La victoire de Trump pourrait avoir plusieurs répercussions pour l’Espagne, notamment dans les domaines économique, géopolitique et migratoire.
En préambule, il convient de rappeler qu’un Président des Etats-Unis europhile, ça n’existe pas. Qu’il soit démocrate ou républicain, qu’il porte pour nom Obama, Trump ou Harris, le locataire de la Maison Blanche est par nature nationaliste, c’est la culture du pays et des institutions. Il a d’abord été élu pour défendre les intérêts des Américains et pas ceux de l’Europe. Changent le style et la manière avec un Donald Trump, forcément plus abrupte.
Économie et commerce
Commercialement, financièrement, l’Europe est une concurrente des États-Unis. Trump a déjà montré par le passé une politique protectionniste, menaçant les partenaires européens de taxes douanières sur certains produits. L’Espagne, qui exporte vers les États-Unis dans des secteurs-clés comme l’agroalimentaire (vin, huile d’olive) et les industries de pointe, pourrait subir des impacts négatifs en cas de retour des taxes douanières punitives. Cela pourrait aussi affecter les entreprises espagnoles implantées sur le marché américain.
Relations internationales et OTAN
La position de Trump sur l’OTAN a souvent été de remettre en question les contributions des pays européens. « L’Europe n’a qu’à payer plus pour sa propre défense », a argué Donald Trump lors d’un meeting des primaires républicaines. Une telle politique pourrait pousser l’Espagne, membre de l’OTAN, à renforcer sa contribution financière, entraînant des débats internes sur les priorités de défense nationale et les implications budgétaires.
L’Espagne socialiste de Pedro Sanchez face aux tambours militaires de Poutine a déjà fait un effort en la matière. L’objectif de Bruxelles réside dans un investissement militaire des États membres à un minimum de 2% du PIB. La moyenne est actuellement de 1,85 %. En Espagne, 1,3%. Cependant, le Premier ministre socialiste Pedro Sanchez veut rattraper le retard. Cette année, Madrid a augmenté son budget militaire de 19,3%. C’est la 3e plus forte progression après la Suède (+30,1%) et la Lituanie (+27,6%), deux pays placés dans la zone la plus à risque en raison de la proximité géographique avec la Russie.
Politique migratoire
Avec des discours et des mesures plus stricts concernant l’immigration, la victoire de Trump pourrait durcir les politiques migratoires à l’égard des migrants provenant d’Amérique latine. Comme beaucoup passent par l’Espagne en raison des liens historiques et linguistiques, cela pourrait accentuer la pression sur les frontières espagnoles et renforcer les flux migratoires vers le pays.
Changement climatique
Trump ayant retiré les États-Unis des Accords de Paris en 2017, un retour sur des positions climatosceptiques pourrait réduire les efforts internationaux dans la lutte contre le réchauffement climatique, impactant directement l’Espagne qui subit déjà les effets du réchauffement global comme on l’a tristement vu cette semaine avec le drame humanitaire de Valencia.
Tourisme
Barcelone est une destination prisée des touristes américains. Des politiques migratoires plus strictes ou des tensions internationales pourraient dissuader certains voyageurs, affectant ainsi le secteur touristique local.
Barcelone entretient des liens culturels avec les États-Unis, notamment à travers des échanges artistiques et universitaires. Des changements dans la politique étrangère américaine peuvent influencer ces relations, mais l’impact est difficile à quantifier.
Politique intérieure
Vox, la droite nationaliste espagnole, se revendique ouvertement comme un parti Trumpiste. Probablement, le plus zélé d’Europe. Adepte de fake news, d’outrances, d’insultes et de menaces à la fois sur les réseaux sociaux, dans les manifestations et au sein du Parlement, ce parti se trouve aujourd’hui galvanisé. A l’autre bout de l’échiquier politique, la coalition gouvernementale socialiste-gauche radicale emmené par Pedro Sanchez aurait forcément aimé un autre scénario Outre-Atlantique. D’autant plus qu’après le retour de la droite au pouvoir en France, en Italie, au Portugal, le socialiste espagnol commence à se sentir seul à la Commission européenne. Seul et donc fragilisé. D’autant plus qu’après la catastrophe de Valencia qui a enchainé défaillances humaines, politiques et institutionnelles, la droite demande. une nouvelle fois, la démission du Premier ministre.
Santiago Abascal, leader de Vox, avec Donald Trump (photo fournie par Vox)
Si tensions il y aura entre Sanchez et Trump, la rupture n’est pas sur la table. Car la relation hispano-américaine est historique et a débuté pendant la dictature du général Franco. En pleine guerre froide contre l’ex-URSS, les États-Unis voyaient dans la figure du dictateur espagnol un solide rempart contre le communisme qui, selon Washington, pouvait rapidement envahir l’Europe. Cette alliance a permis en 1955 à l’Espagne, pourtant isolée sur la scène internationale, de rentrer à l’ONU. Le président américain Eisenhower fut un des rares responsables politiques issus de pays démocrates à visiter officiellement l’Espagne. Une relation qui s’est traduite dès 1953 par l’installation de bases militaires américaines sur le territoire espagnol. Des bases qui pour la plupart sont encore actives de nos jours. Par conséquent, le gouvernement espagnol doit collaborer avec le ministère de la Défense américain.