Trouver un emploi qualifié à Barcelone : la chasse au trésor

Cyane Morel

Trouver un emploi à Barcelone après 20 ans de carrière en France peut s’avérer un véritable chemin de croix pour ceux qui recherchent le même niveau de poste et de rémunération. Témoignages. 

Photos : couverture Cyane Morel – autres Aurélie Chamerois

Un mardi matin, dans un bar-restaurant de Sant Antoni, une dizaine de personnes partagent cafés et pains au chocolat. Ils ont entre 35 et 45 ans, sont Français ou Espagnols, et partagent une même problématique : ils ne trouvent pas d’emploi à la mesure de leur expérience. Directeurs commerciaux, directeurs informatiques, directeurs généraux, assistantes de direction… tous ont quitté une belle position en France pour s’installer à Barcelone. « Je suis Barcelonaise mais j’ai fait toute ma carrière en France, cela fait plus d’un an que je cherche un poste », explique Esther Martinez, l’une des fondatrices du groupe d’entraide T’en es où à Barcelone, créé il y a tout juste un an et déjà rejoint par 170 membres.

Pour les profils seniors, la concurrence est rude et les places peu nombreuses. « Je pensais que ce serait plus facile, reconnaît-elle, on me dit souvent que je suis surqualifiée pour le poste proposé ». Damien, lui, est arrivé à la fin de l’été pour la mutation de sa femme. « C’est elle qui m’a toujours suivie, alors cette fois c’est moi ! ». Il a quitté son poste de directeur informatique à Marseille et depuis deux mois, il confie avoir l’impression de « postuler dans le vide » sans jamais « réussir à parler à un humain ».

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Pourtant, tous ici sont devenus des professionnels de la candidature. Ils ajoutent les bons mots-clés à leur CV pour déjouer les filtres automatiques : « tu peux les mettre en blanc en bas de page, comme ça le recruteur ne le voit pas mais le robot les prend en compte ». Ils utilisent l’intelligence artificielle : « j’ai demandé à ChatGPT de se mettre dans la peau d’un recruteur de Michael Page pour telle annonce, que j’ai copiée, et de m’aider à refaire mon CV ». Mais tous regrettent leurs débuts professionnels, quand le processus de recrutement paraissait plus simple et plus humain : « ce sont ceux qui savent le mieux détourner le système qui parviennent à décrocher un entretien ». On estime ici que la plupart des annonces postées pour leur niveau de compétences ne correspondent à aucun poste vacant et ne servent qu’à gonfler les statistiques de recrutement ou contribuer à l’image de croissance de l’entreprise. 80% des emplois à pourvoir ne seraient jamais publiés.

Entraide et réseautage

Une statistique confirmée par Barbara Driss, consultante en gestion de carrières à Barcelone. « C’est pour cette raison qu’il est important d’identifier ses forces, et de trouver les bonnes entreprises à contacter, celles qui sont susceptibles d’avoir besoin de ces atouts ». Pour Esther Martinez, c’est là que le réseau prend tout son sens. Sur Linkedin et durant les rencontres de son groupe, chacun présente sa problématique et les autres membres réfléchissent aux entreprises qu’il pourrait viser et aux contacts qu’ils pourraient partager. « Le problème souvent rencontré par les profils seniors, c’est qu’ils sont trop généralistes, d’où l’importance de faire le point sur ses atouts différentiels et de les mettre en avant, voire de faire des formations complémentaires », explique Barbara Driss, qui reconnait que le marché est actuellement plus favorable aux recruteurs qu’aux candidats seniors.

Trouver un emploi qualifié à Barcelone

Egalement cofondatrice du groupe d’entraide, Alexandra, ancienne manager à Hong Kong et Shangaï, s’est vue refuser de nombreux postes car elle ne cochait pas toutes les cases. « On m’a dit que je n’avais pas d’expérience dans le retail, mais j’ai une grande expérience sur le déploiement en Asie, et le reste, je peux l’apprendre vite ». Après de nombreux refus et déceptions, elle va finalement monter sa propre entreprise. C’est le chemin que finiront par choisir certains, parfois dans des domaines complètement nouveaux, et notamment dans le bien-être ou l’environnement. D’autres finiront par décrocher un poste à la hauteur de leurs attentes, à force de réseauter, de se faire connaître, d’explorer toutes les pistes possibles. « Au moins 5 personnes ont trouvé du travail grâce à notre groupe », se félicite Esther. Et tous ici en sont convaincus : c’est le pouvoir du collectif qui leur permettra de trouver leur place sur le marché du travail barcelonais.

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