Après deux ans de pandémie et au milieu d’une crise énergétique, une partie de la société espagnole est sous tension.
« La rue ne supportera plus longtemps le gouvernement ». La menace ne provient pas d’un syndicaliste ou du porte-parole d’un mouvement anti-système, mais du numéro 2 du parti de droite Teodoro García Egea. Selon l’analyse du porte-parole du Partido Popular, prononcée la semaine dernière devant la presse, la société espagnole ne tiendrait plus en place avec les politiques de la coalition gouvernementale Socialiste-Podemos.
L’Espagne assiste-t-elle à une révolution conservatrice ? Il est trop tôt pour le dire, mais il est vrai que des collectifs traditionnellement à droite battent le pavé.
La police
Ce week-end à Madrid, des milliers de policiers nationaux, de gendarmes et de Mossos d’Esquadra ont manifesté contre la réforme de la loi de sécurité intérieure qui rabote de nombreuses prérogatives des forces de l’ordre.
Pêle-mêle, le gouvernement de gauche rend possible pour un particulier de prendre en photo ou de filmer des policiers lors de manifestations ou d’un contrôle. Le système des amendes infligées à une personne condamnée pour un délit lors de manifestations est revu à la baisse. L’utilisation de flashballs va être sérieusement limitée. La réforme veut rendre plus compliquée la condamnation d’une personne ayant agressé un policier. Une batterie de mesures qui a enflammé les syndicats de police, dont les tensions idéologiques avec la gauche radicale de Podemos sont de notoriété publique.
Les transporteurs
Les entreprises de transports sont également très tendues. À Barcelone, ce dimanche, a eu lieu une opération escargot. Un mouvement de mauvaise humeur contre Ada Colau et la zone de basses émissions qui restreindra partiellement l’entrée et la circulation des poids-lourds pour des raisons écologiques à partir du 1er janvier prochain.
Au plan national, les transporteurs menacent d’une grève les 20 et 22 décembre pour protester contre le prix de l’essence qui ne cesse de battre des records depuis des mois. Pour tenter de désamorcer le conflit, le gouvernement a ouvert une ligne de subventions d’un montant de 400 millions d’euros. Pour l’instant, la grève est maintenue.
Le secteur agricole
Si les camionneurs décident de paralyser le pays à la veille des fêtes de Noël, ils trouveront sur les routes espagnoles le soutien amical des entreprises du secteur agricole. Les camions pourraient côtoyer les tracteurs qui sont furieux contre la hausse des coûts fixes : eau, semences, engrais, plastique, électricité, essence, rendant encore plus complexe la rentabilité d’une exploitation agricole de taille petite ou moyenne.
La tension politique
La droite classique (Partido Popular) ou extrême (Vox) mène une opposition très dure au gouvernement. Les alliances parlementaires du gouvernement avec les Catalans et les Basques sont qualifiées de pactes avec les séparatistes et les terroristes par l’opposition. La lutte contre la pandémie ne bénéficie d’aucune union nationale. Vox a même traîné le gouvernement devant le tribunal constitutionnel pour rendre le confinement illégal.
La droite au pouvoir dans les conseils régionaux d’Andalousie et de Castilla y Léon pourraient déclencher des élections anticipées locales. Donné gagnant dans les sondages, le Partido Popular espère ainsi donner une première estocade dans les urnes à la gauche. En espérant qu’un effet boule de neige oblige le Premier ministre à dissoudre le parlement et convoquer une législative nationale anticipée.