Ces commerces d’époque de la Rambla résistent face au tourisme à Barcelone

Au milieu des chaînes commerciales de la Rambla, à Barcelone, se cachent encore des petits commerces au charme d’antan. Des affaires transmises de génération en génération. Alors, c’est quoi leur secret ? Quatre boutiques révèlent les clés de la longévité.

Crédits photos : Maréva Laville

Montserrat fait le trajet depuis Hospitalet tous les jours pour ouvrir sa librairie Pompeya. Sebastia, lui, ne manque pas un matin sans prendre son expresso au Cafè de l’Òpera. Quant à Clara Altimiras, et Jaume Doncos Pros, c’est en famille qu’ils continuent de faire vivre leurs boutiques. Sur la Rambla, tous ont su préserver leurs commerces et résister au tourisme de masse. « Comme des très vieux couples qui s’aiment encore ».

Serait-ce donc cela le secret d’une affaire qui dure ? En fait, les raisons sont multiples. D’abord, il y a les sentiments. Ensuite la résistance. Et aussi (ou plutôt surtout), le statut de propriétaire. Quatre des commerces les plus anciens de la Rambla de Barcelone livrent le secret de leur pérennité.

Casa Beethoven, en famille ou rien

Jaume Doncos Pros regarde sa boutique de partitions de musique, Casa Beethoven, avec nostalgie et fierté. A l’entrée, derrière une table de bouquins, Angels conseille un client étranger. « Maintenant, les touristes représentent la majorité de notre clientèle », commente Jaume. Le Catalan de 61 ans et sa sœur ont dû adapter leur offre pour survivre. Pas le choix, face aux technologies qui rendent accessibles gratuitement les partitions de musique.

DSC 7228 2 scaled

A Casa Beethoven, on trouve des partitions de toutes les époques et de tous les genres. Et des instruments de musique !

Casa Beethoven existe depuis 1880. Elle a vécu les guerres, des situations difficiles, le tourisme de masse. « Mais comme les couples, on résiste », sourit Jaume, à la tête de l’entreprise depuis 54 ans. Nichée à deux pas de La Boquería, la boutique a conservé son charme d’antan. Les partitions montent jusqu’au plafond et sont, pour certaines, vieilles de plus d’un siècle. Tout autant que l’histoire de l’entreprise. Casa Bethoveen, c’est une affaire de famille transmise de génération en génération. « C’est toute notre vie. On n’a peut-être pas de grands salaires mais on est deux. Moi et ma sœur.

Résister aux changements, chez Gallissa

A quelques pas de là, Clara Altimiras et son cousin Sergi Martínez descendent un cadre accroché au fond du magasin de bougies. « Deuxième prix de l’Exposition universelle de Barcelone, 1888 ». La boutique Gallissa avait ouvert en 1826 dans cette rue voisine de la Rambla. Elle est aujourd’hui tenue par la sixième génération de la famille. « Depuis, il y a tellement de commerces qui ont fermé à cause des prix des loyers qui ont explosé. Ça fait de la peine », évoque la gérante Clara Altimiras.

Etre propriétaire, le secret ultime de la librairie Pompeya

Être propriétaire. C’est la clé de survie de toutes les entreprises familiales et anciennes. Sans ça, aucune des affaires n’aurait pu perdurer. « C’est ça le secret. Rien d’autre », assure Montserrat Martí Guadall, derrière la caisse de sa librairie-papeterie Pompeya.

Dans sa librairie de 49 m2, les bouquins couvrent les murs jusqu’au plafond. Dans un coin du fond de la boutique, la libraire se remémore les années d’antan en sortant des cahiers pour apprendre les tables de multiplication. 70 ans que Montserrat tient la boutique achetée par ses grands-parents en 1922. Alors forcément, des Catalans, elle en a vu pleins. « Souvent ils passent et me disent ‘je me souviens bien d’ici, je venais quand j’étais petit avec mes parents’. » 

Mais maintenant, ils sont moins nombreux, avoue Montserrat. Et de ses voisins commerçants, encore moins. En fait, à part Gallissa, la boutique de bougies voisine, il n’en existe plus aucun. « Mais c’est normal. Comment peux-tu survivre sans être propriétaire ? Les loyers ont tellement augmenté. Juste dans cette rue, c’est entre 3 000 et 4 000 € par mois. C’est impossible ! »

DSC 7052 2 scaled

La librairie Pompeya vend des livres espagnols mais pas que. Certains bouquins, en anglais, sont destinés aux touristes.

Tradition et petits prix au Cafè de l’Òpera

A moins de 20 mètres, la Rambla. Juste à côté du métro Liceu, la terrasse du Cafè de l’Òpera est remplie. A 1 € le café, comment refuser ? Malgré la masse touristique, même les travailleurs du quartier et les Catalans pure souche continuent de braver la foule pour trouver une place dans le bar-restaurant.

Car à l’intérieur, le temps semble suspendu depuis l’ouverture du Café, en 1831. Les serveurs ont gardé le look d’autrefois. Et au comptoir, les personnes âgées (des hommes pour la plupart), s’assoient les uns après les autres pour lire l’un des trois journaux mis à disposition des clients. Sebastia, 79 ans, vient ici quotidiennement depuis 52 ans. « Ici, ce sont des amis. Leur secret c’est de garder la tradition familiale. Et puis les prix aussi ! » 

DSC 7159 2 scaled

Au Cafè de l’Òpera, les habitués viennent pour lire le journal, prendre un café ou déjeuner à bas prix.

Sur la Rambla, payer 1,10 € son café allongé, parait impensable. Les commerces d’à côté font généralement payer 9 € le verre. Une somme finalement normale, selon le sixième gérant du Cafè de l’Òpera, Andreu Rose. « Si nous n’étions pas propriétaires, ça fait bien longtemps qu’on serait partis. Quand on voit les autres qui payent entre 15 000 et 30 000 € la location, c’est juste impensable. »

A lire aussi : 7 commerces pour découvrir la Barcelone la plus authentique

Recommandé pour vous

Bloqueur de pubs détecté

Merci de désactiver votre bloqueur de publicités pour accéder gratuitement aux contenus d'Equinox.