Dans la lutte pour la sauvegarde des espèces en danger, le cas du bison en Espagne fait débat. Faut-il, oui ou non, introduire cette espèce dans le pays ? La communauté scientifique est divisée, et une nouvelle découverte rebat toutes les cartes.
Photo : Víctor Sainz – El País
Faut-il introduire le bison en Espagne ou abandonner l’idée ? La question divise. Il y a plus d’un siècle, les derniers bisons européens en liberté s’éteignaient. Depuis, partout en Europe les tentatives de réintroduire le seul membre de la mégafaune (avec le bison d’Amérique) à avoir survécu à la grande extinction du Pléistocène se multiplient. En Espagne, de 23 ou 24 individus en 2009, le pays compte aujourd’hui environ 200 bisons (en élevage ou en semi-liberté). Pourtant, de nombreux scientifiques s’opposent à la présence du mammifère sur le territoire.
En novembre 2024, plus d’une vingtaine d’experts et spécialistes européens ont signé un article dans la revue Conservation science and practice, expliquant pourquoi réintroduire le bison en péninsule ibérique n’a pas de sens. Les scientifiques argumentent d’abord que le bison européen n’a jamais vécu en Espagne, et il n’aurait même jamais dépassé le sud de la France. Le climat plus chaud de l’Europe du sud ne serait pas viable pour ces animaux.
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Ils expliquent que « le climat de la péninsule ibérique n’est pas adapté à l’espèce aujourd’hui, et encore moins à la lumière des prévisions climatiques futures ». De plus, en réponse aux défenseurs du bison qui vantent son rôle dans la prévention des incendies, les chercheurs répliquent : « dans les environnements méditerranéens, le cerf broute les plantes avec plus d’intensité que le bison européen, ce qui a pour effet de réduire le risque d’incendies de forêt ». Ils sont donc totalement contre la réintroduction de ces animaux.
Une découverte qui change tout
Mais en janvier 2025, un rebondissement vient relancer le débat : des chercheurs découvrent de l’ADN de bison européen dans la grotte de Mirón, en Cantabrie. Une preuve que l’espèce aurait bel et bien vécu en Espagne. Les scientifiques restent toutefois prudents, puisque « l’ADN mitochondrial n’est pas toujours suffisant pour permettre des identifications concluantes, des études complémentaires, telles que l’analyse de l’ADN nucléaire et un examen approfondi du registre fossile, sont nécessaires ».
Cette découverte suffira-t-elle à convaincre les sceptiques ? Pour le moment, le bison d’Europe a commencé à se développer dans le pays grâce à des initiatives privées, toujours en semi-liberté. Sa présence s’étend des Asturies à Ciudad Real, en passant par des provinces comme Palencia, León et Burgos.
Maintenant que de l’ADN a été découvert, peut-être que le gouvernement espagnol se laissera convaincre d’ouvrir un programme de protection. Pour le moment, seuls quelques pays de l’Union Européenne ont appliqué un plan de réintroduction et de sauvegarde de ces mammifères.