Faire une calçotada ou manger des calçots, c’est une des traditions les plus suivies en Catalogne durant les mois d’hiver. Les calçots sont un immanquable de la gastronomie catalane et ils sont souvent le prétexte pour se retrouver en famille ou entre amis autour d’une table gourmande et généreuse.
Photo : Sònia Vallès
Par Florence Siguret, guide de référence à Barcelone, qui vous fait découvrir les secrets de ce légume savoureux.
Qu’est-ce qu’un calçot ?
Le calçot, c’est une variété d’oignon blanc (Allium Cepa L. en latin), tendre et doux, cultivé essentiellement en Catalogne mais aussi dans d’autres provinces d’Espagne, y compris à l’étranger. La récolte se fait en général de novembre à avril suivant les régions. Sa particularité vient du fait que, au lieu d’être rond, l’oignon est allongé et fin, lui donnant l’apparence d’un petit poireau que l’on va acheter en bottes.
Pourquoi on l’appelle calçot ?
Le mot “calçot” fait sans doute allusion à la technique que l’on utilise pour générer une croissance verticale de l’oignon. En effet, régulièrement, environ 3-4 fois au cours de leur développement, on les “chausse” (calçar en catalan) avec de la terre : c’est à dire qu’on que l’on couvre la base du plant avec un peu de terre pour inciter l’oignon à s’étirer pour chercher la lumière.
D’où viennent les calçots ?
Leur découverte aurait eu lieu à la fin du XIXe non loin de Tarragone, grâce à un agriculteur de la ville de Valls, un peu distrait, qui aurait laissé brûler des oignons sur une grille par inadvertance. Comme il n’est pas question de jeter, le paysan les aurait pelés avant de les consommer, surpris par leur saveur fondante et agréable. Valls est donc devenue tout naturellement la capitale des calçots.
Cette version d’une invention 100% catalane a été depuis nuancée par la découverte d’une représentation de calçots à Szőny (Komárom) en Hongrie. Ancien territoire de l’empire romain, c’est dans une villa datant du IIIe siècle après Jésus-Christ que l’on a retrouvé un fragment de peinture sur lequel est représenté un homme (sans doute un esclave) en train de déguster de longs oignons, exactement dans la même posture que l’on adopte aujourd’hui pour manger les calçots. Cette découverte témoigne d’une consommation déjà présente dans l’Empire Romain, corroborée par les recherches postérieures.
Même s’il y a débat sur l’origine, les calçots deviennent au XXe siècle le motif de retrouvailles festives. Dans les années 1950, la Penya Artística de l’Olla commence à organiser de grandes calçotadas auxquelles participent les figures de la vie artistique et culturelle barcelonaise.
Aujourd’hui il existe une IGP (Indication Géographique Protégée) attribuée par l’Union européenne qui couvre les zones de production de l’Alt Camp, Baix Camp, Tarragonès et Baix Penedés. Le véritable calçot d’IGP doit mesurer entre 15 et 25 cm et avoir un diamètre de 1,7 à 2,5 cm.
Qu’est-ce qu’une calçotada ?
Faire une calçotada, c’est tout simplement faire un repas dans lequel les calçots seront les principaux protagonistes. C’est un repas convivial qui se partage en général en famille ou entre amis et il y a même de grandes calçotadas qui sont organisées dans les quartiers ou dans les villes catalanes. Faire une calçotada est devenu une tradition très populaire au XXe siècle.
La calçotada la plus célèbre a lieu dans la ville de Valls, évidemment ! La fiesta de la Calçotada de Valls a lieu fin janvier et elle marque le début de la haute saison des calçots.
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Même si les calçots sont la base du menu, ils sont souvent accompagnés d’une sélection de viandes (saucisse (botifarra), côtes de porc etc.), d’haricots blancs et d’artichauts suivant les restaurants et le célèbre pa amb tomàquet, le pain à la tomate. Bref, il est rare de sortir d’une calçotada avec la faim !
Comment cuisiner les calçots ?
Il y a plusieurs techniques pour faire cuire les calçots. La plus commune c’est a la parilla : on dispose les calçots entre deux grilles (le plus pratique). On va placer les grilles au-dessus des flammes puis lorsqu’ils commencent à perdre un peu d’eau, on les retourne pour faire griller l’autre côté. De nouveau, quand ils commencent à perdre de l’eau, ils sont cuits. Si on ne compte pas les consommer immédiatement, on va les envelopper dans du papier journal pour les garder au chaud.
L’autre technique, c’est celle de l’alambre ou fil de fer. On enfile alors le bout des calçots comme pour en faire un collier et au lieu de les disposer sur une grille, on va les placer directement sur les flammes. C’est une technique qui permet de cuire des calçots en grande quantité et en peu de temps.
L’important dans ces deux techniques, c’est la nature du bois que l’on va brûler : pour leur donner leur saveur unique, on va plutôt utiliser des sarments de vigne que du bois classique.
On peut aussi cuisiner les calçots a la brasa, sur des braises ou même au four.
Comment ça se mange ?
Âmes sensibles s’abstenir : les calçots se mangent avec les mains.
Ils sont souvent servis sur une tuile de terre cuite pour garder la chaleur. Ensuite, on saisit un calçot grillé : d’une main on attrape les feuilles centrales, de l’autre, on tire légèrement sur la pointe. Le calçot tendre et propre sort facilement, débarrassé de ses feuilles calcinées. Il ne reste plus qu’à le tremper dans la salvitxada ou dans la sauce romesco, lever le bras et descendre le calçot dans la bouche.
Un détail important : l’accessoire indispensable de toute calçotada, c’est le bavoir pour vous essuyer les mains (noircies par les calçots grillés) et surtout éviter les tâches dues aux chutes de sauce romesco. Inutile de préciser que la calçotada n’est pas conseillée pour un premier rendez-vous romantique…
On peut faire une calçotada au restaurant, dans son quartier lors d’événements organisés, entre amis à l’air libre dans des merenderos, ces zones où on peut louer un espace de barbecue, à la campagne dans une ancienne ferme par exemple. Même les grands hôtels proposent des menus calçotada. Il y a l’embarras du choix, mais une chose est sûre, c’est à ne manquer sous aucun prétexte !