Dans un contexte d’urgence climatique, la ville de Barcelone œuvre pour répondre aux grands enjeux écologiques contemporains, notamment en luttant contre la pollution de l’air. À ce jour, quelles sont les actions de la mairie et quels en sont les résultats ?
L’arrivée d’Ada Colau à la mairie de Barcelone a marqué un tournant écologique. L’une des mesures phares de ses mandats date du 1er janvier 2020 avec la mise en place des Zones de Basses Émissions (ZBE). Ces dernières limitent la circulation des véhicules les plus polluants afin de réduire les émissions de dioxyde d’azote. Seules les voitures munies d’une vignette, que l’on obtient sur le site des ZBE, peuvent circuler à Barcelone.
En parallèle, la capitale catalane mise sur l’expansion des transports en commun, des pistes cyclables, des bornes de recharge pour voiture électrique et d’espaces verts. « La diminution de la pollution de l’air repose en partie sur le changement de modèle de la mobilité, explique Janet Sanz, conseillère au département écologie, urbanisme et mobilité de la mairie de Barcelone. En multipliant les alternatives à la voiture personnelle, poursuit-elle, les émissions de dioxyde d’azote diminuent. » Par exemple, l’Aire Métropolitaine de Barcelone (AMB) a aménagé l’axe de Laureà Miró et la rue Collblanc de manière à intégrer une voie de bus et une piste cyclable de 3,1 km reliant Hospitalet de Llobregat, Espluges de Llobregat et la cité comtale. À ce jour, Barcelone compte plus de 200 km de pistes cyclables.
Mobilisations citoyennes
La pollution de l’air n’est pas seulement une préoccupation de la municipalité. Des collectifs citoyens ont vu le jour pour mettre en œuvre des solutions à petite échelle. C’est le cas d’Eixample Respira. L’association de voisins organisent régulièrement des manifestations et appelle la mairie à proposer de vraies solutions pour répondre à l’urgence climatique. En effet, fin 2020, la mairie a lancé un projet de piétonnisation de l’Eixample, à l’instar des quartiers de Poblenou et Sant Antoni. Les travaux débuteraient en 2022 pour une durée d’un an. « C’est une bonne nouvelle, mais les mesures ne sont pas à la hauteur de l’urgence climatique, ni des besoins du quartier le plus pollué de Barcelone » indique Guille López, membre d’Eixample Respira.
« Le plan de la mairie prévoit un changement pour seulement quelques rues, alors qu’il faudrait réduire la circulation sur des axes très passants comme la carrer Aragó et la Gran Via » explique le Barcelonais. Plus de 85.000 véhicules circulent par jour sur la première et plus de 56.000 sur la seconde, selon les chiffres du collectif. « La perspective à long terme n’est pas satisfaisante, nous souhaiterions des mesures plus drastiques comme celles instaurées à Paris. Dans dix ans, il sera toujours possible de traverser Barcelone en voiture » s’inquiète Guille López.
Des mesures pour quels résultats ?
Le 19 juillet dernier, l’Agence de santé publique de Barcelone (ASPB) annonce qu’en réduisant la pollution aux niveaux de 2020, 600 décès par an seraient évités. « L’année 2020 nous a démontré qu’une baisse conséquente du trafic routier améliore nettement la qualité de l’air et la santé des Barcelonais, a déclaré Gemma Tarafa, conseillère municipale au département de la santé. Les spécialistes ont observé une baisse des décès de 4 %, une diminution de 19 % des nouveaux cas d’asthme infantile et -5 % de nouveaux cas de cancer du poumon l’an passé. »
Pour rappel, pendant le confinement de mars 2020, le taux de pollution de la capitale catalane a atteint un seuil historiquement bas, avec des valeurs inférieures à celles du guide de l’OMS (40 microgrammes par mètre cube pour le dioxyde d’azote). « Idéalement, nous aurions aimé maintenir ces valeurs, mais nous avons conscience que changer les habitudes des Barcelonais ne se fait pas du jour au lendemain » se défend Janet Sanz.
En somme, l’efficacité des actions de la mairie reste timide. En novembre dernier, la reprise du trafic routier a fait exploser les valeurs de dioxyde d’azote (NO2). Dans les quartiers de l’Eixample et de Gràcia, les valeurs de NO2 ont atteint 42,3 microgrammes par mètre cube, dépassant alors pour la première fois les valeurs records mensuelles de 2019 qui était de 41,7 microgrammes par mètre cube.
« Une incohérence climatique »
Malgré l’engagement de la mairie de Barcelone, la lutte contre la pollution atmosphérique est loin d’être gagnée. Le gouvernement espagnol et la Generalitat de Catalogne ont approuvé mardi dernier l’agrandissement de l’aéroport de Barcelone. « Une incohérence climatique » pointée du doigt par les associations écologistes, telles que Greenpeace, mais aussi par Ada Colau.
Lors d’une interview accordée à Cadena Ser, l’actuelle maire de la capitale catalane s’insurge : « Cette décision est un non-sens, comme si nous n’avions rien appris des erreurs du passé malgré ce que nous voyons avec le changement climatique en Allemagne, au Canada et les incendies à répétition. »