Avec des tournages de plus en plus récurrents sur le territoire, l’Espagne se convertit peu à peu en nouvel eldorado du cinéma. Avec, à la clé, une économie locale florissante.
Photo de couverture : Daryl Dixon
Novembre 2024. En Estrémadure, le petit village d’Hevás (3 900 habitants) a vu débarquer, sous la pluie et dans le froid, 300 personnes jusqu’ici inconnues. Une aubaine pour cette commune, qui n’accueille les touristes qu’au printemps, et qui voit ainsi ses rues s’animer et son économie locale respirer.
Ces visiteurs inattendus ? L’équipe du tournage d’El cuco de cristal, une série Netflix adaptée du roman du même nom, venue capturer les paysages sauvages. La région est déjà prisée par les productions cinématographiques : entre 2023 et 2024, le tournage de Retour à las Sabinas avait par exemple généré 12, 2 millions d’euros au total, dont la moitié allant aux locaux, entre restaurants et hôtels.
Mais l’Estrémadure n’est pas la seule région à profiter du secteur audiovisuel. En 2024, rien qu’en Catalogne, 94 long-métrages s’y sont tournés. Un territoire de choix depuis de longues années, puisque déjà en 2022, des épisodes de The Crown étaient tournés à Barcelone, tandis que Westworld s’activait à Gérone et Game of Thrones au Pays basque.
L’atout fiscal des productions internationales
Au-delà du spectacle, ces superproductions génèrent un impact économique majeur, motivé par la politique spéciale du pays. Depuis 2015, l’État espagnol accorde en effet un crédit d’impôt aux productions internationales : 30 % sur le premier million investi, 25 % sur le reste. Et si Barcelone et Madrid sont les principaux lieux choisis pour filmer, de plus en plus de productions se tournent vers la Navarre, le Pays basque et les Îles Canaries, qui ont mis en place une fiscalisation encore plus avantageuse pour les entreprises.
Les 165 productions internationales le leur rendent bien : celles qui ont bénéficié d’incitations fiscales entre 2019 et 2022 ont généré des dépenses totales de plus de 1,32 milliard d’euros et créé plus de 7 000 emplois.
Mais si le pays est devenu un nouveau paradis du cinéma, ce n’est pas que grâce à sa politique financière, rappelait Lucía Álvarez, directrice de Profilm, lors du Foro de Pamplona du 22 mars dernier : « l’Espagne n’attire pas seulement Hollywood ; les productions européennes choisissent le pays pour ses heures de lumière, son climat et la diversité de ses paysages ». Entre mer, montagne, champs déserts et métropoles cosmopolites, il est vrai que l’Espagne est très versatile, la rendant particulièrement propice au cinéma et aux séries.
Photo : Cádiz
Une qualité sur laquelle le pays capitalise, puisqu’il existe désormais un tourisme audiovisuel. Popularisé par le succès du Pays basque après Game of Thrones, le tourisme-cinéma s’est étendu à tout le pays et même institutionnalisé, comme aux Etats-Unis. En 2021, la Spain Film Commission a lancé Spain Screen Grand Tour, une initiative visant à promouvoir l’Espagne en tant que destination touristique à travers la mise en avant de films tournés dans le pays.
Netflix et l’agence nationale du tourisme, Turespaña, ont lancé Spain Travel Guide, une campagne pour promouvoir le tourisme cinématographique via du contenu inédit et une implication du public. De son côté, l’APPA (Association des professionnels de l’audiovisuel) propose même une carte interactive des tournages en cours. De quoi tenter une figuration près de chez soi.
