De nombreuses usines datant du temps de la Barcelone industrielle sont devenues au fil des années des haut-lieux de la culture. Une transformation réussie.
Photo de couverture : Nau Bostik
D’usine à lieu culturel, il n’y a visiblement qu’un pas, ou plutôt quelques décennies. Dès la fin du 18e siècle, grâce à la construction d’un nouveau port qui attire les puissances étrangères, Barcelone devient une pionnière de la révolution industrielle. Au 19e siècle, on compte 150 industries du secteur textile, ce qui développe dans le même temps les machines à vapeur, puis la métallurgie, offrant de nombreuses opportunités professionnelles aux citoyens de la ville, surtout dans les quartiers de Poblenou, Poble-sec, Sants et Hostafrancs, centres névralgiques de l’activité industrielle de la ville et qui aujourd’hui encore en gardent les traces.
En 2024, les usines ne sont plus en fonctionnement, mais leurs grands volumes, leur architecture d’époque et une certaine fierté historique ont permis de leur redonner une nouvelle jeunesse. Avec le développement de la cité catalane, son ouverture au monde et son avant-gardisme, ce qui était industriel est largement devenu culturel. En voici quelques unes, leur histoire et leur actualité.
Fàbrica Fabra i Coats – Sant Andreu
Ancienne usine textile, la fabrique Fabra i Coats fait partie du projet « Fábricas de creación » commencé en 2007 par la mairie de Barcelone, qui accompagne financièrement et dans l’organisation la reconversion des sites industriels. Aujourd’hui, c’est un espace créatif à disposition des artistes pour y travailler, mais aussi un acteur culturel qui programme de nombreux projets artistiques.
Photo : Fabra i Coats
Fàbrica Casaramona – Montjuïc
Construite au début des années 1900, la fabrique Casaramona est un des bâtiments modernistes les plus importants de Catalogne. Imaginé par Josep Puig i Cadafalch sur commande de l’industriel Casimir Casaramona y Puigcercós, le site était une grande fabrique de textiles. Aujourd’hui, l’ex-usine abrite la fondation Caixforum, un musée très renommé de Barcelone.
Photo : Casaramona CaixaForum
Fàbrica Lehmann – Eixample
L’usine Lehmann, dans l’Eixample, a toujours été dédiée à l’amusement. Dans les années 1920, l’allemand Lehmann, le plus grand fabricant de jouets au monde, produisait 80 modèles différents de jouets en fer blanc dans son usine catalane. Maintenant et depuis 15 ans, l’espace est occupé d’ateliers de graphisme, photographie, architecture, céramique etc. Un écrin de verdure et de créativité au coeur de la ville, que peu de personnes connaissent.
Antigua Fábrica Montaner i Simon – Eixample
Son architecture loufoque attire plus d’un curieux, mais avant d’abriter les oeuvres du catalan Antoni Tàpies, le bâtiment était une maison d’édition. Construite en 1861, c’est un ouvrage moderniste très admiré des connaisseurs, qui apprécient son originalité. En effet, la bâtisse ne comporte pas la décoration typique du mouvement, elle introduit des éléments artisanaux en fer, en verre et en pierre. Quelques siècles plus tard, l’édifice étonne encore, par les oeuvres déjantées de Tàpies.
Photo : Lluís Bover. © Museu Tàpies
Nau Bostik – la Sagrera
Dans le quartier de la Sagrera, la Nau Bostik est un endroit singulier. Le bâtiment était en 1899 une entreprise de production d’adhésifs, possédée par un groupe américain du nom The Boston Blacking Co. C’est seulement en 2006 que l’usine ferme jusqu’à ce qu’en 2015, alors destinée à être détruite pour construire des immeubles, elle soit prise en main par un groupe de voisins, qui commence à transformer cet ancien site industriel abandonné en un nouvel espace ouvert aux besoins du quartier et à toutes les formes d’expression artistique et culturelle. Aujourd’hui, le site accueille 20 associations aux vélleités artistiques, solidaires ou environnementales.
Photo : Nau Bostik
Nau Ivanow – Sant Andreu
Ce fut d’abord une usine de peinture qui appartenait à l’industriel Ivanow (d’où son nom) dans les années 1960, jusqu’à ce qu’un architecte catalan reprenne l’affaire, puis que la mairie s’en empare et l’incorpore à son projet « Fábricas de creación ». Aujourd’hui, c’est un espace « d’essais et d’erreurs », dédié au spectacle vivant : les compagnies peuvent venir y créer leurs spectacles.
Photo : Nau Ivanow
D’autres usines servent aussi ponctuellement à des événements culturels comme le site des Tres Chemeneias à Sant Adría de Besos qui se transforme jusqu’au 11 novembre en musée pour Manifesta 15, les anciennes usines Damm et Moritz dans l’Eixample qui accueillent de temps en temps des concerts ou encore l’usine Mercedes-Benz de Sant Andreu devenue un quartier écologique et parfois convertible en lieu créatif.