A. Leroy, ce député des Français d’Espagne qui fut le premier à soutenir Macron

Billet de Campagne par Nico Salvado, fondateur d’Equinox 

Printemps 2011. Nous sommes à une année de l’élection présidentielle et des législatives. Nous venions alors de lancer la radio française de Barcelone : Equinox. A cette époque, les cercles influents du microcosme barcelonais que nous fréquentions pour promouvoir notre nouveau média bruissaient d’un nouveau type d’élection à venir : une dizaine de députés allaient pour la première fois représenter les Français vivant à l’étranger. C’était une réforme voulue par le président de l’époque Nicolas Sarkozy.

Si les cercles de pouvoir barcelonais étaient très excités à l’idée de voir surgir un élu de leur territoire géographique, ils étaient tout autant inquiets de voir la communauté des Français de Barcelone totalement imperméable à cette élection. Jusqu’à cette réforme, les expatriés votaient pour le candidat qui se présentait dans leur circonscription d’origine en France. Ce scrutin de 2012 allait donc essuyer les plâtres, et un nouveau média comme Equinox était une aubaine pour les équipes de campagne, surtout de l’UMP et du Parti Socialiste.

Au fil de nos rencontres, nous entendions toujours le même refrain : le premier député des Français de la nouvelle circonscription Espagne-Portugal-Andorre-Monaco sera Eric Besson. L’événement était de taille, le ministre d’ouverture de Nicolas Sarkozy se présentait dans la circonscription et il était sûr de gagner, clamait-on en chœur du côté de l’UMP mais aussi du parti socialiste. Un haut responsable du PS de l’époque lâcha lors d’un repas d’une association d’entrepreneurs barcelonais : « on va faire campagne pour Arnaud Leroy mais franchement face à Besson, il n’a aucune chance. » 

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Notre jeune radio avait obtenu une interview du ministre, et dans un souci d’équité, nous demandions à Arnaud Leroy de venir s’exprimer quelques semaines plus tard sur nos ondes. Le candidat socialiste était resté un petit moment dans les studios après l’interview. L’occasion pour l’ancien membre d’Europe-Ecologie-Les Verts de s’étonner que l’on puisse douter de sa capacité à gagner. « Bien sûr que j’ai mes chances, sinon je ne ferais pas campagne » m’avait lancé le trentenaire avec ce ton si particulier qui est le sien, curieux mélange de nonchalance et de fermeté. Non seulement il était sûr de gagner, mais il croyait aussi à la victoire de son modèle de l’époque : François Hollande. Les primaires socialistes de 2011 n’avaient pas encore eu lieu mais Arnaud Leroy était convaincu du destin présidentiel de François Hollande.

Eric Besson, le candidat providentiel, a le défaut d’être un homme qui change d’avis. Il a claqué la porte du Parti socialiste du jour au lendemain pour rentrer au gouvernement de Sarkozy et y occuper le poste polémique de Ministre de l’Immigration et de l’Identité nationale. Il a refait le coup avec sa candidature au mandat de député en Espagne, abandonnant l’UMP en rase campagne, se retirant de la vie politique et donc de la circonscription.

C’est au pied levé que sa suppléante Laurence Sailliet allait mener campagne à sa place et tenter de décrocher le poste. La présidentielle passa, Sarkozy fut balayé, mais sur notre circonscription il arriva en tête avec 53,4% des voix. Nous revoyons Arnaud Leroy lors d’une toute dernière interview sur Equinox, entre deux avions (il venait à la radio avec sa valise). Il est toujours persuadé de gagner. Et comme pour la victoire de Hollande, Leroy vit juste une seconde fois et inversa le score de la présidentielle sur la circonscription, battant Laurence Sailliet avec 52,7% des voix.

Arrivé à Paris pour siéger au Palais Bourbon, cet ancien expert auprès de l’Agence Européenne de Sécurité Maritime se retrouve membre permanent de la Commission de développement durable. Il se lasse de François Hollande, devient proche d’Arnaud Montebourg alors Ministre de l’Industrie. Le député Leroy ira jusqu’à fronder.

Plus tard il me confiera n’avoir jamais été à la gauche de la gauche comme les autres frondeurs, mais qu’à l’époque c’était le seul espace pour obtenir une tribune médiatique et s’opposer à la politique d’Hollande. Arnaud Leroy fut l’un des grands promoteurs de l’idée d’imposer une primaire pour qu’Hollande puisse se représenter, sa seconde candidature n’étant pas un automatisme. Le fameux « on a aboli la monarchie ».

Aux municipales de 2014, Leroy se présente et échoue à Andernos-les-Bains, en Gironde où il obtient 9,76% des suffrages. C’est la polémique en Espagne où tous les partis, de l’UMP au Front de Gauche, brocardent le parlementaire pour son absence physique sur le territoire de la circonscription et sa tentative de parachutage en France. Arnaud Leroy se défend : « je ne suis pas le porte-valise des Français d’Espagne, je suis un député donc je suis là pour voter des lois nationales ». Constitutionnellement Leroy est dans son bon droit, un député est en effet élu par des citoyens d’un territoire, mais pas pour défendre directement des intérêts communautaires.

Paradoxalement, seul le conseiller consulaire Front National de Madrid, Alain Lavarde, voit d’un bon oeil le travail du jeune député. « Politiquement je m’oppose à ce qu’il représente, mais l’homme est un chic type, il aide financièrement les associations de personnes âgées et les familles en difficulté de la région d’Alicante » m’avait confié un jour ce pied-noir proche de Jean-Marie Le Pen.

Si Arnaud Leroy subit l’ire des représentants des partis locaux, c’est parce que parallèlement à ses candidatures en France, comme encore aux régionales de 2015, l’homme se voit rempiler un second mandant des Français d’Espagne et du Portugal en 2017. C’est la mise en marche d’Emmanuel Macron qui a changé la donne. Arnaud Leroy a tout quitté pour l’ancien Ministre de l’Économie. Un peu aussi pour « s’impliquer politiquement sur le territoire français«  nous confiera-t-il, et pour quitter une circonscription un peu à l’écart et très vaste à parcourir. Il abandonne alors son désir de réélection en Espagne et sa carte du Parti Socialiste, qu’il ne renouvellera pas. Et quittera Lisbonne pour installer sa famille en Gironde.

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C’est en 2016 l’un des rares députés socialistes à soutenir Macron. « Je ne demande rien au PS, je ne marchande pas », lâchera-t-il un jour sur France Info. Il deviendra porte-parole officiel de l’actuel candidat du second tour. Sauf surprise, après Hollande, Arnaud Leroy aurait eu le flair politique de soutenir pour la seconde fois, et avant tout le monde, le futur Président de la République.

L’homme pressé pourrait-il devenir ministre sous Macron ? En politique, les plus fidèles ne sont pas les plus rapidement récompensés. Le vainqueur d’une élection a tendance à distribuer les postes aux derniers arrivés, souvent par calcul ou négociation, au détriment des ouvriers de la première heure. « Arnaud Leroy pourrait décrocher un poste ministériel, nous soufflait toutefois un responsable socialiste en Catalogne, au lendemain du premier tour, en tous cas il en a l’objectif et l’ambition ».

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