Référendum Catalogne – « Nous sommes en train d’écrire l’Histoire »

Mercredi 6 septembre 2017. C’est un jour que les Catalans garderont dans leur histoire officielle. La loi encadrant le référendum d’autodétermination non autorisé par Madrid a été votée. À l’intérieur du Parlement catalan, une ambiance particulière.

Parc de la Ciutadella, 9h30. Le soleil tape. Les joggeurs les plus téméraires sont déjà prêts à courir. Tandis que plus loin et sans baskets, les députés entament une course contre le temps. Devant le Parlement, le ton est donné. Des banderoles, des chants et surtout des drapeaux. Face à la police catalane, les Mossos d’Esquadra, un vieil homme entame, la très politique sardane, « Santa Espina ». Derrière lui, une pancarte : « Mussolini, Hitler, Franco auraient voté non, et toi ? ». Efficace. À quelques mètres, un drap blanc se fait remarquer. Dans un imprimé noir, on peut lire : « Non à la division ». La bataille commence dans la rue.

pancarte parlement catalogne

À l’intérieur du bâtiment, dans le plus ancien parlement d’Europe, c’est l’agitation. Les 400 journalistes présents n’auraient raté ça pour rien au monde. Les directs à la télévision s’enchaînent. Les caméras s’entassent. Les photographes tentent désespérément de trouver une place. Dans l’air flotte un parfum d’inédit. La vague d’enthousiasme se propage jusqu’en salle de presse… quitte à en omettre la neutralité. Les rédacteurs applaudissent les phrases tranchantes de Carme Forcadell qui dirige les débats et qui a tendance à oublier qu’elle n’est plus présidente de l’association indépendantiste ANC. Forcadell est autoritaire, cassante. Son rôle de présidente d’un Parlement catalan, qui veut en quelques heures faire exploser le statut d’autonomie catalan et la constitution espagnole, est compliqué. Elle ne sera pas à la hauteur de l’enjeu. Les politiques espagnols le disent, les catalans indépendantistes le pensent à voix basse.

Dans les escaliers feutrés du Parlement, un haut responsable d’une association indépendantiste confesse : « nous sommes en train d’écrire l’Histoire ». Pas de retour en arrière possible. « Soit c’est l’indépendance, soit c’est la prison pour nous tous, on est allés très loin » assure-t-il. Cet ancien journaliste promet de faire les choses calmement et sans précipitation. Pourtant, il nous apprend que Carles Puigdemont pourrait déclarer l’indépendance dès le 1er octobre au soir « si le résultat est clair ». Plus violent, la député Magdalena Casamitjana anciennement socialiste et aujourd’hui indépendantiste s’exprime dans un français impeccable : « Cela fait 300 ans qu’on est en guerre, c’est soit eux, soit nous ». Les oreilles de l’Espagne sifflent.


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A la buvette du Parlement, toujours très prisée dans toutes les chambres parlementaires quand les débats s’éternisent, on retrouve un chef de communication, plus enthousiaste que d’habitude. « Je suis heureux » s’esclaffe-t-il en français, « aujourd’hui on fête la liberté ». Souvent virulent sur les réseaux sociaux, aujourd’hui c’est une toute autre image que donne cet indépendantiste convaincu. « C’est un grand jour » ne cesse-t-il de répéter. Le temps se fait long entre ces murs chargés d’histoire. Une certaine lassitude se fait ressentir. Un indépendantiste ironise « si c’était en mon pouvoir, on voterait tout de suite ». Après une énième tentative de blocage de la part de l’opposition, la dernière réunion des députés se termine. Le moment tant attendu arrive. Dans un hémicycle à moitié vide après le départ de l’opposition, on ne brise pas si facilement un état membre de l’Union européenne, la majorité indépendantiste continue d’écrire sa propre histoire en votant la loi encadrant le référendum. Tous arborent un sourire triomphant. Une sorte de libération après tant de faux espoirs.

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