Barcelone sans tourisme survivrait-elle ? Son économie ne repose pas que sur les vacances qu’elle propose. Entre innovation, éducation et industrie, la capitale catalane possède plus d’un atout.
« Barcelone sans tourisme serait morte ». Il n’est pas rare de l’entendre cette phrase, dans la capitale catalane. D’une part, parce que 12 % de son Produit intérieur brut (PIB) provient de ce secteur d’activité. Mais aussi parce qu’il est à l’origine de 9 % des emplois dans la ville, d’après la mairie. Chaque année, Barcelone reçoit pas moins de 28 millions de visiteurs. C’est dire à quel point elle attire. Surtout pour son climat, sa position géographique en bord de mer, son accessibilité.
Et pourtant, le tourisme n’est pas le seul atout de la capitale catalane. « Elle en possède bien d’autres, tout aussi importants, notamment dans les secteurs de la connaissance », avance Oriol Amat, professeur d’économie financière à l’Université Pompeu Fabra (UPF). Car oui, à elle seule, Barcelone possède plus d’une carte à jouer d’un point de vue économique.
Son port de marchandise
Tournée vers le monde, c’est l’une des devises de Barcelone. « C’est un placement très intéressant au niveau de l’investissement international. L’un des meilleurs du sud de l’Europe, selon le Financial Times », assure l’économiste Oriol Amat. Grâce à son emplacement, son aéroport, sa connexion avec le reste de l’Espagne, sa proximité avec la France, mais aussi son port européen très important. Ce dernier est d’ailleurs le troisième plus gros d’Espagne derrière Valence et Algésiras (Andalousie). A lui seul, il concentre près de 19 % des ventes du pays à l’étranger, et fait de la Catalogne la première exportatrice de la péninsule ibérique. Car au départ de Barcelone, les exportations ne cessent de croître, jusqu’à atteindre plus de 73 millions d’euros en 2022. Elles ont d’ailleurs augmenté de 19,6 % cette année, d’après le média catalan El Nacional.
Sa Silicon valley méditerranéenne
Plus de 2 022. C’est le nombre de start-ups à Barcelone, réunis au 22@ du quartier de Poblenou. Quelque 6,3 % de plus encore que l’an passé. Le secteur est en plein essor depuis 2016 dans la capitale de Catalogne, avec comme fleuron, la technologie. La data, l’intelligence artificielle, la robotique, la réalité virtuelle ou augmentée participent au cinquième meilleur écosystème européen pour les start-ups, selon Startupblink 2022.
« C’est l’une des forces économiques de Barcelone », assure Oriol Amat. Selon l’ancien doyen du Collège des économistes de Catalogne, la dynamique des start-ups et du secteur de l’innovation fait de la cité catalane « l’un des pôles les plus importants d’Europe, avec une très bonne place dans tous les classements ». Rien qu’à lui, ce secteur engendre 19 000 emplois. Et ne cesse d’attirer les entrepreneurs. Preuve en est, le Mobile World Congress est l’un des salons phares de Barcelone, regroupant les professionnels de la tech du monde entier.
Son industrie pharmaceutique
Le deuxième grand secteur contribuant à l’économie de Barcelone n’est autre que l’industrie. Celle-ci représente 19 % de l’activité derrière tout le domaine tertiaire, qui lui génère 74 %. Dans ce vaste champ, c’est le secteur pharmaceutique qui s’avère être le plus productif après l’automobile à Barcelone. Il génère 7 % du PIB et crée pas moins de 15 800 emplois en Catalogne, d’après le média CincoDías. C’est dans cette région d’Espagne que se concentre la majorité du secteur. 60 % des produits du pays y sont fabriqués, dans des entreprises familiales conséquentes comme les laboratoires Esteve, Ferrer ou encore Uriach.
Barcelone continue d’intéresser les investisseurs et les grands groupes. Dernièrement, la filiale Alexion d’AstraZeneca, dont le nom a gagné en popularité depuis la pandémie de Covid-19, a annoncé un investissement de 800 millions d’euros dans un « hub » de recherche dans la cité comtale. Son objectif ? Devenir la référence européenne du secteur pharmaceutique. « Barcelone est l’une des villes les plus attrayantes avec les meilleurs pôles de recherche », confirmait dans une interview Caroline Lambert, professionnelle française du secteur pharmaceutique et médicale.
Ses innovations médicales
Parler d’innovation à Barcelone sans évoquer la médecine ? Impensable. Les activités scientifiques font monter le pourcentage de l’activité économique du secteur tertiaire à 11 % dans la cité comtale. Elle est, de fait, à la pointe. Encore récemment, fin février, les chirurgiens de l’hôpital Vall d’Hebron ont réalisé une prouesse : la première transplantation pulmonaire au monde réalisée avec un robot. Cette dernière a démontré qu’il était possible d’enlever un organe malade et d’en introduire un second avec une incision de 8 centimètres seulement. Quelques mois plus tôt, Barcelone intégrait le Top des 200 meilleures innovations de l’année du Time Magazine, concernant le cancer du sein.
En bref, la cité catalane se place parmi les 10 meilleurs centres de développement clinique en Europe, et les 20 premiers au monde. Une expertise qui s’explique notamment par « la convergence de l’industrie pharmaceutique, technologique, des centres d’innovation avec les hôpitaux », selon le directeur du centre d’innovation de l’Hospital del Mar, Jordi Martínez. Mais aussi la multiplicité des pôles de recherche, des centres hospitaliers jusqu’aux universités. « Barcelone est l’une des meilleures pour étudier la médecine », affirme le médecin de profession.
Ses universités
« Il y a un système éducatif avec des écoles de commerce importantes dans la zone de Barcelone », renchérit Oriol Amat, professeur en Économie à la Pompeu Fabra. Se former à Barcelone attire les étudiants du monde entier, et contribue à hauteur de 14 % de l’activité tertiaire barcelonaise. La capitale catalane possède au total 25 écoles supérieures, dont huit universités publiques. Et trois d’entre elles figurent parmi les meilleures du pays, selon un classement de Times Higher Education. On retrouve alors celle de Pompeu Fabra, reconnue pour sa biomédecine, entre autres, la Universitat Autònoma de Barcelona (UAB) pour ses sciences sociales et la santé, ou encore l’Université de Barcelone. Le campus Politechnique fait aussi partie des plus reconnus.
Mais c’est encore sans compter les quelque 19 écoles privées. Chaque année, plusieurs étudiants français, par exemple, traversent la frontière pour se former en kinésithérapie à Sant Cugat del Vallès, dans la banlieue proche de Barcelone. Et en fin de compte, « beaucoup de personnes parlent français, ils ont un bon niveau d’anglais. Ça crée une main d’œuvre de qualité », conclut le chercheur en Économie, Oriol Amat.
Son commerce et son marché immobilier
Outre le tourisme, parmi les 74 % de l’économie générée par les services, ce sont les commerces qui arrivent en tête. Ils se dotent d’un taux de 19 %, suivi par l’argent produit par les administrations, les scientifiques, puis l’immobilier à hauteur de 9%. L’information, les communications, les activités culturelles et financières terminent en bas de l’échelle. Autant de domaines, donc, sur lesquels Barcelone peut compter. Auprès des locaux, et non des touristes cette fois-ci.
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