Du flamenco à la rumba catalane, comment les gitans ont changé la face de Barcelone

Equinox Barcelone gitans

C’est une des communautés les plus anciennes d’Espagne, et pourtant les gitans sont encore et toujours victimes de racisme. À Barcelone, ils ont tout de même réussi à trouver un endroit sûr, où de nombreuses associations présentes luttent pour garantir leurs droits et préserver leur culture.

Photo : FAGIC

Il y a 600 ans, le peuple rom arrivait en terres espagnoles. Certains d’entre eux ont choisi la Catalogne, et plus particulièrement Barcelone pour s’établir. Dans la capitale catalane, la grande majorité de la communauté habite dans le quartier de Gràcia, qui abrite également la place du peuple gitan, honorant l’empreinte qu’a apporté – et apporte toujours – cette diaspora à la culture barcelonaise.

Aujourd’hui, les gitans sont environ 90 000 en Catalogne. Dans la métropole barcelonaise, la communauté a de nombreux points de rencontre, comme l’Association Rromanipes, que préside Ricardo Valentí Gutierrez, également vice-président du conseil municipal des gitans de la ville.

Captura de pantalla 2025 03 20 a las 17.26.10 e1742490879161 Photo : Ricardo Valentí Gutierrez

La communauté rom est largement soutenue par la mairie de Barcelone explique-t-il, et a tout récemment adhéré à faire de l’année 2025 l’année du peuple gitan. Un soutien sans failles élargi à la région, pionnière dans le domaine, nous raconte encore Ricardo : « la Catalogne est le modèle de toute l’Espagne. Le conseil des gitans de Barcelone est aussi le premier de toute l’Espagne ». 

C’est vrai qu’à Barcelone et encore plus à Gràcia, les Roms sont mieux lotis qu’ailleurs. Le résultat d’une intégration séculaire, notamment permise par la culture. Le flamenco d’abord, qui n’est pas du flamenco mais des « chansons gitanes », nous corrige Ricardo. Toujours question musique, dans les années 1940 une partie de la communauté a inventé et popularisé la rumba catalane. Bien plus tard, en 1992 lors des Jeux Olympiques de Barcelone, le groupe Los Manolos – composé de membres gitans – performait lors de la cérémonie d’ouverture des chansons de ce même genre musical. 

Une manne touristique

La cité comtale souhaite valoriser cet héritage culturel. Le site de la mairie propose par exemple une ‘route gitane’, qui met en avant les endroits chers au coeur de la communauté. On y trouve la plage de Somorrostro, un bidonville qui abritait des milliers de personnes dans les années 1890, et qui fut la maison de Carmen Amaya, la danseuse gitane qui a exporté le flamenco à travers le monde. On peut aussi voir le Tablao del Flamenco, un établissement situé dans le Raval et qui propose des concerts de flamenco depuis 1970. La carte indique aussi la rue de la Cera, artère de la fête gitane, et la place du Raspall, coeur du quartier où naquit Pescaílla, le père de la rumba.

Mais l’héritage rom de Barcelone n’est pas qu’artistique. Beaucoup de ses membres n’exercent pas de professions musicales, raconte Ricardo, indiquant que la communauté compte son lot de « restaurateurs de meubles, de fabricants, d’instruments, beaucoup travaillent dans le recyclage, dans les pièces de voiture ».

Surtout, il tient à nous rappeler que beaucoup de mots espagnols et catalans viennent du romani, comme « chaval », le « jeune » en espagnol, qui désigne un enfant en romani. Tout cet héritage sera célébré lors de la journée nationale du peuple gitan, le 8 avril prochain. Et quelques jours avant, le documentaire « Gitans, plus loin que le stéréotype » sera diffusé au Cinemas Girona, dressant le portrait multiple des Roms de la capitale catalane. 

Malgré toutes ces initiatives, la vie des gitans est loin d’être idéale. Encore aujourd’hui, les roms subissent du racisme dans chaque aspect de leur vie. « Il y a du racisme dans l’emploi, à l’école, pour le logement… On en est aussi victimes dans les hôpitaux, le personnel nous traite mal et a peur que si quelque chose se passe mal toute la famille rapplique », raconte le président, concordant ainsi avec les chiffres européens : sur le continent, 1 gitan sur 4 dit avoir été victime de discrimination sur l’année écoulée. Ricardo, comme les autres, espère qu’à force d’actions ce chiffre ne soit plus qu’un mauvais souvenir.

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