L’ancienne maire de Barcelone et icône de la gauche radicale Ada Colau a apporté son soutien à Maxime Da Silva, candidat du Nouveau Front Populaire pour la 5e circonscription des Français de l’étranger à l’occasion d’un meeting organisé hier soir.
Ce mardi soir dans l’Eixample, au siège de l’extrême gauche catalane, Maxime Da Silva joue son va-tout. En ballotage difficile face au sortant, le centriste Stéphane Vojetta, l’aspirant s’entoure de la gauche radicale catalane. En vedette, Ada Colau, qui a fait un long discours sur le danger de l’extrême-droite en Europe et particulièrement en France. Celle qui fut maire de Barcelone durant huit ans en appelle aux valeurs de la révolution française.
Dans un style politologue, Ada Colau explique que les partis d’extrême droite sont artificiels et conçus par des médias amis et avec l’aide du grand capital. Paradoxe, c’est exactement ce qui lui a été reproché en 2019 lorsqu’elle a été élue pour un second mandat grâce au soutien de Manuel Valls et de la bourgeoisie catalane. Ce qui lui a coûté sa carrière politique et précipité son échec en 2023. L’ancienne maire de la capitale catalane voit dans le Nouveau Front Populaire un espoir pour l’avenir grâce à la motivation des citoyens.
L’union des gauches espagnoles et françaises
Dans son discours, Colau a très peu parlé de la France, du quotidien des Français, ou des besoins des Français d’Espagne, du Portugal, d’Andorre et de Monaco que devra représenter le prochain député. Le discours de l’ancienne gloire de Barcelone, complètement coupée de la France, semble une allégorie de l’aventure de Maxime Da Silva. Depuis le début de sa campagne, parachuté en urgence depuis la Normandie, Da Silva a rencontré toute la fine fleur de la gauche ibérique, des démocrates-sociaux jusqu’aux éléments les plus radicaux de la politique espagnole.
La stratégie de se présenter comme le trait d’union entre les gauches espagnoles et le Front Populaire français est risquée. Elle exclut de fait tous les électeurs qui ne se passionnent pas pour la politique locale. Peut-être par manque d’intégration, qui demande un certain temps pour se glisser dans le tissu local, un grand nombre d’électeurs potentiels du Front Populaire ne connaissent pas les représentants espagnols, même s’ils occupent des postes prestigieux comme la vice-présidence du gouvernement.
Les électeurs ne pensent pas comme les militants. Probablement très impliqué dans la machine insoumise – le candidat était responsable des ressources humaines du groupe LFI au parlement- Da Silva n’a pas totalement saisi l’ambiance locale de la communauté française. « Je pense que Vojetta va gagner car LFI est un repoussoir pour une majorité des électeurs de notre circonscription », glisse un poids lourd du parti socialiste en Espagne.
Résultat : le candidat frontiste n’a pas fait le plein de voix avec 26,18% dimanche. Da Silva a perdu 2 points des votes du candidat de la Nupes en 2022, le Barcelonais Renaud Leberre qui avait obtenu près de 28%.
A l’étranger, les candidats du Front Populaire ont réalisé des cartons. Au Maghreb et en Afrique de l’Ouest, le candidat du NFP Karim Ben Cheïkh réunit 51,57 % des suffrages. À Londres, Charlotte Minvielle, aspirante de l’Union des Gauches flirte avec les 40% et en Europe du Nord, 39%.
Avec le résultat du premier tour, les chances de Da Silva de déboulonner Stéphane Voletta sont minces. Certes, le Rassemblement National fort de ses 20% n’appelle pas à voter pour le représentant du centre-droit. La candidate locale refuse de donner la moindre consigne de vote et assure que le RN n’oubliera jamais les tweets postés par le député sortant contre Marine Le Pen.
Naturellement, durant son meeting final, le camp de gauche tire ses flèches contre le sortant. Marta Peciña, du cercle rapproché de Da Silva souligne que « Vojetta, même s’il s’émeut sur Twitter des positions de la binationalité du RN, a voté la loi immigration qui contient la thèse de la préférence nationale et a été retoqué par le Conseil constitutionnel ». Peciña a enchaîné sur le « faux modernisme » qu’affiche Vojetta alors que « le député n’a jamais proposé une loi à l’Assemblée Nationale, alors que les associations féministes exigeaient de l’inspirer du modèle espagnol, pays pionnIer en la matière ».
Education et emploi
Da Silva a finalement pris la parole pour prononcer un discours, bien construit, pour affirmer qu’élu à l’Assemblée Nationale, il fera en sorte que les Français de l’étranger ne soit plus des Français de seconde zone, en revalorisant le réseau consulaire, en défendant l’éducation française et en bloquant l’augmentation des frais scolaires sur la circonscription, en défendant aussi bien le statut et les salaires des employés que le bien-être des usagers. Le frontiste populaire affirme aussi qu’il n’est pas un candidat anti-entreprises et salue les entrepreneurs locaux en se présentant comme celui qui défend les créateurs d’emplois.
Au-delà de la politique locale, Da Silva a insisté sur le fait de faire barrage à Emmanuel Macron et Jordan Bardella. En ce sens, « voter Stéphane Vojetta, c’est mettre un coup d’épée dans l’eau pour un député qui sera dans un groupe minoritaire » sentence le candidat. Seul le Nouveau Front Populaire pourra empêcher un gouvernement RN, assène Da Silva. En ce sens, Vojetta est pour lui comme un « député mondain, ambigu avec le RN, qui court les réunions mondaines pour se nourrir de petits fours ».
En conclusion, Da Silva assure proposer un « horizon heureux » aux Français de la 5e circonscription face à la menace de l’extrême droite qui pourrait dimanche s’installer à Matignon. Fait inédit, Maxime Da Silva a chanté la Marseillaise avec une Ada Colau très enthousiaste dans une réunion qui s’est terminée dans une ambiance bon enfant.
Lire aussi Législatives Espagne-Portugal : les résultats détaillés