Avoir les clés à vie de sa chambre en colocation à Barcelone est dorénavant possible. Fruit d’un vide juridique, le concept se développe en Espagne. S’il reste pour l’heure à la marge, son potentiel grandit aussi vite que les prix des logements dans la capitale catalane.
Acheter plutôt que louer, pour « ne pas jeter son argent par les fenêtres ». L’argument est courant, mais à Barcelone, le processus se montre de plus en plus compliqué à mettre en place. Le prix du mètre carré dans la capitale catalane a gagné 1,7 % en un an. Il est désormais à plus de 4 100 €, en moyenne. Difficile donc pour les petites bourses de regrouper le budget nécessaire pour s’offrir son propre chez-soi. Certes, le SMIC a augmenté en Espagne, atteignant 1 080 € brut, mais les logements tout autant. Alors pourquoi pas investir dans une chambre ?
A Barcelone, cette nouvelle possibilité s’est nichée sur le marché immobilier. Dans la cité comtale, la case « achat » a été ajoutée à l’option colocation, qui a la cote. La start-up espagnole Habitación.com en a même fait son business. Sur son site web, elle propose des bouts d’appartements et des parties communes pour des sommes oscillant entre 30 000 et 40 000 €, payables mensuellement. « L’opération est effectuée en présence d’un notaire, pour être enregistrée sur le registre foncier », explique l’entreprise sur son site web. De quoi permettre aux petits budgets de brandir, eux aussi, leurs trousseaux de clés de propriétaires. Et comme les autres, louer à leur guise, ce coin de colocation.
Les chambres, nouvelles recrues du marché immobilier
Pour l’instant, le marché est à la marge. Seules quelques chambres sont à vendre, mais d’ici à 2024, la start-up espagnole compte en vendre 500. Voire plus. Car le concept est porteur. D’une part, parce qu’il est à l’image d’une « société de plus en plus volatile, où règne la culture du rien n’est pour toujours », commente le sociologue Victor Renobell, dans un article de La Vanguardía concernant la complexe installation des trentenaires espagnols. Mais aussi, parce que Barcelone possède un vaste vivier de chambres : 20 % dans toute la ville, selon le site Pisos.com. Et puis surtout, car la loi logement ne l’interdit pas.
Pour l’instant, rien ne contre-indique la vente et l’achat de chambres. Cela n’est même pas mentionné. « La loi 12/2023 parle des locations temporaires, mais pas de chambres », prévient une économiste de Fundación Habitat 3, dans le média Nius Diario. Tout en rappelant qu’un propriétaire de chambre ne peut donc, sur le papier, se voir garantir un droit au logement. Chose qui, entre autres, inquiète les experts. Car sans lois encadrant ce nouveau marché, la porte aux arnaques ou insalubrité peut être ouverte. « Avoir une licence, par exemple, permet de répondre à des critères d’habitabilité et de qualité« , rappelle l’économiste. C’est encore sans compter la pression sur le marché que peut imposer cette nouvelle offre, pourtant partie d’une volonté de rendre le rêve de posséder un patrimoine immobilier à Barcelone, accessible à tous les portefeuilles.