Depuis la France, Barcelone est perçue soit comme un lieu culturel, raffiné, voire luxueux, soit comme un nid à fêtards invétérés sans respect pour leur environnement. Quel est le vrai ADN de la capitale catalane ? Eléments de réponse.
Photo de couverture : Equinox
« Avant de venir à Barcelone en vacances, j’avais une image assez beauf de ville, parce que c’est une destination pour les célibataires, il y a beaucoup d’enterrements de vie de jeune fille… C’est vrai que ça se passe surtout dans le quartier de la Barceloneta ». Charlotte, 24 ans, est venue seulement deux fois à Barcelone, mais son opinion est tranchée : le problème, c’est le front de mer, le soir. Les boites de nuit comme le Shôko ou le Pacha y accueillent des touristes internationaux prêts à tout pour boire le maximum possible, sans respect pour la ville ou sa culture. Le seul objectif : faire la fête.
C’est sans doute cela, en premier lieu, qui exporte une image de Barcelone comme destination uniquement festive, et en gommant les spécificités culturelles. Pourtant, aussitôt sorti du front de mer, Barcelone la gentrifiée se dévoile et présente les mêmes caractéristiques que d’autres métropoles européennes louées pour leur sophistication : magasins de vêtements de designer, cafés bobos et restaurants raffinés. Que ce soit dans le Born, l’Eixample ou Gracia, la ville regorge de ce genre de boutiques et mêle le traditionnel au moderne avec goût. Certains vacanciers voient d’ailleurs la capitale catalane comme un fleuron culturel. Noémie, jeune Parisienne qui prépare son premier voyage dans la cité comtale, parle d’« une ville ouverte, celle de l’art nouveau et de Gaudi ».
Une dualité qui déplait à la ville
Mais si Barcelone est une destination réputée peu chère pour faire la fête, la vie culturelle, elle, est hors de prix. À titre d’exemple, il faudra débourser au moins 29 euros pour admirer la Casa Batlló, 26 euros pour la Sagrada Família, et 28 euros pour la Pedrera. Pour ceux qui sont venus dans une optique Barcelone low-cost, les musées et la découverte de la culture traditionnelle sont souvent financièrement inaccessibles. La mairie est bien consciente de ce phénomène et veut renforcer son image d’une ville haut de gamme.
En accueillant l’élitiste America’s Cup cette fin d’été, Barcelone profite de l’occasion pour atténuer cette image beauf que certains pourraient avoir. Pour l’occasion, la mairie redessine son front de mer, notamment la plage de Nova Icaria et le Port Olimpic, qui se verront accueillir des restaurants gastronomiques. Un virage à 180 degrés, sur ce lieu où régnaient, depuis des années, des discothèques et des bars mal famés provoquant des bagarres à profusion, souvent mortelles. L’an dernier, la mairie, propriétaire des terrains, n’a renouvelé aucune convention à ces établissements. Avec 70 millions d’euros investis par la ville dans ce ravalement de façade, le changement de population risque d’être intense.
Photo : Equinox
Au point d’en bouleverser les clichés ? Pas sûr, car si le littoral bénéficie d’une reconstruction, ce n’est pas le cas de tous les quartiers, qui, eux, stagnent dans les stéréotypes. Le Raval a singulièrement l’image d’un quartier dangereux. Mathis, venu à Barcelone pour la première fois ce printemps : « avant d’arriver, ce que je voyais de Barcelone ce sont les images qu’on en montre dans des émissions comme 90′ enquêtes. Pour moi, c’était une destination de beaufs, avec beaucoup de vols à l’arrachée, de l’insécurité. Maintenant que j’y suis allé ce printemps, je le pense beaucoup moins ».
Finalement, Barcelone, comme toutes les grandes métropoles, cherche son identité, sans vouloir perdre ses racines. Au risque de ne pas pouvoir plaire à tout le monde.
*Certes, on est tous le beauf de quelqu’un d’autre. Ici, ce terme décrit un individu bruyant, tape-à-l’oeil, et qui, souvent, aime boire (beaucoup) d’alcool. Ajoutez à ça une propension à se prendre en selfie et en vidéo de manière quasi-frénétique et un humour douteux voire grivois qui finit par offenser la serveuse, et voilà la définition du terme « beauf » tel que nous l’employons dans cet article.