Si les réseaux sociaux ont amélioré la communication entre les expatriés et leurs proches restés en France, poster son quotidien sur Instagram ou envoyer un message n’est pas la même chose que de s’appeler. Alors, les réseaux sont-ils vraiment bénéfiques pour la vie sociale ? Enquête.
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Trois secondes pour taper un message et une pression sur le bouton « envoyer », voilà une manière parmi d’autres de donner des nouvelles à ses amis. Pour beaucoup d’expatriés barcelonais et d’ailleurs, c’est maintenant le moyen le plus utilisé. Garder le lien avec la France ne passe plus forcément par un appel ou une visite dans l’hexagone, mais par des publications sur les réseaux ou par des messages via WhatsApp, Facebook ou Instagram.
Moins chronophages, ces canaux modernes ont rendu la communication des expatriés plus simple, certes, mais sont parfois responsables d’une altération des relations sociales.
À force de ne plus faire l’effort physique d’écrire une carte postale ou de passer un appel comme cela se faisait avant, Christophe Assens, professeur à l’Université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines (Paris Saclay) craint une perte de l’intensité de la relation, déjà affaiblie par la distance géographique entre expatriés et famille restée dans l’hexagone. « Le risque quand on entretient plus ces relations en physique c’est que des amitiés deviennent des connaissances », explique-t-il.
Dans les faits, malgré l’essor des réseaux dits « sociaux », le sentiment de solitude n’a jamais été aussi répandu qu’aujourd’hui : en France en 2023, 1 personne sur 10 souffrait d’isolement selon la Fondation de France. Une partie de la responsabilité de ce phénomène grandissant serait à incomber aux nouveaux modes de communication qui favorisent « le voyage immobile depuis Instagram », explique l’expert. L’écran serait alors un faux-ami, donnant l’impression de sociabiliser alors qu’en réalité, chacun est seul chez soi.
Un moyen de se créer une communauté
Chez un expatrié, ce sentiment d’isolement peut être décuplé par l’éloignement. Le réflexe est alors pour beaucoup d’aller sur le téléphone pour y partager des moments de sa vie et voir celle des autres, afin de garder un lien. Julia ne le nie pas, en arrivant à Barcelone il y a deux ans, la jeune femme salariée dans une organisation internationale ne lâchait pas son cellulaire.
Cependant, cette Parisienne d’origine revendique une utilisation tournée vers les autres. Au lieu d’être sur les réseaux passivement, elle s’est servi de ces outils pour faire des rencontres et bouger, raconte-t-elle : « en débarquant on y est assez accroché car on est très dépendant des groupes et des événements. J’utilisais beaucoup Meet-Up par exemple, donc forcément j’avais mon téléphone pour voir les notifications ».
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Comme l’a experimenté Julia, les médias sociaux ont d’abord comme objectif de rassembler les gens, de créer des communautés et de rencontrer du monde. C’est notamment le but des groupes Facebook ou WhatsApp de Français installés à Barcelone, qui fédèrent des milliers de membres. Une manière de se créer un réseau comme une autre mais qui oblige, en effet, à être ultra-connecté.
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Un rapport à l’écran complexe qui s’équilibre avec le temps, conclut Julia : « cette mauvaise habitude du téléphone que j’avais au départ pour contrer la solitude et le mal du pays, j’en ai moins le besoin maintenant car j’ai créé des groupes d’amis ici ».