José García Montalvo est professeur de sciences économiques à l’Université de Pompeu Fabra à Barcelone et Harvard aux Etats-Unis. Interview pour faire le point sur la situation économique catalane dérivée de la crise du Covid.
Le secteur de la restauration est désespéré face au manque d’aides du gouvernement catalan après leur fermeture forcée. Qu’en pensez-vous ?
La somme avancée par la Generalitat de 40 millions d’euros d’aides est ridicule. D’ailleurs il n’y a pas que les restaurants et les bars qui sont impactés par la mesure de fermeture, mais tous les fournisseurs de ce secteur. C’est tout simplement la chaîne qui est cassée. D’ailleurs comment le gouvernement catalan va-t-il repartir ces 40 millions ? On ne le sait pas.
La stratégie du gouvernement catalan n’est-elle pas la bonne ?
Il n’y a pas de stratégie ! L’idée est-elle de fermer les restaurants, les rouvrir, les refermer, les rouvrir, etc… ? La Generalitat dit que la fermeture permettra de sauver la période des fêtes. Comme si cela était une formule magique. La fermeture des restaurants ne solutionnera pas la crise sanitaire du Covid. Depuis mars, le président catalan Quim Torra ne propose que de confiner à tours de bras avec le slogan politique « je suis là pour sauver des vies ». Mais si l’on veut sauver toutes les vies, alors on empêche les gens de conduire une voiture car le risque zéro accident n’existe pas. On ne peut pas arriver à un risque zéro de victimes du Covid en fermant tous les lieux où il y a des contacts sociaux. C’est un mirage. D’ailleurs est-ce que l’on sauve des vies en fermant de force des entreprises ? Est-ce que priver des gens de leurs revenus est une bonne chose pour leur santé ? Les patrons de restaurants doivent souvent rembourser des crédits bancaires et sont sous pression. A-t-on déjà oublié tous les suicides provoqués par la crise financière de 2008 ? Il faut être plus équilibré dans ce domaine.
Pour stopper le Covid, la seule solution réside dans la conscience individuelle. Chaque citoyen doit être personnellement responsable.
Différentes options ont été choisies selon les pays. Par exemple, le couvre-feu en France fait beaucoup réagir en Catalogne.
La France a choisi la meilleure solution avec le couvre-feu et la Catalogne la pire avec la fermeture de la restauration.
Le système social peut-il résister avec autant de personnes au chômage partiel (ERTE) et une nouvelle vague qui arrive avec la fermeture de la restauration ?
Depuis mars, le système du chômage partiel a bien fonctionné. Mais jusqu’à quand pouvons-nous rester dans cette situation? L’économie doit fonctionner par elle-même, pas par des aides financées par l’argent public. Le gouvernement espagnol ne peut pas s’endetter indéfiniment en finançant de manière illimitée le chômage partiel.
Quelle sera la traduction sur le marché de l’emploi ?
Il y a déjà la traduction. Le niveau de chômage est hallucinant alors que l’économie est dopée aux aides publiques. Le chômage partiel a aujourd’hui dépassé les 6 mois. C’est-à-dire qu’à partir de maintenant, légalement, les entreprises peuvent licencier leur personnel se trouvant en chômage technique. On risque d’assister à une montée exponentielle du nombre de personnes inscrites au chômage.