifs. Toujours monter. Gravir les échelons. Pour moi, la NBA c’est le toit du monde donc forcément c’est ça que je vise. Surtout que j’y étais. Je suis revenu en Europe pour jouer au maximum et voir ce qu’il se passe dans deux ans. Mais je ne me prends pas la tête. Pour l’instant je suis ici et je suis focus. J’essaye d’aider mon équipe et ensuite on verra.
« C’est impressionnant de rencontrer Messi »
Vous qui avez longtemps joué au foot, pouvez-vous raconter votre rencontre avec Leo Messi ce lundi?
C’est la deuxième fois qu’on se rencontre. Je l’ai vu en sortant de la salle de gym et j’ai demandé au vigile si je pouvais passer. Leo lui a dit OK et du coup on a parlé une dizaine de minutes. On avait un traducteur parce qu’il ne parle pas du tout anglais et moi pas du tout l’espagnol.
Sur quoi avez-vous échangé?
On a parlé de la première fois où l’on s’est vus à Washington. Moi je jouais au Wizzards – l’équipe de basket de la ville – et lui était là avec l’Argentine. C’était bien. C’est toujours intéressant de rencontrer quelqu’un qui dans le basket serait comparable à Michael Jordan, Lebron James ou Kobe Bryant.
La presse catalane compare justement Messi à Jordan en disant que c’est l’un des plus grands sportifs de tous les temps. Vous en pensez quoi en tant que basketteur?
Techniquement c’est vrai que Messi est un monstre. Ce qui est impressionnant c’est surtout son gabarit parce qu’il est petit. De voir à quel point il domine c’est incroyable.