Les Mossos d’Esquadra vivent avec difficulté le processus indépendantiste catalan.
Le corps des Mossos d’Esquadra, la police catalane, est probablement l’institution qui a été le plus pointée du doigt pendant le processus indépendantiste. Les 17.000 agents dépendent directement du ministère catalan de l’Intérieur à Barcelone. Cependant, selon la Constitution espagnole et le Statut d’autonomie catalan, le corps des Mossos est l’une des polices judiciaires de l’État espagnol. En somme, l’État central délègue à la Catalogne les compétences en matière de sécurité, et la police autonome se doit de respecter l’intégralité des normes légales en vigueur sur le territoire national.
En cas de désobéissance du corps des Mossos, le gouvernement central peut récupérer le contrôle de la police catalane via l’article 155 de la Constitution, ou par le mode de loi ordinaire de sécurité intérieure. Ce que réclament le Partido Popular, Ciutadans et Vox. Pour les trois partis de droite, les 17.000 Mossos sont dépeints comme une milice indépendantiste. Rien de plus faux, selon des enquêtes internes, les Mossos d’Esquadra reflètent plutôt la société catalane : une sociologie coupée en deux.
Bataille de syndicats
Pour s’en rendre compte, il suffit d’observer les syndicats des Mossos d’Esquadra.
D’un côté les organisations Col·lectiu Guilleries et Mossos per la Democràcia sont ouvertement indépendantistes. Tandis que l‘Unión de Mossos por la Constitución (UMC) ou l’Asociación Constitucionalista de Mossos d’Esquadra (ACME) sont en faveur de la défense de l’unité de l’Espagne. Les syndicats indépendantistes reprochent principalement à leurs collègues unionistes de collaborer avec les associations proches de l’extrême-droite et des milieux les plus radicaux de la police espagnole.
En juillet dernier, un Mosso membre de l’unioniste UMC s’est rendu à un gala d’une fondation de la police espagnole pour recevoir une médaille récompensant son travail d’agent des forces de l’ordre. Contrairement au règlement en vigueur, ce policier s’est présenté en uniforme de Mosso pour recevoir le prix. Les syndicats indépendantistes insistent sur le fait qu’un agent ne puisse pas porter l’uniforme en dehors de son service sans autorisation de sa hiérarchie. Les représentants syndicats indépendantistes voient dans cet événement l’impunité dont bénéficieraient les Mossos favorables à l’unité de l’Espagne.
L’affaire du Mosso qui a lancé à un manifestant protestant contre la tenue du Conseil des ministres espagnol le 21 décembre dernier à Barcelone « la république catalane n’existe pas. idiot » a profondément divisé le corps de la police autonome. La vidéo a largement circulé sur les réseaux sociaux.
Le point d’orgue de cette rivalité au sein des forces catalanes a eu lieu le 6 janvier dernier. Pour la première fois, le collectif Guilleries a publié publiquement sur le réseau social Twitter le nom d’une agent des Mossos supposément unioniste et qui est accusée par le syndicat de révéler des informations (sans préciser lesquelles) aux médias madrilènes d’extrême-droite. Le message est accompagné d’une photo de la policière en compagnie d’un député conservateur au parlement de Catalogne. Le syndicat unioniste ACME a répliqué toujours sur Twitter que le collectif Guilleries était « une bande de balances ».
Le journaliste Quico Salles du pure-player El Món explique que la bataille interne prend une importance telle que Jordi Evole, le reporter vedette de la chaîne La Sexta, produit actuellement un documentaire sur cette division de la police catalane dans son programme dominical Salvados.
Du côté du ministère de l’Intérieur catalan, on relativise : « Les Mossos d’Esquadra sont un corps important composé de 17.000 effectifs. Il y a en son sein des divergences idéologiques comme dans la société mais ce n’est pas une division générale qui affecte le service aux citoyens”.