Seul en Europe. A la tête d’un gouvernement très progressiste, une coalition des socialistes et de l’extrême-gauche, isolé, le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez veut tout de même incarner une forme de résistance face à Donald Trump et Elon Musk qui prennent aujourd’hui le pouvoir de l’autre côté de l’Atlantique.
En couverture : Pedro Sanchez et Lula da Silva (DR)
Derrière lui, la presse de gauche espagnole qui le voit comme le dernier héraut de leur cause. Face à lui, le bloc conservateur espagnol, l’Italie de Meloni, et surtout le duo Trump-Musk, ogres cherchant à dévorer tous les pions de la partie gauche de l’échiquier politique.
Avec un parti socialiste qui a disparu de la plupart de grands pays occidentaux, Pedro Sánchez se voit comme le dernier des Mohicans et se trouve très à l’aise dans ce rôle. Galvaniser son camp politique est la meilleure assurance pour le Premier ministre de remporter, une fois encore, les prochaines élections. Si Elon Musk a attaqué durement la gauche au pouvoir en Angleterre et a soutenu la droite radicale dans la course électorale en Allemagne, le milliardaire américain a été plutôt discret avec la politique espagnole.
Sur X, Musk a uniquement balancé une pique contre la Catalogne, accusée de ne pas maîtriser ses flux migratoires et de laisser en liberté des violeurs clandestins. Qu’à cela ne tienne, Sanchez prend les devants en jetant le gant : « l’internationale d’extrême droite menée par l’homme le plus riche de la planète attaque ouvertement nos institutions » s’est exclamé le socialiste il y a une dizaine de jours lors de l’inauguration de l’année Franco. Durant tout 2025, le gouvernement espagnol entend organiser des commémorations sur le 50e anniversaire de la mort du dictateur. Manière de faire encore des clins d’œil à l’électorat le plus à gauche du pays.
Recherche d’alliés
Comble du mépris, Musk n’a pas dédaigné prendre le temps de répondre à Sanchez. Pas même un smiley sur X. Pour tenter de partir en croisade, Sánchez regarde au sud et cherche des appuis en Amérique latine. Au Brésil tout particulièrement, où le très à gauche Lula da Silva semble être sa nouvelle source d’influence. Après le revirement de Mark Zuckerberg en faveur des philosophies trumpistes, Lula a mis en place un groupe d’étude pour analyser la décision de Facebook et menace de bloquer ces réseaux sociaux, comme le Brésil l’avait déjà fait avec X lorsque cette plateforme avait refusé de fournir des informations à la justice sur des groupes menaçant la sécurité du pays.
Une décision qui suscite l’admiration de l’exécutif espagnol, dont des sources rappellent que l’Union européenne a réussi très rapidement et légalement à fermer les médias russes RT et Spoutnik lorsqu’a éclaté la guerre contre l’Ukraine. « Musk attaque le projet européen, nous devons nous défendre et renforcer nos liens avec l’Amérique latine. C’est la région la plus euro-compatible. De nombreuses discussions croisées ont lieu ces jours-ci entre les gouvernements européens et latino-américains », insiste un autre membre du gouvernement, selon des propos rapportés dans le journal très proche du pouvoir El País.
Au-delà des mots, le vrai bras de fer commencera lundi prochain, le 20 janvier, quand Donald Trump deviendra officiellement le 47e président des États-Unis. Et pas sûr que l’Espagnol soit assez musclé pour tenir longtemps face à l’octogénaire américain.