On entend souvent dire que les expatriés fuient quelque chose. Les personnes choisissant ce mode de vie sont-elles différentes de celles qui restent au pays ?
Réponse avec Nicolas Laheurte, psychothérapeute français à Barcelone.
Qu’est-ce qui pousse une personne à s’expatrier, est-ce une fuite en avant comme on l’entend parfois ?
D’un point de vue de psychothérapeute Gestalt, je dirais que c’est d’abord la croyance en l’obtention d’un bénéfice à cette situation. Un bénéfice non-permanent qui en fera toute l’attractivité, car le statut d’expatrié est par essence temporaire, sinon cela devient une forme de résidence permanente ou d’immigration. Ce bénéfice est lié aux conditions de séjour, qui se veulent le temps de l’expatriation, meilleures que dans le pays d’origine.
Souvent ce mouvement se rattache à la propre histoire des personnes qui s’expatrient. Elles ont vécu cette vie par le passé en famille ou cherchent à se rapprocher de la culture d’un de leur parent étranger en rejoignant sa terre d’origine. Parfois, c’est une simple opportunité, une rencontre, une envie, une proposition professionnelle. Elles ont toutes cette capacité au mouvement, à l’adaptation, à l’exploration.
L’expatriation peut-elle être vue comme une rupture ?
L’expatriation n’est pas à proprement parler une rupture car elle est temporaire. Mais c’est une mise entre parenthèse d’un mode de vie passé. Rappelons-nous, c’est soi-même que l’on transporte partout où l’on va. Si elle offre d’autres horizons, elle ne permet jamais de se fuir. Pour que l’expatriation soit heureuse, autant être déjà heureux soi-même.
Faut-il avoir un esprit plus téméraire que la moyenne pour changer de pays, de culture, de cercle amical et social ?
L’expatriation est une aventure exceptionnelle, car en effet elle demande un certain courage. Il faut pouvoir laisser derrière soi ses liens affectifs et envisager d’en développer de nouveaux. Tout le monde ne s’en sent pas capable.
Les expatriés, pour le psychothérapeute que je suis, ont en commun cette capacité de détachement et d’attachement à de nouveaux repères, qu’ils considèrent comme étant un enrichissement par leur ouverture à d’autres cultures, d’autres espaces géographiques, d’autres langues. Certains se sont offert cette expérience marquante une fois, d’autres en ont fait un mode de vie itinérant.
Pourquoi certains rentrent-ils en France rapidement tandis que d’autres s’installent définitivement à Barcelone ?
Les expériences d’expatriation peuvent être très hétéroclites. Le vécu n’est pas forcément le même et conditionne le prolongement ou pas de l’aventure.