L’investiture de Joaquim Torra, 131ème président de la Catalogne est le nouveau défi de l’indépendantisme face aux réticences de l’extreme-gauche.
Il est difficile pour le camp souverainiste de maintenir vivante l’ambiance historique qui entourait le processus indépendantiste jusque-là.
En ce samedi, commençait à midi le débat d’investiture de Quim Torra pour tenter de devenir le 131e président de la Catalogne. Pas de manifestants devant le parc de la Ciutadella qui abrite le parlement. La police qui bloquait l’accès au parc lors des précédentes tentatives d’investiture a laissé place aux joggers et aux familles qui se baladent avec leurs poussettes. Dans le jardin privé de la buvette du parlement, on entend les oiseaux chanter plutôt que l’hélicoptère de la police espagnole, qui surveillait les députés sur le point de voter l’indépendance en octobre.
Dans l’enceinte du parlement, la presse internationale a également disparue. Près de 5 mois après les élections, les indépendantistes ont epuisé les spectateurs internationaux les plus friands de politique. Le faux retour de Carles Puigdemont, en janvier, poursuivi par la justice espagnole, les deux tentatives d’investiture de Jordi Sanchez frustrées par le juge instructeur Llarena, et l’empêchement de Jordi Turull, incarcéré en plein débat présidentiel ont compliqué le récit médiatique de la feuille de route indépendantiste. L’arrivée de l’illustre inconnu Quim Torra ne ravive pas l’interêt. Les séquelles de l’article 155 et les stigmates de la répression se respirent dans l’enceinte du « Palau del Parlament ».
Discours musclé
Sur ordre de Carles Puigdemont, le député Quim Torra se présente devant ses pairs pour tenter d’obtenir un vote positif de la chambre, afin de se convertir en 131e president de la Catalogne.
Le projet du camp indépendantiste est de diviser le pouvoir en deux pôles : les directives viendront de Carles Puigdemont depuis Berlin ou Bruxelles, tandis que le président Torra se contentera d’une gestion des affaires courantes.
Mais la politique catalane est toujours un labyrinthe où même ceux qui pensent avoir un sens de l’orientation politique peuvent se perdre. La Cup, l’extreme-gauche indépendantiste, menace de bloquer l’investiture de Quim Torra. Pour eux, le projet politique est trop timide. Dans un discours musclé, Quim Torra tente de renverser la vapeur. Le potentiel futur président s’engage à ce que son gouvernement poursuive l’objectif de « construire un état indépendant sous la forme d’une république en respectant le mandat du référendum du 1er octobre ». « Notre président est Carles Puidgemont et nous serons fidèles à la déclaration d’indépendance, et à la construction d’une republique » Quim Torra s’il devient president s’engage à organiser « un grand débat citoyen sur l’avenir du pays » et à rédiger un projet de Constitution de la Catalogne.
Lors du débat parlementaire, le porte parole de la Cup, Carles Riera, s’est montré peut convaincu par les promesses de Quim Torra. Pour lui, les indépendantistes ont abandonné la construction de la République. Fonctionnant en modèle représentatif, les militants de la Cup voteront pour décider quelle option leur quatre députés devront choisir lundi. Cette poignée de parlementaires est indispensable pour que l’élection du président soit favorable lundi lors du second tour d’investiture.
Au regard de l’histoire récente, la Cup reste un partenaire compliqué et difficile à satisfaire. Certes, les anarchistes ont appuyé le référendum et la déclaration d’indépendance du 27 octobre en émettant de grandes réserves. Cependant, le certain nombre de fois oú les anti-capitalistes ont dû prendre une décision capitale, ils se sont opposés au reste des indépendantistes. L’investiture d’Artur Mas en 2015, le vote du premier budget du gouvernement Puigdemont, la possibilité de convertir Jordi Turull en président catalan la veille de son incarcération ; se sont à chaque fois retrouvés bloqués par la Cup.
Soit l’extreme gauche votera en faveur de Quim Torra et les souverainistes relanceront la machine pour tenter de cheminer sur la route de la Republique catalane. En revanche si l’extreme-gauche met en échec l’investiture de Quim Torra, il sera temps de se demander si les anarchistes font parti de la majorité indépendantiste ou s’il faut les cataloguer dans un espace politique non identifié.