Taxer les expatriés : la mesure controversée

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Lucie Castets, candidate du Nouveau Front Populaire (NFP) au poste de Première ministre, a relancé l’idée de taxer les expatriés français sur le modèle américain. Une mesure difficile à mettre en œuvre et largement critiquée par le reste de la classe politique. Décryptage.

« Les expatriés fiscaux doivent payer leurs impôts au fisc français, comme le font les Américains vis-à-vis du fisc des États-Unis », a déclaré la potentielle Première ministre qui a défendu cette idée lors d’une interview à La Tribune Dimanche. Amalgamant volontairement, et avec un zeste de populisme, toutes les personnes expatriées à des exilés fiscaux.

Paradoxalement, ce projet fait le tour de l’échiquier politique. D’abord mentionné par Nicolas Sarkozy en 2012, puis repris par Jean-Luc Mélenchon en 2017, Lucie Castets le remet à l’ordre du jour. L’idée est que l’impôt serait calculé sur la base du montant qui aurait été payé si les expatriés résidaient en France, après déduction des impôts acquittés dans leur pays de résidence. Hadrien Clouet, député de La France Insoumise, a précisé dans Les Échos que cette imposition ne concernerait que les revenus dépassant un seuil fixé par le Parlement.

Le député des Français d’Espagne, le centriste Stéphane Vojetta, a qualifié sur X cette proposition « d’inapplicable et inefficace, car si l’on fait payer l’impôt français aux expatriés alors, il faudra leur donner l’école publique gratuite et la Sécurité sociale » – mais aussi de « cynique, car le seul moyen trouvé pour dire “ne partez pas!” aux pigeons dont ils veulent taxer 90% des revenus et handicapante pour tout Français qui se retrouverait hors-jeu sur le marché du travail de tout pays dans lequel l’impôt sur le revenu est plus bas qu’en France Bref, une proposition symbolique de la fragilité du programme château-de-cartes du NFP ».

Par ailleurs, le ministre de l’Économie interrogé sur France 2 a qualifié la proposition d’« idée baroque ». Selon lui, une telle mesure serait injuste et prendrait des décennies à être appliquée. « La plupart des ressortissants français paient déjà des impôts en France sur leurs revenus français », a rappelé Bruno Le Maire.

Des doutes même à gauche

La mesure copiée sur les États-Unis est en fait quasiment un cas unique dans le monde. Les USA profitent de leur puissance économique et de l’influence du dollar pour taxer leurs ressortissants. Les banques étrangères doivent fournir des informations sur les comptes des Américains sous peine de perdre leur accès au marché de l’Oncle Sam.

Même dans le camp du Front Populaire, on est sceptique sur cette mesure sortie du chapeau. Eric Coquerel, président de la commission des Finances et député de La France Insoumise, admet dans Libération que la proposition est « irréalisable » et qu’elle ne figure pas dans le programme du NFP. Cependant, sur le plan idéologique, il partage les objectifs de cette idée. Coquerel suggère plutôt l’instauration d’un impôt universel ciblé, applicable aux expatriés des pays à la fiscalité avantageuse pour une période limitée, afin de réduire le nombre de traités bilatéraux à renégocier.

Si elle arrive finalement au pouvoir, Lucie Castets devra répondre aux nombreuses questions sur la faisabilité de sa loi et sur son équité, dans un contexte dans lequel les conventions fiscales internationales rendent toute réforme de cette ampleur particulièrement complexe.

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