La loi d’octobre 2022 sur la mémoire démocratique approuvée par le Parlement espagnol interdit formellement l’exaltation publique du général Franco et de son régime dictatorial. Pourtant, un certain nombre de responsables politiques issus du parti de droite nationaliste Vox n’hésitent pas à revendiquer leur proximité idéologique avec l’ancien régime.
Ils sont élus en Aragon, dans les Baléares, à Valencia, ou à Castilla y Leon. Ils ont accédé au pouvoir régional dans le cadre d’accords entre la droite classique (Partido Popular) et radicale (Vox). Et ils manifestent un zèle et une nostalgie décomplexés pour le régime franquiste qui gouverna l’Espagne sous la forme d’une dictature de 1936 à 1975.
Par exemple, Alejandro Nolasco, vice-président du conseil régional d’Aragon, est l’auteur d’un livre élogieux sur la División Azul, le contingent de l’armée espagnole qui a combattu sur le front russe aux côtés des Nazis. Toujours en Aragon, Esmeralda Pastor et Jorge Valero, directeurs des ministères régionaux, respectivement de la justice et de l’agriculture, ont été pointés du doigt par le gouvernement espagnol. Les deux responsables de Vox risquent une amende comprise entre 10.000 et 150.000 euros pour exaltation du régime antérieur. La première pour apparaître sur les réseaux sociaux devant un drapeau franquiste, le second pour avoir loué dans une interview la personnalité politique du général.
Esmeralda Pastor devant un drapeau franquiste
Du coup, toute la pression retombe sur le président régional d’Aragon Jorge Azcón, figure pourtant centriste du Partido Popular. Face aux demandes de la gauche de limoger les hauts fonctionnaires aux tendances franquistes, le président aragonais a opposé une fin de non-recevoir. Avec des arguments : tout en taxant les déclarations des concernés comme malheureuses, celles-ci sont antérieures à leur prise de fonctions, ils étaient à l’époque des citoyens anonymes, et les publications ont été effacées des réseaux sociaux.
Dans toute l’Espagne
Mais les dérapages franquistes ne sont pas circonscrits à la région aragonaise. Le vice-président et ministre régional en charge de la culture à Valence, Vicente Barrera, est un torero sulfureux. Il a fait l’éloge du régime de Franco à plusieurs reprises sur les réseaux sociaux : « La classe politique du régime de Franco était brillante, sûrement la plus cultivée et la plus préparée que nous ayons eue depuis des siècles ». Plus au centre du pays, on trouve le vice-président en Castilla y León, Juan García-Gallardo également membre du parti Vox. Il a justifié sur les réseaux sociaux le coup d’État du 18 juillet 1936 qui a porté au pouvoir Franco: « sans le soulèvement national, l’Espagne aurait fini par devenir une république soviétique« .
Entre la présence de la gauche radicale aux tendances communistes au sein du gouvernement espagnol et les dérapages de Vox, le clivage politique en Espagne reste vif.