Alors que les liaisons nocturnes se multiplient en Europe et que le Paris-Berlin a repris du service, les projets de trains de nuit semblent complètement à l’arrêt dans la péninsule ibérique.
Photo : Midnight trains
Zurich, Prague, Berlin, Vienne, Bruxelles, Paris… De nombreuses villes européennes sont désormais reliées par des trains de nuit. L’engouement croissant pour le rail, plus écologique, plus confortable et souvent plus pratique que l’avion ou la voiture, se vérifie aussi de nuit. Le phénomène prend même sa vitesse de croisière, avec la semaine dernière encore, le lancement du Bruxelles-Prague via Amsterdam et Berlin.
Désireuse d’encourager ces liaisons nocturnes transfrontalières, la Commission européenne a même décidé l’année dernière de soutenir dix projets, dont un Barcelone-Amsterdam via Bruxelles, opéré par European Sleepers et promis pour fin 2024. Pourtant, cette liaison, comme celle du Paris-Barcelone annoncé en 2021 par la française Midnight Trains, semble au point mort et la frénésie des trains de nuit peine à passer les Pyrénées.
« Il n’y a pas de date d’ouverture pour cette connexion », indique désormais European Sleepers.« Pas avant 2026-2027 », nous répond Midnight Trains. Enfin pour OBB, qui a lancé plusieurs lignes en Europe centrale et aussi annoncé une liaison vers Barcelone, la péninsule ibérique ne figure plus du tout dans les projets à moyen terme. Selon des sources du secteur, les tracas administratifs et homologations imposées par la France, pays qu’il faut traverser, sont longs voire décourageants. Les lenteurs de la SNCF à valider les permis de circulation de ses concurrents ont d’ailleurs déjà été épinglées par l’Autorité de régulation des transports (ATR).
Trains de nuit en Espagne : peu d’intérêt des compagnies historiques
Mais au-delà des embûches techniques et administratives, c’est la rentabilité qui est aussi pointée du doigt. Y a-t-il vraiment un marché en Espagne pour des trajets à coûts assez élevés pour le passager comme pour l’opérateur ? « Si on veut faire un train de nuit Barcelone-Paris ou arriver jusqu’à des villes comme Zurich ou Milan, c’est possible, mais avec une composante de service public, quelqu’un doit couvrir la basse rentabilité », a récemment déclaré Raúl Blanco, président de la Renfe. L’opérateur espagnol a d’ailleurs stoppé toutes ses liaisons nocturnes nationales lors de la pandémie.
Les « trains hôtels », comme ils étaient appelés, ont relié durant des années la Galice à Barcelone et à Madrid, ainsi que la capitale espagnole à Lisbonne. Mais avec des pertes de plus de 25 millions d’euros sur ces trajets en 2019, l’entreprise publique a décidé de ne pas les réactiver.
Côté SNCF, le discours est tout aussi frileux : pas de projet nocturne entre la France et l’Espagne, faute de rentabilité. Des anciennes liaisons ferroviaires entre les deux pays, elle a uniquement gardé la ligne TGV diurne Paris-Barcelone, la plus lucrative du réseau. Il faudra donc sans doute encore patienter plusieurs années avant l’inauguration d’un nouveau train hôtel ibérique.