Les indépendantistes catalans veulent contrôler les N.I.E.

NIE CONTRÔLE CATALOGNE

Les indépendantistes catalans sont entrés dans un bras de fer avec le gouvernement espagnol pour récupérer les compétences en matière d’immigration. Contrôles des frontières et gestion de l’arrivée des étrangers sont au cœur des négociations. Décryptage. 

Le numéro d’identité des étrangers, le fameux N.I.E, est le sésame pour tout expatrié qui veut s’installer en Espagne. Un précieux document vert qui est indispensable pour de très nombreuses démarches administratives ou même de la vie courante. Aujourd’hui, c’est le gouvernement espagnol, via le ministère de l’Intérieur, qui délivre les N.I.E.  C’est pourquoi, lors des démarches, il faut se rendre dans un commissariat de police espagnol (et non pas chez les Mossos d’Esquadra) et dans une agence de la Sécurité sociale Nationale.

Les indépendantistes catalans, autour de Carles Puigdemont, possèdent un petit groupe de députés au Parlement espagnol qui sont indispensables pour le Premier ministre socialiste. En effet, Pedro Sanchez, ne compte pas assez de parlementaires socialistes et doit négocier avec d’autres partis, dont les indépendantistes catalans, pour dégager une fragile majorité.

Les indépendantistes veulent durcir la politique contre l’immigration

Face à la montée de l’extrême-droite partout en Europe, et en Catalogne, Carles Puigdemont, avec son parti de centre-droit Junts, durcit le ton. Il demande à Madrid que la Catalogne puisse gérer la politique migratoire de manière autonome. Dans sa liste des demandes au Premier ministre, Puigdemont souhaite que la police catalane puisse contrôler les frontières, que la Catalogne choisisse le nombre d’immigrés qu’elle accueille sur son sol, qu’elle puisse utiliser les OQTF pour expulser les clandestins, octroyer les permis de séjour, les demandes d’asile et surtout imposer l’apprentissage du catalan pour les immigrés qui demandent des papiers.

Et dans cette gestion intégrale de l’immigration, le contrôle des N.I.E est cité comme un élément principal dans les négociations.

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Carles Puigdemont face à Pedro Sánchez au Parlement européen en 2024

Cependant, il est peu probable que Pedro Sánchez réponde favorablement à l’ensemble des demandes du camp indépendantiste. La plupart des mesures seraient retoquées par le Conseil constitutionnel. En réalité, le gouvernement envisage une délégation de compétences à la Generalitat pour qu’elle gère les permis de travail et de résidence, mais en aucun cas le transfert du contrôle des frontières ou de la politique migratoire en général. Mais les négociateurs indépendantistes ont fait du N.I.E une pierre d’achoppement et estiment qu’il est constitutionnellement possible de transférer cette compétence.

Concrètement, une fois que quelqu’un obtient sa fameuse fiche verte après être allé à la police et à la Sécurité sociale, la préfecture espagnole collecte toutes les informations du demandeur. Dans le cas d’un Européen, la procédure est souple et le permis est octroyé à vie. Pour les non-Européens, le renouvellement est annuel et la préfecture revérifie les informations du ressortissant.

Le parti Junts souhaite que toute cette gestion dépende de la Generalitat, via les Mossos d’Esquadra et le ministère de l’Intérieur, et que celui-ci puisse établir ses propres conditions. Des conditions qui devront rester dans le cadre des lois espagnoles.

En cas de transferts de compétences, il n’y aura pas de séisme pour le moment. Car la Catalogne est actuellement dirigée  par le socialiste Salvador Illa, grand ami du Premier ministre espagnol. Mais les indépendantistes misent sur l’alternance et attendent de revenir au pouvoir pour appliquer leurs mesures.

Les indépendantistes peuvent fragiliser le gouvernement

Le bras de fer est intense car avec son petit groupe de députés, Puigdemont peut fragiliser le gouvernement. En premier lieu, le vote du budget général de l’Espagne pour 2025 ne peut être adopté avec une majorité que si les indépendantistes acceptent de voter favorablement. Si les compétences migratoires ne sont pas plus larges pour la Catalogne, Puigdemont affirme que le budget ne sera pas voté.

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En allant encore plus loin, il est possible de faire tomber le gouvernement. Le leader de l’opposition de droite, Albert Feijo, a proposé à Puigdemont d’unir leurs députés pour voter une motion de censure et destituer le Premier ministre. Pour avoir une majorité absolue, il faudra aussi les voix de Vox, parti d’extrême-droite. Pour l’instant, le Catalan refuse d’entrer dans ce cercle. Mais en coulisses, des discussions ont lieu entre la droite et Junts.

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Carles Puigdemont en meeting à Barcelone en 2024

La porte-parole indépendantiste à l’Assemblée espagnole, Miriam Nogueras, se veut menaçante. Dans un style qui lui appartient, à la tribune du Parlement, elle s’est adressé au Premier Ministre dans le cadre du transfert des compétences de l’immigration, avec une certaine véhémence : « nous, on ne bluffe pas, alors maintenant, bougez-vous le cul ».

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