Incivisme, bruit et manque de respect, c’est le cauchemar que dénoncent depuis des années les habitants de certains quartiers de Barcelone. Si la ville tente de limiter les logements touristiques, les Barcelonais ne remarquent aucun changement.
En arrivant dans la rue de la Junta de Commeç, parallèle à la Rambla dans le Raval, pas de bars ni de restaurants, mais la musique fait quand même la loi. Le son provient d’une des fenêtres ouvertes donnant sur la ruelle, pourtant d’allure calme. Ici, ce n’est pas moins de cinq logements touristiques qui sont installés. Angel vit là depuis plusieurs années et chaque jour, il est confronté à du bruit et de la musique forte, comme c’est le cas ce jour-ci. Interrogé sur le sujet, l’homme d’une cinquantaine d’année répond, les nerfs à vif, qu’il est « tout simplement épuisé de la situation ».
Photo : Clémentine Laurent/Equinox
« C’est pire d’année en année » confie Rosalia, retraitée qui vit dans le Raval depuis 53 ans. Après deux années de tranquillité liées à la pandémie, le retour des touristes est synonyme d’un nouvel enfer quotidien pour les riverains. Et l’arrivée de l’été n’est pas signe d’amélioration. Antonio Martínez Gómez, président de l’Association des voisins du Raval vit depuis 20 ans à côté d’un immeuble touristique, « en été c’est difficile, il y a tout le temps des fêtes et du bruit tard la nuit, surtout les weekends ».
Le profil du jeune touriste français, pointé du doigt
Les jeunes sont les plus ciblés par ces plaintes. En effet, les habitants font très souvent référence à des touristes âgés du vingtaine d’années. L’image du jeune étranger venu à Barcelone pour faire la fête persiste et se consolide même au fil du temps. La nationalité est également montré du doigt par certains, comme Angel qui cible les Allemands, les Anglais, les Américains et les Français. « Quand nous on va en vacances en France, on respecte ceux qui vivent à côté. Eux s’en fichent complètement ! » ajoute le riverain, debout à l’entrée de son immeuble.
Photo : Anaëlle Petot
Ce ras-le-bol général a poussé certains habitants à agir, comme Antonio Martinez, « parfois quand ils faisaient trop de bruit, il m’est arrivé de leur jeter de l’eau dessus depuis mon balcon » explique l’homme, visiblement désespéré.
Les riverains dénoncent également l’inaction de la mairie. « Il n’y a aucune mesure, aucune aide, juste des réunions de discussions » confie Rosalia. Même si la municipalité a mis plusieurs mesures en place pour limiter le tourisme, « il n’y a plus vraiment de solutions tellement le problème a pris de l’ampleur », affirme la retraitée.
La Barceloneta, un quartier à bout de souffle
La situation est encore pire à la Barceloneta. Il y aurait environ 800 logements touristiques illégaux dans cet ancien quartier de pêcheurs, selon Manel Martinez, vice-président de l’Association des voisins de la Barceloneta. Cela représente 7 à 8 fois plus de logements que dans tout le centre historique de la ville et de l’Eixample. En 2014, l’association a tenté de calculer le nombre de touristes qui logeaient dans leur quartier entre juin et août : près de 10 millions en seulement trois mois.
Le quartier est devenu le repère à touristes depuis plusieurs années déjà. Une situation que les habitants ne supportent plus. « C’est une situation incontrôlable pour les riverains » affirme Manel Martinez, qui reçoit beaucoup de plaintes de la part des résidents du quartier. Il déplore également que ces logements touristiques attirent une population de touristes inciviques.L’impuissance de la mairie combinée au développement du tourisme, toujours plus important à Barcelone, n’est pas bénéfique au bien-être des habitants. Résultat, les touristes restent, et sont même de plus en plus nombreux, alors que les riverains s’en vont.
C’est le cas d’une jeune femme de 24 ans, dont la famille vivait à la Barceloneta depuis trois générations. Au moment du renouvellement de son bail, de 300 € par mois, son loyer est passé à 2 500 € pour viser les touristes. Incapable de trouver une autre location à un prix modéré, elle a quitté le quartier. Un phénomène qui se répand de plus en plus à Barcelone et inquiète les habitants.
Lire aussi : Peut-on encore se loger à Barcelone ?