Rameur olympique, Barnabé Delarze a récemment intégré l’équipe suisse Alinghi – son pays natal – qui participera à l’America’s Cup à Barcelone cet été. Equinox l’a suivi pendant une journée pour mieux comprendre la préparation et le quotidien de ces athlètes. Rencontre.
Photo de couverture : Alex Carabí / America’s Cup
Né en Suisse à Lausanne, Barnabé vient d’avoir 30 ans. Il est « cyclor » chez Alinghi Red Bull Racing. Mais c’est tout nouveau. Le désormais marin a tout juste changé de profession, lui qui avait participé aux JO de Rio 2016 et de Tokyo 2020 avec l’équipe nationale suisse d’aviron. Diplômé d’un master à Oxford, ce challenger a désiré tenter « une autre aventure sportive » à Barcelone avec l’America’s Cup.
Le reportage vidéo :
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Tout d’abord, pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste le poste de « cycliste » à l’America’s Cup, qui est, rappelons-le, une compétition de voiliers ?
C’est compliqué à expliquer, c’est très niche comme position. En simplifiant : à l’époque des bateaux à voile traditionnels, on a toujours vu des personnes qui tiraient sur des cordes, qui tournaient des manivelles pour régler les voiles. L’évolution du sport fait qu’on a eu une transition vers l’énergie hydraulique, c’est-à-dire qu’il y a moins de cordes sur les bateaux. Les voiles sont liées à des rails, qui sont eux liés à un système très complexe d’énergie hydraulique présent sur la coque du bateau. Pendant quelques années à l’America’s Cup, c’était les bras qui étaient utilisés avec des manivelles, qui n’étaient déjà plus reliés à des cordes mais à ce système hydraulique. Lors de cette édition de l’America’s Cup, pour la première fois, l’organisation a laissé le champ libre pour que les équipes produisent leur énergie comme elles le souhaitent. Vu que les jambes ont plus de puissance que les bras, tout le monde s’est dirigé vers ce système de cyclistes, où on fait toujours la même chose, on actionne des pompes qui génèrent de l’air compressé utilisé par les « vrais marins » qui eux règlent les voiles. Pour résumer, si on ne pédale pas, il n’y a rien qui bouge au niveau des voiles.
Mais alors, comment s’est fait cette transition de l’aviron à l’America’s Cup ?
Il faut que les gens comprennent que même si je suis sur un voilier, ce n’est pas vraiment de la voile que je fais. Je comprends ce qui ce passe sur le bateau, mais moi, je ne fais que pédaler. À l’aviron, on fait les mêmes types d’efforts que ceux que je fais sur le bateau. Donc je faisais mon master à Oxford, je ne savais pas si je voulais revenir à l’aviron ou bien me rediriger vers un travail plus « standard », et puis un des coachs d’Alinghi m’a appelé pour participer au retour de l’équipe suisse dans la compétition [Alinghi fait son retour à la compétition après l’avoir gagnée deux fois en 2003 en Nouvelle- Zélande et en 2007 à Valencia, ndlr], j’ai fait des entretiens et des tests physiques, et après y avoir bien réfléchi, j’ai décidé de me lancer dans l’aventure.
Si vous deviez résumer l’America’s Cup à quelqu’un qui n’y connaît rien ?
Il y a plusieurs « challengers » contre un « defender ». Celui qui gagne l’édition précédente est un defender, il est automatiquement qualifié. Les challengers, on va s’affronter dans la Louis Vuitton Cup, et le vainqueur de cette compétition affrontera l’équipe néo-zélandaise Emirates, lors de l’America’s Cup. C’est toujours des courses 1 contre 1, qui durent 25 min environ, dans un champ de course d’à peu près 3 km de long, juste en face de la Barceloneta. Et le premier qui gagne un certain nombre de manches en étant le plus rapide remporte la course.
Il y a une certaine partie de la communauté barcelonaise qui ne vous veut pas ici, qui ne veut pas accueillir ce genre d’événement dans la ville, on voit souvent des affiches ou des stickers « No a la Copa America », quel est votre ressenti par rapport à ce sujet ?
Crédits : Europa Press
Moi, je suis tombé amoureux de Barcelone, j’adore cette ville. Je me sens super bien accueilli par 99% des gens, je n’ai jamais eu de problèmes avec ça. Après, on fait « touristes », mais on fait quand même vivre la vie locale. Je me suis intéressé à l’histoire de la ville, et j’ai appris que c’est grâce à des événements comme ça que la ville est ce qu’elle est aujourd’hui, qu’elle est devenue attractive et qu’elle revit. Après l’ère industrielle, la ville est un peu tombée en ruines, surtout après Franco et la Guerre Civile, et les JO de 92, ça a remis Barcelone sur la carte du monde. Mais je comprends, même moi qui ne suis pas d’ici, quand je rentre chez moi en vélo je me dis « les touristes c’est bon, ils ne savent pas où ils vont ». Donc je comprends ces gens-là qui manifestent aussi.
Pour finir, si vous deviez citer 3 choses que vous aimez à Barcelone ?
La nourriture et les restaurants, la météo et l’ambiance.