À Barcelone, la défense d’un bougainvilliers devient une affaire publique

Une fleuriste de Barcelone demande le soutien populaire pour que la mairie ne coupe pas son bougainvillier qui décore la devanture de la boutique et fleurit son petit bout de rue.

En plein mois de décembre, devant la devanture de Maria, on se croirait en plein mois de mai. Sous un soleil éclatant, la commerçante a rempli le trottoir de la Rambla Catalunya, de pots de fleurs, d’arbustes et de plantes aromatiques. Un bougainvillier forme une élégante arche au-dessus de la boutique. Tellement coloré et odorant que les voisins ont surnommé cet endroit, le tunnel de joie. Mais, au milieu de ce petit paradis urbain se dressent de grandes pancartes en noir et blanc : « sauvez notre bougainvillier ! La mairie de Barcelone va venir le couper, rendez ce message viral ! »

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Lors de la tempête de vent, il y a une quinzaine de jours, Maria a appelé le service des parcs et jardins de la Mairie de Barcelone, pour leur proposer d’établir un périmètre de sécurité autour de ce bougainvillier, pour éviter un accident. En effet, ce jour-là, de nombreuses branches sont tombées, un peu partout, dans les rues de la ville. La réponse du service municipal a laissé la fleuriste sans voix : « si c’est dangereux, nous allons venir couper l’arbuste ».

L’établissement de Maria est le plus ancien magasin de fleurs d’Espagne, transmis de parents à enfants depuis quatre générations. « Mes arrières-grands-parents vendaient des fleurs à la sortie des théâtres de Barcelone, ils étaient les premiers à faire cela », raconte fièrement, celle qui exerce par ailleurs, le métier de psychologue.

Il y a quelques années, la fleuriste a décidé de planter à côté de l’arbre en face de sa boutique un bougainvillier qui ne se vendait pas. Depuis, l’arbuste a grandi et est devenu une icône à l’angle de Rambla de Catalunya et de la rue Corsega. Le petit arbre est parfaitement sécurisé : attaché de parts et d’autres, aucune branche ne traine. « Des techniciens sont venus et j’ai des documents qui certifient que tout est en ordre et ne présente aucun risque pour les passants » affirme Maria, dynamique sexagénaire.

La fleuriste demande donc au public d’empêcher la disparition de son bougainvillier. Pour Maria, la péripétie à un air de déjà-vu.  En 2018, l’amie des fleurs, a reçu de la mairie l’injonction de retirer toutes ses plantes extérieures, dont le bougainvillier, ainsi qu’une amende de 1800 euros pour « occupation illégale de l’espace public ». Maria, comme de nombreux fleuristes de la ville, ne dispose pas de la licence lui permettant d’utiliser le trottoir face à son établissement. 600.000 personnes du monde entier, du voisin barcelonais, au touriste français, mexicain ou asiatique avaient alors signé une pétition de soutien à la propriétaire de la boutique. La mairie avait alors lâché l’affaire.

« Le pire, c’est moi qui ai appelé la mairie pour signaler un risque pour les passants lors d’une tempête et ça se retourne contre moi » raconte, les larmes aux yeux, sans perdre de sa dignité, la barcelonaise.  Mais, Maria se reprend :« Si je devais le refaire, je le referais, j’appellerais à nouveau la mairie, car le plus important c’est la sécurité des gens qui passent dans la rue. » 

La petite boutique, qui se trouve en face de l’imposant siège de la « Diputacio – le conseil départemental barcelonais » est une source d’attraction. Entre les personnes qui filment le petit jardin, intrigrées par les pancartes alarmantes, celles qui signent la pétition en encourageant au passage la propriétaire. Et les nombreux clients qui se pressent, une plante ou une fleur à la main. Dans cette foule où se mêlent joie et énergie, tous espèrent ne pas apercevoir la silhouette d’un agent de la mairie avec l’ombre de son sécateur.

 

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