Dans cette nouvelle chronique, Equinox rencontre les bons vivants de Barcelone, ces Français amateurs de petits plaisirs gustatifs. Ici, ils partagent leur menu idéal, français aux notes catalanes. Cette semaine, c’est le Franc-comtois, Bertrand, qui invite avec une recette de famille. Avec, cerise sur le gâteau, les conseils de Romain Fornell, chef étoilé à Barcelone.
Photo : Maréva Laville/Bar l’Ancestral
« Disons que j’aime les bonnes choses et les bons produits ». C’est ainsi que se qualifie Bertrand, 47 ans. Mais l’expatrié originaire de Franche-Comté est un peu plus qu’un Français amateur de vins et gastronomie. Lui possède le goût des aliments dans les gênes. « Si j’écoutais mon cœur, je serais cuisinier », avoue le directeur commercial dans l’industrie pharmaceutique. Pas étonnant donc de le voir aux fourneaux lorsqu’il reçoit ses proches dans sa maison à Sant Just Desvern, sur les hauteurs de Barcelone. Question de famille. « Avec mon frère et ma sœur, quand on était petits, on jouait au restaurant et on préparait à manger à nos parents. Et maintenant, quand on se retrouve là-bas, c’est un peu la bataille pour accéder à la cuisine », rigole-t-il.
À chacun sa petite patte. Mais dans son cocon familial de Belfort, celle qui reste indétrônable prend la signature de « maman ». C’est d’elle que Bertrand tient l’une de ses recettes fétiches. Celle qu’il a apportée dans ses bagages en 2010, à Barcelone, pour s’installer dans la ville d’origine de Judith, sa femme. Et dans une région qu’il affectionne particulièrement, autant pour les paysages que les mets « à base de champignons, que j’adore ». Alors tel un fin créateur gourmet, Bertrand se prend au jeu de mixer les deux cultures, les deux univers dans un mélange de produits locaux, vins et touches françaises. A table ?
Quel plat aimes-tu préparer à l’heure de recevoir tes proches ?
Ça s’appelle l’escalope à la Franc-comtoise. Je ne sais même pas si cette recette existe vraiment parce que c’est un plat inventé par ma mère. Mon père avait été mangé dans un restaurant et il avait adoré ce plat. Alors ma mère avait essayé de le reproduire. Et depuis, c’est resté.
Quelle est la recette ?
C’est à base d’escalopes de veau blanc, aussi appelé veau élevé sous la mère ou veau de lait. Je prends des tranches assez fines de cette viande bien blanche, que je fais poêler dans du beurre doux. Je les fais ensuite flamber au cognac et je réserve. Ensuite, je fais la sauce à base de vin blanc, du Chardonnay, de crème, de morilles et oignons. Puis, la particularité de la recette, c’est de mettre les escalopes en chemise, à l’intérieur d’une tranche de jambon pliée en deux. Dedans et dessus, je mets la sauce aux morilles. Je mets le tout dans un plat au four. C’est pratique : il n’y a plus qu’à réchauffer avant de servir.
Où trouves-tu les ingrédients ?
Les morilles, c’est l’oncle de ma femme qui les ramasse dans les Pyrénées catalanes, à côté d’Andorre. On les fait sécher ensuite pour pouvoir les conserver toute l’année. Pour la viande, je l’achète au marché de Sarrià, chez le boucher qui s’appelle Casademunt. Et le jambon fumé, il faut des tranches assez épaisses. En général, je le prends au marché de Sant Just Desvern.
Que proposes-tu comme accompagnements ?
Souvent, je sers ça avec des Spätzle, des pâtes qu’on retrouve dans le sud de l’Allemagne. Et en vin, un blanc de Bourgogne évidemment ! Je prends une bouteille de Chassagne Montrachet.
Où achètes-tu ce vin français ?
Je vais à la Vila Viniteca, dans le Born. Ils ont une incroyable sélection de vins espagnols et français.
Pour qui fais-tu ce plat ? Des invités français ou catalans ?
Les escalopes franc-comtoises ? Plutôt pour des Français ou des Catalans un peu francophiles, qui aiment les sauces et la crème. Parce qu’en général, les Catalans sont moins fans de la crème et du beurre.
Bonus : le menu idéal par Romain Fornell, chef étoilé
Depuis 2002, Romain Fornell ne cesse de séduire les papilles des Barcelonais. Reconnu pour sa créativité, le chef français formé à l’École hôtelière de Toulouse était d’ailleurs le plus jeune cuisinier de France à obtenir une étoile Michelin. Pour Equinox, il propose deux petits plus pour parfaire ou accompagner le plat fétiche des Bons vivants de Barcelone.
- En entrée : une vichyssoise glacée
C’est un potage poireaux-pommes de terre servi froid, dans des assiettes préalablement passées au congélateur. En été, c’est parfait, ça permet de contraster le plat assez riche avec les morilles. Je le servirai avec un filet d’huile de basilic et quelques petites gambas sautées refroidies. Et pour donner un peu plus de légèreté à la vichyssoise, je le passe dans un siphon pour l’aérer.
- Le dessert : carpaccio de figues et glace au caramel
Quelque chose de simple et de saison. Les figues, il faut les faire durcir au congélateur, puis les couper en fines tranches. Je les assaisonne avec quelques gouttes de vin de Banyuls et de Jerez, et quelques amendes caramélisées dessus. Et je sers ça avec soit une glace au caramel, soit à la vanille.