Ces couples qui arrivent et se séparent à Barcelone

coloc à Barcelone

Avec ses loyers exorbitants, ses emplois précaires et ses fêtes jusqu’au petit matin… Barcelone est peut-être le pire cauchemar des couples. Car derrière ses allures de carte postale, la cité comtale, avec ses micro-appartements, son peu d’aides sociales et sa réputation sulfureuse rend la vie à deux pour le moins compliquée. Témoignages. 

Photo : Clémentine Laurent

« J’aurais dû écouter l’amie qui m’a dit cash : tu veux venir habiter ici ? Ton couple n’y survivra pas. » témoigne Inès*, 33 ans originaire de Marseille. En septembre 2019 : elle et son compagnon Eugène, 35 ans, géorgien ayant grandi en Catalogne, se préparent à s’installer à Barcelone après deux mois sur la route. Ils s’étaient rencontrés deux ans plus tôt lors d’un vernissage à Berlin, et enchaînaient depuis les aventures à travers l’Europe.

Elle est graphiste freelance, lui est musicien et roadie. « Londres, Copenhague, Amsterdam… On partait presque tous les week-ends en vadrouille ! » se souvient-elle. Il veut se rapprocher de ses parents, elle, répond à un certain appel du Sud. « On adorait tous les deux Berlin, mais c’est vrai que les hivers étaient longs. Et je ne voulais pas rentrer en France. Je n’avais été qu’une fois à Barcelone, en Interrail avec mes copines, et l’idée m’a tout de suite séduite. »

Ils emménagent chez un couple d’amis d’Eugène, le temps de trouver leur propre logement. Là, c’est le désenchantement. « On a confondu voyager et vivre ensemble », soupire-t-elle. Arrive le confinement : 60 m² à quatre, et une communication à deux vitesses. « On se parlait en anglais entre nous, eux parlaient catalan, je me sentais isolée, j’étudiais l’espagnol pour me remettre à niveau et ils ne faisaient même pas l’effort de parler dans une langue que je comprenais. Sans compter tous leurs souvenirs communs dont j’étais évidemment exclue. »

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Eugène perd son emploi et propose d’aller passer le reste du confinement chez ses parents à Vic. Inès refuse mais prend en charge le loyer. Un coup dur pour le trentenaire et pour sa fierté. « Il avait beau être déconstruit, ça restait difficile pour lui ». Il s’engage à gérer les tâches ménagères, mais là encore, ça coince. « On s’est rendu compte qu’on n’avait pas du tout les mêmes standards en matière de rangement. »

Et puis un jour, Eugène annonce qu’il doit rendre visite à sa mère. « Il n’est littéralement jamais revenu. Sauf pour récupérer ses affaires… Mais bon, au moins, grâce à lui, j’ai découvert Barcelone. » témoigne-t-elle en faisant mauvaise fortune bon cœur. Aujourd’hui, Inès vit à Clot et partage son quotidien avec un Madrilène. « Je pense qu’on va éviter les colocations cette fois, par contre », ajoute-t-elle en riant.

La ville des tentations

Pour Clémence et Théo, la chute a été plus rapide encore. Ces deux trentenaires se sont rencontrés dans un bar à Montpellier lors d’un déplacement professionnel de Clémence, et ont un véritable coup de coeur. « Je suis maman d’un petit garçon de 3 ans, travaille toute la semaine et vis alors à Lyon. Mais on a quand même voulu se donner une chance », raconte Clémence en levant les yeux au ciel.

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Il la retrouve le week-end, reste chez elle les semaines où elle ne garde pas son fils. « Comme il était en télétravail, c’était plus facile pour lui que pour moi de bouger ». Quelques mois plus tard, un week-end romantique à Barcelone change tout. Théo tombe amoureux de la ville. Il peut télétravailler à 100 %, alors il saute le pas. Clémence, elle, reste à Lyon. Pour celle qui jongle déjà entre son fils, son travail de conseillère en gestion de patrimoine, et ses parents âgés dont elle s’occupe, ce déménagement est autant synonyme d’escapades ensoleillées que de galères.

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Mais elle croit à cette histoire. Alors elle vient le voir souvent : en avion, en voiture, en train. Parfois, ils se retrouvent chez les parents de Théo à Montpellier. D’autres fois, elle descend seule à Barcelone, et envisage même de quitter Lyon à long terme pour venir s’installer. « C’était léger, insouciant. Quand on se voyait, on sortait beaucoup, on essayait d’échapper au quotidien. Des parenthèses enchantées. J’aurais dû m’en rendre compte, mais j’adorais la ville… J’ai même commencé à me renseigner pour m’y installer avec mon fils. »

Elle finit par apprendre par une amie que Théo voit quelqu’un d’autre à Barcelone. « On n’avait pas parlé d’exclusivité donc je ne peux pas lui en vouloir, mais pour moi c’était évident, et je ne pensais pas qu’il me ferait ça. Surtout avec le bazar que je devais déjà gérer au quotidien, les sacrifices que je faisais pour me rendre disponible et ce projet un peu fou de changer de pays alors que j’avais une carrière et un enfant en France. » Elle le quitte sans grand fracas, et tant pis pour les billets non remboursables qu’elle avait acheté. Depuis, Clémence n’a pas remis les pieds à Barcelone et n’a plus de nouvelles de Théo.

 

*Les prénoms des intervenants ont été modifiés afin de protéger leur anonymat

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