Tous les mois, la librairie française Jaimes nous recommande les dernières nouveautés, sous la plume du libraire Christian Vigne.
Photos: Josep Mirón @petucom
Le glas de l’intellectuel français a-t-il sonné ? La question a sans doute été mille fois posée de ci de là, de façon régulière et récurrente, agaçant au passage l’orgueil national, reprenant nécessairement la particularité du sus-cité à se tromper de façon permanente, cantonnant semblable catégorie socio-professionnelle, occasionnellement fascinée par les dictatures maoïstes, staliniennes ou castristes à un espace exclusivement parisien. On connaît tout ça par cœur ou par raison. Le désamour de Shlomo Sand n’est pas si récent. Peut-être serait-il plus juste de dire qu’il s’applique rétrospectivement dans l’égratignement de figures presque incontestées comme celle de Camus.
Pour autant ce professeur d’histoire contemporaine a-t-il commis le énième essai sur le sujet ? Selon lui la figure de l’intellectuel parisien est née de la lutte contre l’antisémitisme ou de la judéophobie situant la date de sa naissance à l’affaire Dreyfus. Les références à Houellebecq, Finkielkraut ou Zemmour le poussent à se poser la question de savoir si la montée idéologique de l’islamophobie ne constituerait pas la marque crépusculaire de cet intellectuel.
La fin de l’intellectuel français de Shlomo Sand. Ed La découverte.
De la déception, il est aussi question dans « Le grand vertige » que nous propose Pierre Ducrozet aux éditions Actes Sud. Une cinquantaine d’experts aux profils hors normes sont choisis de par le monde. Leur mission ? Proposer du jamais vu, jamais entendu, jamais fait pour contrer les effets du changement climatique. Le tout au sein d’une commission dont le nom aussi imprononçable qu’impossible à mémoriser augure de la parfaite inefficacité.
Déception ? Pas vraiment. En tout cas, ça n’est pas la marque de Pierre Ducrozet qui donne le sentiment d’attraper un monde dont la complexité effrénée finira pourtant par ne laisser aucun refuge à personne. Il ne renonce pourtant à rien comme si le vide annoncé était finalement le seul porteur d’espoir. Étrange exercice, me direz-vous mais c’est justement toute la force du roman de Ducrozet de nous rappeler que le monde est le décor de notre théâtre.
Autre conséquence d’un ordre économique chaque jour moins nouveau, la médecine et la psychiatrie auraient déplacé leurs objectifs, se mettant au service du néolibéralisme.
Les auteurs d’Exilés de l’intime (ed. les liens qui libèrent), Roland Gori et Marie-José Del Volgo s’étaient précédemment interrogés sur la médicalisation de l’existence dans un ouvrage intitulé LA SANTÉ TOTALITAIRE. Apparaît donc une nouvelle figure anthropologique, l’homme neuroéconomique. La vie de cet homme, soumise à des dispositifs permanents de contrôle et de normalisation, serait envisagée comme une machine neuronale dans l’objectif d’optimiser sa capacité à se livrer au marché des jouissances existentielles.
Il ne s’agit pas d’un roman, moins encore d’une fiction. Les auteurs envisagent clairement la disparition d’une psychiatrie au service de l’homme et par conséquent sa totale disparition.
Les rendez-vous de décembre à la librairie française
Par ailleurs, nous organisons au sein de la librairie un marché de Noël, entre foie gras, bijoux, œuvres d’art, champagne.
Sabrina Poulette y trouvera ce samedi 12 décembre un espace pour accueillir vos enfants, leur raconter l’histoire de de flocon de neige qui rêvait de se poser sur un sapin.