À Barcelone avec ceux qui se lèvent tôt (et adorent ça)

L’avenir appartient-il vraiment à ceux qui se lèvent tôt ? Pour percer le mystère, on est allés à la rencontre de ceux qui s’éveillent en même temps que le soleil. Nageurs, surfeurs ou promeneurs, tous semblent habités par le même sentiment de tranquillité. Reportage. 

Photo de couverture : Natalia

6h du matin, sur la plage Bogatell. Alors que la nuit laisse doucement place au jour, une foule hétéroclite mélange ses empreintes dans le sable. Des fêtards en fin de soirée rencontrent des joggeurs déterminés tandis que des vieillards en pleine marche nordique saluent des touristes venus se prendre en photo. Des groupes de deux, trois ou plus s’égrainent ça et là. Tous attendent que le soleil daigne enfin apparaître. Pour Natalia, Julio et leurs amis, c’est l’heure de se mettre à l’eau. Lunettes de plongée, bonnets de bain et pour certains combinaisons en néoprène, ceux-là ne sont certainement pas des nageurs du dimanche, et d’ailleurs, on est mardi.

Il y a une dizaine d’années, Natalia, vétérinaire à la ville, a fondé ce groupe de nageurs. Complètement gratuites, ces séances qui se déroulent en totale autonomie – chacun nage à son rythme et jusqu’où il veut – avaient d’abord lieu une fois par semaine. Elles ont pris une autre ampleur après la pandémie, nous raconte la pétillante cinquantenaire : « après le Covid, il y a eu un grand engouement, les gens étaient heureux de sortir de chez eux. Depuis, nous organisons des nages tous les matins. Parfois il n’y a qu’une seule personne, parfois une quinzaine, ça dépend ».

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Photo : Natalia 

Le groupe de nageurs n’a pas de nom, mais une conversation Whatsapp pour communiquer sur les présences du lendemain, et un événement sur le site Meet-Up, qui permet à tous, même aux touristes de passage, de se joindre à la joyeuse troupe. « Nager fait un bien fou au physique mais surtout au mental, ça lave le cerveau d’une manière incroyable », témoigne Julio, 54 ans et le physique d’un nageur professionnel. Lui est le plus ancien membre du groupe, ce jour-là. Il est évidemment un proche de Natalia, qui estime qu’elle a rencontré 90% de ses amis lors de ces rendez-vous matinaux.

Celle qui porte une longue tresse grisonnante nous explique avec un plaisir non dissimulé que les mardis, un rituel est mis en place : « avant de nager, on se retrouve et on se fait un câlin collectif, que l’on se connaisse ou non, ça nous donne de la force pour affronter la mer ! Et après, pour ceux qui ont le temps, on mange le petit-déjeuner tous ensemble ». Après l’effort, un réconfort bienvenu pour ces vaillants, qui enchaînent avec une journée de travail.

« Le matin, c’est là que j’ai la meilleure concentration, que je peux méditer et que je peux prier »

Johanna, assise non loin du groupe, partira elle aussi au travail dans quelques heures. Mais d’abord, comme elle le fait deux fois par semaine, la quarantenaire sort sa planche de surf et essaie d’attraper quelques vagues : une tâche compliquée en ce mois de juillet. Qu’importe, cette fois elle a emmené avec elle son amie Silveria. Après deux photos au lever de soleil, les deux copines repartent heureuses, bras dessus-bras dessous, avec l’impression d’avoir respiré. « Le matin, c’est là que j’ai la meilleure concentration, que je peux méditer et que je peux prier », raconte Johanna, tout sourire. Un même calme habite tous ces courageux, comme si la vue de la plage et du soleil levant apaisait quelque chose à l’intérieur.

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Photo : Lucille Souron

Heureuses, aussi, sont les moins sportives. Amy et Sophie sont originaires d’Afrique du Sud. Âgées de 20 et 19 ans, les deux jeunes filles sont venues avec leur appareil photo argentique réaliser quelques photos, avant de quitter définitivement Barcelone le lendemain. À leurs mines ébahies, on devine que le spectacle de la plage à potron-minet leur auront permis un adieu en grandes pompes.

6h40. Ça y est, le soleil est complètement sorti de sa torpeur. Les fous du petit matin s’en vont, prêts à débuter leur journée après ce lever très spécial, tandis que les autres, les moins matinaux (tout est relatif) débarquent sur la plage. Au fur et à mesure que la ville s’éveille, le silence qui régnait jusque-là s’amenuise, tandis que Barcelone renoue avec son tumulte habituel. Heureusement, le calme absolu de l’aube n’a pas totalement disparu : il reviendra demain.

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