Le socialiste Salvador Illa a toutes les cartes en main pour devenir le 133e président de la Catalogne, après une claire victoire ce dimanche soir.
Avec un peu moins de 30% des voix (28%), l’ancien ministre de la santé Salvador Illa arrive largement devant l’indépendantiste Carles Puigdemont, qui réalise 20%. Pour rappel, dans le système électoral catalan, on ne vote pas directement pour le président mais pour des députés qui ensuite éliront le chef de la Catalogne.
En nombre de sièges, le score de Salvador Illa se traduit par 42 parlementaires. De son côté, Junts, le parti de Puigdemont, obtient 35 sièges. Il en faut 68, c’est-à-dire la majorité absolue, pour former un gouvernement. Obligatoire, alors, pour le socialiste de négocier. Il aurait pu, et dû, logiquement, compter sur les sièges et le soutien du parti du président sortant Pere Aragones (ERC), mais ce dernier ne l’entend pas de cette oreille.
En effet, lors de son discours de défaite, à Estació de Norte à Barcelone, il a déclaré que son parti allait siéger là où les électeurs l’ont mis, avec un score dramatique de 20 sièges (une perte de 13 députés par rapport aux dernières élections) : c’est-à-dire dans l’opposition.
Cependant rien n’est encore joué, et ERC pourrait mûrir et modérer sa position, en tenant en compte le temps long propre aux élections locales. Les négociations devraient très probablement s’éterniser et commencer après les élections européennes du mois de juin.
La chute de Carles Puigdemont
Cette victoire relative de Salvador Illa a une double portée : le retour au pouvoir des socialistes si les négociations aboutissent, et la chute de Carles Puigdemont, qui menaçait en permanence la stabilité politique espagnole et le mandat de Pedro Sánchez.
Pour celui qui a déclaré l’indépendance en 2017, la soirée est amère. Puigdemont ambitionnait de terminer l’élection en tête afin de fédérer autour de sa personne un nouveau gouvernement indépendantiste. Ça ne sera pas le cas, et il reste deux options pour lui : prendre sa retraite politique comme il l’avait promis durant la campagne en cas de défaite ou opérer un virage pragmatique en collaborant dans un gouvernement « Illa » pour y apporter une touche centriste.
Une percée historique de l’extrême droite en Espagne
Au niveau des extrêmes, la soirée n’est pas si mauvaise. Les formations radicales – droite et gauche confondues – accumulent 23 sièges dans le nouveau parlement, avec plus d’un électeur sur cinq ayant choisi une de ces options. L’extrême droite espagnole de Vox semble s’installer dans le paysage politique local avec sa dizaine de sièges.
La Catalogne est le seul territoire d’ Espagne à posséder dans son parlement deux partis d’extrême droite. En effet, Aliança Catalana, le parti islamophobe de la maire de Ripoll, fait son entrée dans l’hémicycle avec 2 députés. Son programme est simple : expulser de la Catalogne à la fois les musulmans et l’état espagnol. C’est la première fois dans l’histoire du pays qu’un parti indépendantiste d’extrême droite réussit une percée.
De son côté, sans empêcher les composantes de gauche radicale de siéger au parlement, le parti d’Ada Colau est représenté par 6 députés et les ultra-radicaux de la CUP s’en sortent avec 4 sièges.
Pour conclure, cette soirée électorale fait entrer la Catalogne dans sa phase post-processus d’indépendance. C’est une page qui se tourne ce soir en Catalogne, avec le camp indépendantiste qui perd pour la première fois depuis 2011 sa majorité parlementaire. De nombreux défis attendent le futur président entre l’inflation, la sécheresse, le modèle touristique et une image internationale fortement marquée par les événements de la décennie passée.