Barbarie. Un juge prend la décision d’expulser de son logement un homme de 92 ans, handicapé, en pleine vague de froid et de tempête à Barcelone. Pour ajouter au sordide, hier matin la police anti-émeute a utilisé la force pour tenter de mener à bien l’expulsion. Récit d’un scandale.
60 rue de Ruiz de Padròn, dans le quartier populaire de Clot. Un homme est locataire de son appartement depuis 1959 et s’acquitte de verser tous les mois son loyer à sa propriétaire Rosa Maria Balaguero. Le locataire a aujourd’hui 92 ans, souffre d’un handicap à 75% et est donc reconnu « grand handicapé » par les services du gouvernement catalan. Suite au décès de l’un de ses proches, l’homme se retrouve en difficulté financière, il paye ses mensualités mais avec du retard. Actuellement tous les loyers ont été encaissés par Rosa Maria Balaguero. Cette dernière cherche tout de même à mettre fin au contrat de location en saisissant la justice.
Légalement, la propriétaire est dans son droit. Si un locataire paie avec du retard, il est possible pour un juge de prononcer la rupture unilatérale du contrat. Un premier magistrat du tribunal de Barcelone a refusé de le faire, estimant qu’il n’y a pas de dette en cours et donc que le locataire peut continuer à jouir de son bien. Mécontente, la propriétaire a interjeté appel et un juge de la quatrième chambre de l’audience de Barcelone a cassé le jugement. Appliquant la loi à la lettre, ce juge estime que le retard équivaut à une tentative d’impayé et accède à la requête de Rosa Maria Balaguero. Ce magistrat a ordonné l’expulsion immédiate malgré l’âge du locataire, malgré son handicap, malgré le paiement de tous ses loyers depuis des décennies, malgré le froid de l’hiver, malgré la tempête Gloria qui souffle sur Barcelone.
Intervention musclée de la police
Au vu des circonstances, un groupe d’une trentaine de voisins, emmené par l’association Observatoire habitatge i Turisme a tenté d’empêcher l’expulsion. La police catalane a utilisé la force pour que les huissiers puissent entrer dans l’appartement.
3/10
Davant de la solidaritat veïnal i la resistència a la porta, han vingut tres furgons de la BRIMO, per fer fora, REPETIM, A UN SENYOR DE 92 ANYS. PERÒ QUÈ US HEU PENSAT? A continuació, un vídeo de la violència policial. Aquí podeu veure com tracten al nét del llogater. pic.twitter.com/vSKSh6AiPy
— Obs. Habitatge i Turisme Clot-CA (@ObservatoriClot) January 20, 2020
Les scènes musclées ont choqué, dans le cadre d’une expulsion au caractère profondément amoral. La propriétaire flanquée de son fils ont invectivé les manifestants qui tentaient d’empêcher l’expulsion au milieu de la pression policière.
Finalement, constatant le haut niveau d’handicap du locataire et devant la possibilité de finir à la rue, les huissiers ont gelé l’expulsion. L’occupant a jusqu’au 11 février prochain pour trouver un nouveau logement. Contactée par Equinox, la mairie de Barcelone, en charge des logements sociaux, explique que la propriétaire ne veut aucune médiation et souhaite uniquement casser le bail. Un contrat de location très ancien qui ne permet aucune augmentation de loyer pourrait être la raison la motivant à tenter de récupérer son bien par tous les moyens. Le locataire est actuellement sur une liste d’attente pour entrer dans une maison de retraite. Rosa Maria Balaguero, possède trois logements dans le même immeuble, dont un où elle réside et un autre où vit ex-mari, mais ne souhaite pas attendre.
A partir du 11 février, les huissiers et les forces de l’ordre reviendront au 60 rue de Ruiz de Padròn pour chasser un homme de 92 ans. En Espagne, il n’y a pas de trêve hivernale.