Il n’y a pas de gouvernement catalan depuis 200 jours. Les ministres dirigent les affaires par intérim en attendant l’investiture présidentielle. Les négociations sont bloquées et Pere Aragonès, candidat à la présidence, se fragilise.
Esquerra Republicana de Catalunya (gauche), La Cup (extrême-gauche) et Junts Per Catalunya (centre) : les trois partis indépendantistes représentent 52% de l’électorat selon le résultat des dernières élections du 14 février. Un triumvirat qui doit s’unir pour former une majorité, investir un président et nommer un gouvernement. Le tout avant le 26 mai, date butoir qui entraînerait la Catalogne vers de nouvelles élections.
Arrivé en tête lors du scrutin, Pere Aragonès d’Esquerra Republicana de Catalunya (ERC) est le candidat légitime pour occuper le siège de président de la Generalitat. Il a reçu le soutien de l’extrême-gauche de la Cup. Pour dégager une majorité parlementaire, les députés de Junts Per Catalunya sont indispensables.
Le blocage Puigdemont
Les amis de Carles Puigdemont traînent des pieds et cachent à peine leur jubilation de voir Aragonès s’ensevelir dans un sable mouvant politique. Le candidat d’ERC ne peut pas bouger pour demander une date à « Junts » sans que le parti ne lui réponde que le plus important est de trouver un accord solide et non une date. Il est fort probable que Puigdemont attende qu’Aragonès soit quasiment étouffé dans le sable avant de lui accorder son soutien à la manière d’un sauveteur. Ce qui aura pour effet de fragiliser au maximum le futur président avant même qu’il n’ait commencé à exercer le pouvoir. Et éventuellement de perdre les prochaines élections.
En début de semaine ERC a demandé à Junts d’investir Pere Aragonès avant la date symbolique pour la gauche du 1er mai. A quoi le parti de Puigdemont a répondu par une litanie d’exigences. Les centristes veulent une feuille de route plus souverainiste et moins progressiste. Hors de question pour les fidèles de Puigdemont de créer un RSA catalan ou d’assécher les écoles privées comme le prévoit l’accord entre ERC et la CUP. Ces derniers ont expliqué que si le programme était modifié, ils retireraient leur soutien à Aragonès. Une angoisse de plus pour l’aspirant à la présidence.
Le camp Puigdemont, peu habitué à ne pas exercer le pouvoir (son parti et ses versions antérieures ont dirigé la Catalogne 31 ans depuis 1981), veut s’incruster à tous les étages. Le gouvernement catalan devra être composé à 50% de membres de Junts Per Catalunya, ce qui ne pose pas de problème à ERC.
Puigdemont veut continuer à être le référent du monde indépendantiste du haut du Conseil pour la République, son association privée basée en Belgique. Une tentative de convertir Aragonès en président light qui met les nerfs d’ERC à fleur de peau. Junts Per Catalunya voudrait également fusionner les deux groupes parlementaires au parlement espagnol pour exercer une influence sur le gouvernement espagnol et aller au clash. Bien loin de la politique de dialogue que veut exercer la gauche catalane. Sans gêne aucune : ERC possède 11 députés et Junts… seulement 4. « Qui ne tente rien n’a rien » reste la devise politique de Carles Puigdemont.