Le gouvernement espagnol a dévoilé, au début du mois d’avril, les principales mesures de son plan contre le tabagisme 2024-2027.
Photos : Clémentine Laurent
Porté par la ministre de la Santé Monica Garcia, le plan complet de prévention et de contrôle du tabagisme doit être prochainement approuvé en Conseil des ministres selon la radio COPE. Il prévoit des mesures restrictives telles que les terrasses et les universités sans fumée, l’augmentation des taxes, et donc du prix du tabac, ou encore l’emballage neutre.
Une actualité qui concerne donc la cité catalane. Elle qui possède de nombreux atouts attirants chaque année plus de Français. Parmi eux, des fumeurs y trouvent des conditions favorables à leur addiction. Equinox est parti à leur rencontre : tous sont unanimes, il est encore plus dur d’arrêter de fumer à Barcelone.
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La principale raison est économique. Le prix du paquet de cigarettes, aujourd’hui autour de 5 euros selon la marque, n’invite pas à arrêter. « Ce n’est pas cher du tout et on en trouve partout, dans les restaurants, les boîtes de nuit, les kebabs », partage Melike, installée depuis presque deux à Barcelone. « J’ai vécu à Dublin (Irlande), où le plus petit paquet de tabac était à 12,50 euros et celui des cigarettes, pas à moins de 14,50 euros », précise la jeune femme de 26 ans.
« Fumer en France, une folie financière »
Avec l’augmentation des taxes sur le tabac, le paquet de cigarettes devrait coûter entre 8 et 10 euros en Espagne. Pour le moment, les prix actuels ne sont pas si éloignés de ceux que l’on retrouve en France où ils se situent autour de 12 euros. « Même si tu gagnes bien ta vie à Paris, tu ne veux pas dépenser autant d’argent », avance Charlotte, directrice artistique et graphique. âgée de 41 ans, elle a commencé la cigarette à ses 20 ans, avant d’arrêter subitement il y a une dizaine de jours, « sur un coup de tête, en allumant une clope un lendemain de soirée arrosée ». Arrivée dans la cité catalane il y a 3 ans, elle était « très contente de payer (s)es clopes à 4,30 euros ». Pour elle, l’augmentation du prix du tabac prévue par le gouvernement aurait de toute façon été un critère pour arrêter : « à partir de 10 euros, c’est une limite psychologique ».
L’argument financier est aussi déterminant concernant Ylies. Ce quadra partage chaque mois son temps entre l’Hexagone et la Catalogne. Fumeur depuis ses « 14, 15 ans », le prix des cigarettes a même été l’élément « déclencheur de mon projet espagnol ». « En France, quand on fume un paquet par jour, c’est une folie financière, partage-t-il, on compte environ 400 euros par mois. En vivant en Espagne, j’économise la moitié et je peux louer une chambre ».
Le Parisien passe ainsi la moitié de l’année dans une ville au climat plus agréable, autre élément-clé ayant un impact sur la volonté des fumeurs. « À Barcelone, on est souvent dans un style de vie estival où tu as envie de fumer, de boire, te poser à une terrasse, témoigne Melike, qui travaille dans une société d’études de marchés. En France par exemple, avec la météo moins clémente, ça donne moins envie ».
Les terrasses et les fumeurs, un destin lié ?
Lieux privilégiés afin de se réunir et se détendre au soleil, les terrasses sont également dans le viseur du gouvernement qui souhaite les rendre « sans fumée ». Une mesure dangereuse pour Elisabeth, étudiante âgée de 21 ans qui a grandi à Barcelone et se permet « 2 à 3 clopes par jour depuis l’âge de 15 ans ». « En général, les Espagnols vont beaucoup plus fumer quand ils vont en terrasse. Ça serait con (sic) de l’interdire car ça ferait perdre de l’argent aux restaurateurs, craint-elle. Au lieu de se poser avec les amis en terrasse, on ira dans un parc et on dépensera moins ». Selon elle, « les gens ne vont pas arrêter de fumer pour ça » et « il y a des quartiers de Barcelone où les bars et les restaurants, surtout en été, dépendent uniquement des terrasses ».
Même son de cloche pour Charlotte. La Francilienne est « contre les terrasses sans fumée, car on est en extérieur. À Paris, c’est différent car il y a moins de place. Si c’est limité par rapport à une surface, pourquoi pas, mais dans l’absolu je ne pense pas que tu balances ta fumée sur tout le monde ».
Le cocktail cigarette-alcool
Le milieu de l’hôtellerie et de la restauration redoute d’ailleurs cette mesure qui ne rencontre pas un consensus en Espagne. Barcelone ne fait pas exception car ce secteur est un véritable poumon économique pour la ville catalane. Cette activité est d’ailleurs étroitement lié au côté « festif » de la ville.
« Il est surtout compliqué d’arrêter car c’est une ville assez festive et on a vite fait d’être pris dans ce rythme, selon Ylies. La cigarette est une drogue assez insidieuse qui a la facilité de s’associer avec l’alcool. Du coup, je sors beaucoup et je fais la fête plus que je ne la fais en France ».
Tout comme les autres habitants de Barcelone, les Français fumeurs vont pourtant devoir composer avec les nouvelles directives préparées par le gouvernement. Selon l’OMS et la banque mondiale, l’Espagne compte 27,7 % d’adultes fumeurs, par rapport à 33.4 % en France. Le but de l’Union européenne est d’arriver à une génération sans tabac pour 2040.