Itinéraire d’un accident politique. Manuel Valls est enlisé dans le marais de la politique catalane sans grand espoir d’obtenir un destin à la hauteur de ses ambitions.
L’ancien Premier ministre français va de Charybde en Scylla dans sa tentative de se forger un destin politique en Catalogne. Après avoir réalisé un mauvais score à l’élection municipale, Manuel Valls, fidèle à sa propre tradition, a effectué un insolite tête à queue politique en permettant à Ada Colau de rester maire de Barcelone. Lundi dans le journal le Parisien Manuel Valls se voulait triomphant « J’ai changé une certaine conception sectaire de la vie politique en Espagne, ma culture française, celle du 2e tour et du rassemblement m’a aidé. Dans les partis, beaucoup ne le comprennent pas ici ».
Mais, le même jour, le ciel politique est tombé sur la tête de Valls. Le parti Ciudadanos congédiait sans autre forme de procès l’ancien ministre français pour son alliance contre nature avec Colau. Puis hier, le numéro 3 de la liste de Valls, l’ancien ministre socialiste Celestino Corbacho annonçait lui aussi quitter le Français pour siéger dans le groupe municipal de Ciudadanos. Avant l’opération de l’investiture d’Ada Colau, Manuel Valls présidait un groupe de 6 conseillers municipaux avec l’étiquette Ciudadanos. Aujourd’hui il se retrouve tout seul à siéger au conseil municipal de Barcelone, avec sa porte-parole Eva Parera, unique membre de la liste de Valls à ne pas l’avoir encore quitté. Pour Valls, Ciudadanos a fait preuve de « sectarisme » et « n’est ni un parti libéral ni un parti progressiste ».
Traversée du désert
Manuel Valls perd quasiment toute son influence politique. La majorité absolue pour approuver les grandes décision de Barcelone est de 21 conseillers municipaux. L’exécutif d’Ada Colau alliée avec les socialistes en possède 18. Avec ses 3 voix, Manuel Valls comptait jouer un rôle décisif, ce qui est rendu impossible depuis son expulsion de Ciudadanos.
Autre déconvenue, les centaines de milliers d’euros de subventions allouées au groupe municipal iront majoritairement à Ciudadanos sans passer par Manuel Valls. Isolé politiquement, sans parti, sans financement, l’avenir de Manuel Valls se complique jour après jour et ressemble terriblement à ce qu’a déjà vécu en France celui qui s’était grillé au parti socialiste en soutenant la candidature d’Emmanuel Macron, sans toutefois être autorisé à rejoindre officiellement En Marche.
A la croisée des chemins, Manuel Valls va devoir prendre une décision. La directrice-adjointe du journal La Vanguardia écrivait hier que Manuel Valls pourrait lancer son propre mouvement qui porterait le nom Lliga Democràtica, un parti de centre-droit catalaniste. Un espace politique très resserré qui serait entre le socialisme et Ciudadanos et aurait pour but de concourir aux prochaines élections catalanes.
Pour cela, Manuel Valls devra vaincre son isolement politique pour trouver des têtes d’affiches. Également trouver une formule de financement. Dans une longue enquête la semaine dernière, nos confrère d’Ara publiait la liste des grands donateurs de Manuel Valls, ajoutant que le mauvais résultat des municipales a jeté un froid chez les investisseurs. D’autant plus que Manuel Valls a demandé un salaire mensuel de 20.000 euros à ses donateurs pour battre campagne.
En conférence de presse ce matin, Manuel Valls a indiqué qu’était venu maintenant pour lui « le temps de la réflexion ».