Raul Romeva, ex-conseiller aux Affaires extérieures de Catalogne fait partie des ministres incarcérés par la justice espagnole pour sédition, délits de rébellion et malversation de fonds publics. Portrait.
Smoking impeccable, crâne luisant et lunettes parfaitement ajustées, Raul Romeva est l’un des visages internationaux du gouvernement catalan. Et pour cause, l’homme politique parle six langues dont le français, l’italien, l’anglais, l’allemand et plus surprenant encore le serbo-croate.
Madrilène de naissance, Raul Romeva incarne parfaitement la modernité de la Generalitat. Homme de passion, ce quadragénaire étonne pour ses goûts éclectiques. Du haut de son mètre 80, l’ex-député européen est un passionné de danse. Et plus particulièrement de salsa et lambada. La lecture est aussi une des ses activités favorites. Chez lui à Sant Cugat del Vallès, dans la province de Barcelone, Romeva varie les styles. Amélie Nothomb, Andy Robinson ou encore Blanca Busquets sont ses auteurs préférés. Il a d’ailleurs, lui aussi, écrit deux nouvelles : « Retorn a Shambhala » et « Sayonara Sushi« . Cet autodidacte s’essaye sur tous les terrains. Touche-à-tout, il lui arrive parfois d’écrire quelques articles pour le Huffington Post, par exemple.
Ce passionné de sport aquatique est aussi un admirateur des reportages de Jacques Costeau. Petit, il aspirait à devenir capitaine d’un bateau. Il ira étudier au Club de Natacion de Sabadell avec pour ambition de devenir un jour médaillé. Malheureusement, quelques années plus tard et des blessures en trop, il sera obligé d’abandonner son rêve. Avec succès, il obtiendra une licence en économie et un doctorat dans les relations internationales.
Globetrotteur, il posera ses valises à Caldes de Montbui, La Roca del Vallès, Barcelone, Montpellier, Paris, Sarajevo, Bruxelles ou encore Strasbourg. Ce goût pour l’aventure, il le doit sûrement à son passé d’activiste durant la guerre de Bosnie-Herzégovine. À 24 ans, il participe à des initiatives de soutien aux personnes déplacées dans les camps de réfugiés en Croatie. Raul Romeva deviendra le principal assistant de Colin Kaiser, représentant de l’UNESCO en Bosnie-Herzégovine, où il travaille comme responsable du programme éducatif et de promotion de la culture de la paix de l’UNESCO. Son leitmotiv : la paix et le désarmement dans les conflits armés. Il est d’ailleurs analyste chercheur sur les conflits armés et la reconstruction post-conflit.
En 2004, il décide de se lancer dans la politique, mais cette-fois ci en Catalogne, et devient député européen au sein du groupe des verts, alliance libre européenne (ICV). Raul Romeva au Parlement Européen c’est : 378 questions parlementaires, 127 propositions de lois, 2 rapports, 595 interventions publiques et 4 déclarations solennelle. Il est incontestablement l’eurodéputé le plus assidu du Parlement Européen. Mais après 10 ans de loyaux services dans ce parti écolo, le député décide de démissionner. Fracture. Après avoir été l’un des fervents défenseurs de la gauche alternative en faisant conjuguer socialisme et écologie, ses envies indépendantistes grandissantes sont devenues incompatibles avec ICV.
Une arrivée indépendantiste remarquée
Trois mois après sa démission, son nom revient sur le devant de la scène après avoir été choisi responsable de l’association indépendantiste Òmnium Cultural pour la campagne « Ara és l’hora ». Premier pas vers le processus séparatiste. Un joli clin d’œil du destin quand on sait que Pau Romeva, son père, était l’un des fondateurs d’Union démocratique de Catalogne, l’ancien parti démocrate chrétien et catalaniste.
En juillet 2015, il est désigné tête de liste pour Barcelone de la liste commune indépendantiste Junts pel Sí. Un an plus tard, il est nommé, par Carles Puigdemont, conseiller aux affaires extérieures, à la transparence et aux relations institutionnelles. Un poste inédit dans l’histoire de la politique catalane. Le Tribunal Constitutionnel espagnol suspend d’ailleurs la création de ce ministère, restauré dès le lendemain par le président catalan en jouant sur le nom du poste.
Sa mission était de vendre le processus indépendantiste aux pays européens, particulièrement la France et l’Allemagne. Une tâche qui s’est avérée ardue autant sous la présidence d’Hollande que sous celle de Macron. L’hexagone a été l’un des plus grands opposants à la cause indépendantiste. Même son de cloche dans l’Allemagne de Merkel.
Probablement une grande déception pour Raul Romeva, grand connaisseur de l’institution, que le parlement européen n’ait jamais donné le moindre signe favorable envers le processus indépendantiste. Pire encore, alors que l’ancien président de la Catalogne Jordi Pujol était régulièrement invité d’honneur du Parlement pour donner des discours en français, en anglais, en allemand et en espagnol, depuis l’enclenchement de mouvement indépendantiste les présidents Artur Mas et Carles Puigdmont sont devenus des personas non gratas.
Jusqu’à la dernière minute, Raul Romeva n’a pas perdu de sa passion indépendantiste : « Nous avons choisi le chemin de la démocratie et nous ne l’abandonnerons jamais. On se retrouve le 21 décembre. Débordons les urnes » a-t-il tweeté quelques heures avant son incarcération.