Equinox est allé visiter la Torre Bellesguard. Entre vitraux colorés et vue spectaculaire, on vous dit tout le bien qu’on pense de l’oeuvre trop méconnue d’Antoni Gaudí.
Photo de couverture : Oleg Pokrovskiy
Elle porte plutôt bien son nom, cette Torre Bellesguard (« belle vue » en catalan), joyau oublié du génie Gaudí. De sa terrasse, on a, en effet, une vue imprenable sur Barcelone et ses alentours, embrassant d’un coup d’oeil la mer et la montagne. Mais nous n’y sommes pas encore. Pour le moment, la visite démarre par l’exploration d’une construction qui se trouve dans le jardin de la Torre, à quelques mètres de celle-ci.
Cette ruine, qui n’est pas de Gaudí, est une trace de ce que fut la demeure d’été du roi Martí Ier d’Aragon, construite en 1408. Cette visite dans le temps et dans l’espace permet de prendre de la hauteur et d’observer de loin, l’objet de notre visite : la Torre Bellesguard.
Photo : EatGaudí
Dès le premier coup d’oeil, c’est flagrant, ce bâtiment ne ressemble ni à la casa Batlló, ni à la Pedrera. Le maître a en effet voulu respecter le passé du lieu et a inclus de nombreux éléments d’architecture gothique dans son modernisme habituel, réalisant une oeuvre plus sobre.
Après avoir traversé un joli parc, agrémenté de bancs décorés de mosaïque, nous voilà devant l’immense porte en fer forgé de ce bâtiment vert-gris, construit par le moderniste entre 1900 et 1909. Comme à son habitude, Antoni Gaudí a distillé tout au long du parcours des traces de son identité si reconnaissable, qui mélange religion, nature et catalanisme.
Une oeuvre inachevée et un toit en forme de dragon
À l’intérieur de l’édifice, le modernisme est partout, caractérisé par ces formes irrégulières, ces arches, ces volutes végétales et ces surfaces recouvertes de mosaïque inégale. On sent aussi la présence de l’art gothique médiéval recréé à travers des vitraux colorés ou une décoration en fer forgé de la bataille de Sant Jordi dans l’entrée.
Parmi les nombreuses pièces, celle du dernier étage remporte le prix de la plus étonnante : la salle de musique. Spacieuse, avec un point de vue à 180 degrés, elle est organisée sur deux niveaux, grâce à une sorte de faux étage supérieur construit à l’aide de poutres en bois. Les formes inhabituelles des murs confèrent au lieu une acoustique incroyable, et on raconte que les musiciens s’installaient en haut – on se demande comment, au vu de la petitesse de ce drôle d’étage – tandis que les danseurs s’en donnaient à coeur joie sur le plancher.
Clou du spectacle, au terme d’une énième montée de marches – mais c’est une tour, après tout, il fallait s’y attendre – le toit-terrasse. Si l’on n’était pas encore complètement subjugués par la vue époustouflante, la construction du toit en forme de tête de dragon, ultime référence à la Catalogne, aura fini de nous convaincre.
Photo : EatGaudí
Comme la plupart des oeuvres du génie catalan, la Torre Bellesguard n’est pas terminée. En témoignent les marques au crayon des ouvriers sur certains murs, et l’absence de mobilier, seul bémol de cette merveille architecturale, qui mérite amplement le détour.
Et si le trajet jusqu’à sa localisation tout au nord de Barcelone semble décourageant, rappelez-vous que c’est pour cette raison que Martí Ier d’Aragon l’avait choisi. Et on ne contredit pas un roi.
Pour plus d’informations, rendez-vous sur le site officiel de la Torre Bellesguard.