Candidat pour la quatrième fois consécutive, Mariano Rajoy, actuel chef du gouvernement par intérim depuis le fiasco des élections du 20 décembre, reste la tête de liste du Partido Popular (PP). Ses principales propositions concernent la famille et un retour à la croissance.
Mariano Rajoy est dans la vie politique depuis 1981, année où il fut élu député lors des premières élections régionales de Galice. En 1996, il devient ministre de José Maria Aznar. Donné gagnant en 2004 à la présidence du gouvernement, il perdra finalement face à José Luis Zapatero. M. Rajoy se représente en 2008, pour de nouveau être battu par le leader socialiste. Il faudra attendre la crise économique et un Zapatero acculé pour que Rajoy soit finalement élu chef du gouvernement espagnol en 2011.
Pour ce scrutin de 2016, comme lors de celui du 20 décembre dernier, le chef du gouvernement conservateur doit faire face à une série de scandales de corruption qui ont secoué son parti. Mariano Rajoy doit également gérer le scandale provoqué par son ministre de l’Intérieur qui a déclenché des enquêtes clandestines contre les indépendantistes catalans. Certains observateurs lui reprochent aussi une certaine passivité, notamment dans le dossier de l’indépendantisme catalan où il est accusé d’avoir laissé le désordre institutionnel s’imposer. Les derniers sondagent donnent entre 110 et 120 sièges au PP. Un nombre d’élus qui est suffisant pour demander au PP une alliance avec les socialistes pour faire barrage à Podemos et garder le pouvoir.
1. La famille, « centre de notre société »
Placée comme un enjeu fondamental de son programme, le PP revient à plusieurs reprises sur l’importance d’une famille soudée, au-delà des devoirs professionnels. On peut d’ailleurs lire que « personne ne doit être forcé de choisir entre travailler et s’occuper des siens ». De manière plus moderne, le programme politique de droite promet de continuer à s’adapter aux évolutions de la société, et plus particulièrement en étant à l’écoute des « familles nombreuses, monoparentales ou dans des situations d’exclusion sociale, de pauvreté avérée ou des familles connaissant le chômage depuis une longue période ». Le parti de Mariano Rajoy conclut ce chapitre sur un point, et pas des moindres : « le droit à la vie ». « Le Partido Popular mettra en place un plan de soutien à la maternité pour aider « les femmes qui souhaitent devenir mères mais qui se retrouveraient dans une situation de difficulté ».
Notre analyse : La famille est une valeur essentielle des partis de droite et encore plus au Partido Popular car en Espagne le droit (ou l’interdiction) de l’avortement reste un sujet majeur de polémique. Mariano Rajoy n’a pourtant pas appliqué sa promesse de campagne d’abroger la loi jugée permissive du précédent gouvernement socialiste. Ce qui a déclenché la démission du Ministre de la Justice de l’époque et suscité de nombreuses protestations de l’aile la plus à droite du PP. Cependant il n’y a pas de parti en Espagne qui propose des mesures plus radicales que celles du PP sur le thème de l’avortement, donc la perte d’électeurs sera réduite. Les plus déçus pourront en revanche se réfugier dans l’abstention pure et simple.
2. L’emploi « pour le bien-être des Espagnols »
Derrière ce langage paternaliste et un brin nationaliste, le PP s’engage à « consolider une culture de l’emploi ». Comment ? En renforçant les institutions du marché du travail et les politiques de l’emploi « modernes ». Il garantit aussi un équilibre entre accords entrepreneuriaux, les représentants du travail et l’adaptation à la réalité des entreprises pour combattre la « dualité » du marché du travail. En outre, la création d’emploi indéterminé est mise en avant pour établir une meilleure stabilité, tout en accompagnant les entrepreneurs et travailleurs autonomes dans leur entrée sur le marché du travail, et leur longévité.
Notre analyse : Le Partido Popular va utiliser comme axe central de sa campagne la baisse relative du nombre de chômeurs au cours de ces 4 dernières années. La pire année de la crise fut celle de la fin du mandat du socialiste J.L Zapatero. En utilisant l’argument du « le retour des socialistes, c’est le retour de la crise », les conservateurs peuvent gagner des points.
3. Fiscalité : moins d’impôts, mieux orientés
C’est écrit noir sur blanc : le PP compte réduire les charges imposables des familles, des personnes en situation de handicap, des jeunes et des personnes âgées, tout en se dirigeant vers un système fiscal plus efficace. Dans les objectifs du PP, il y a la volonté de faire de cette ressource la clé pour une meilleure activité économique en promouvant la croissance et la création de l’emploi.
Notre analyse : Mariano Rajoy a énormément déçu l’aile libérale de son parti et ses électeurs de 2011 en augmentant fortement les impôts en Espagne durant son mandat. Beaucoup rappellent que l’ADN du PP, c’est une fiscalité légère. Le PP va probablement être sanctionné par les électeurs les plus libéraux qui risquent de se tourner vers Albert Rivera, le centriste de Ciudadanos, très « business friendy ».
4. Unité institutionnelle
Eternel adversaire de l’indépendance, notamment en Catalogne, le PP rappelle ici sa volonté d’une Espagne dont « on soit fiers ». « Nous devons améliorer notre structure autonome pour renforcer la cohésion sociale, l’unité malgré notre pluralité et la solidarité entre les Espagnols » peut-on alors lire dans le troisième chapitre du programme. Après 40 ans de constitution, le parti de droite insiste aussi sur le devoir du Sénat et de Congrès à faciliter un « débat transparent et dynamique ».
Une des solutions pour résoudre ces problèmes sociétaux : le sport. Étonnante proposition du programme, le parti de Mariano Rajoy voit là une manière d’être fier de l’unité espagnole, et mise dessus pour la transmission de valeurs collectives : apprendre à collaborer, à travailler ensemble.
Le parti de droite évoque aussi de sécurité, notamment internationale, en « maintenant ses promesses aux alliés, en prenant part au processus de décision à l’OTAN, l’ONU et au sein de l’Union Européenne (…) pour garantir un ordre international stable, de paix et de sécurité pour tous ». Concernant la sécurité intérieure, l’entourage de Mariano Rajoy et lui-même sont plutôt sereins : « l’Espagne est un des pays les plus sûrs du monde », mais n’oublient pas de garder le cap sur la politique migratoire et la gestion du personnel de la défense.
Notre analyse : Ici encore, le bilan de Mariano Rajoy reste mitigé. La rébellion catalane risque de pénaliser fortement les conservateurs. L’alternative de Ciudadanos, qui à la base fut un parti créé pour lutter contre l’indépendantisme, risque d’aspirer une forte partie des électeurs PP qui veulent un rétablissement rapide et musclé de l’ordre en Catalogne. En revanche, pour le moment, le PP garde l’image du patriotisme espagnol qui peut rassurer toute une frange de l’électorat.