Alors qu’en France, les salles et les bars rock ferment les uns après les autres, Barcelone continue d’accueillir les blousons noirs du monde entier.
Photo : Erik Törner
Ian Kay, batteur du groupe Les Rencards et chanteur multi-instrumentiste dans son projet solo confirme « la scène rock à Barcelone regorge de musiciens provenant du monde entier, ce qui donne un métissage intéressant. » Et les Français ne sont pas en reste dans ce melting pot underground. De Manu Chao à Gilles Bertin, chanteur en cavale à Barcelone, du mythique groupe Camera Silens, la cité comtale fascine, attire et inspire les âmes damnées du rock’n’roll qui viennent trouver leur bonheur dans ses bars, ses squats et ses ruelles. En témoignent les nombreuses chansons écrites en son honneur comme Indios de Barcelona de la Mano Negra, La Rumba de Barcelona de Manu Chao ou encore Barcelone du rockeur québécois Jean Leloup.
« Si la France est un pays où l’on dispose de beaucoup plus d’aides et de subventions, en Espagne, il faut s’accrocher et trimer dur. Sans compter que le statut d’intermittent est un privilège que nous n’avons pas ici. Mais de mon point de vue, l’Espagne a toujours été un pays très “rock”, et le reste encore fermement » poursuit Ian, Lyonnais installé à Barcelone depuis 8 ans.
Du Rock Fest à Santa Coloma qui, malgré son nom, est le rendez-vous incontournable des fans de métal jusqu’au Beach, Beer and Chaos à Badalona (qui a affiché complet moins de quatre heures après la publication de son affiche), en passant par le Malas Artes dédié au punk, les festivals sont légion, et souvent moins onéreux qu’en France. Tandis que les bars, les disquaires et les concerts rock continuent d’attirer une faune aussi bigarrée qu’internationale.
Le rock français, plus populaire en Espagne ?
DJ Muller, promoteur d’évènements en Ile-de-France confirme. « A Paris, on n’a de moins en moins d’espaces pour organiser des concerts, et l’impression qu’on est une espèce en voie d’extinction. Je pense que le rock ne ramène pas autant d’argent que l’electro ou le rap. Des groupes comme Alvida ou Les Lullies remplissent régulièrement de grandes salles dans d’autres pays, dont l’Espagne, ce qui n’est pas toujours le cas en France où d’autres courants prédominent».
Les Lullies, actuellement en tournée en Mexique et aux Etats-Unis, avaient ainsi ouvert pour les Hives au Razzmatazz et joué au We’re loud Fest à Barcelone l’an dernier.
Friands de rock dans la langue de Molière, des collectifs locaux, comme Greeting From Barcelona, font souvent la part belle aux groupes français, de plus en plus nombreux à tourner dans la péninsule ibérique. Tandis que des formations catalanes se mettent même au français. C’est le cas des Rencards, dont la chanteuse originaire de Catalogne a choisi le français pour s’exprimer en revenant à Barcelone après avoir passé dix ans en Belgique afin de proposer quelque chose de différent et peu commun en Espagne : du French-Garage-Yéyé aux sonorités tout droit venues des 60’s.
Si les formations locales fleurissent et s’épanouissent autant dans leurs fiefs., des bars et des salles intimistes comme le Barbara Ann, le Psycho Bar, ou le Meteoro, on les retrouve aussi dans des évènements plus traditionnels et grand public. Ce qui n’est pas le cas en France où il est difficile pour un courant comme le rock de sortir de sa case de passionnés. Ainsi le groupe de post-punk Belgrado jouait gratuitement, l’an dernier aux Festes de la Mercè et Les Rencards, remplissaient la Plaça del Rei. Tandis qu’en pleine pandémie un concert du groupe rock Love of Lesbian réunissaient 5000 personnes au Palau Sant Jordi… Barcelone serait-elle le dernier bastion du rock en Europe ?