Trublion. Nom masculin. Fauteur de troubles, agitateur. Le groupe parlementaire de Junts, le parti de Carles Puigdemont vient de voter non à la loi offrant l’amnistie judiciaire aux indépendantistes poursuivis par la justice. Il se joint ainsi aux voix des députés de la droite du Partido Popular et de l’extrême-droite de Vox, et empêche de fait son application. L’ancien président catalan estime que le texte ne va pas assez loin et ne le protège pas de l’ensemble des charges pesant contre sa personne.
Depuis, 2015, Carles Puigdemont est le trublion de la politique espagnole. Auteur principal de la déclaration d’indépendance catalane avortée en 2017, il veut bénéficier de la loi d’amnistie concoctée par le gouvernement espagnol. Seulement, à tort ou à raison, la justice espagnole charge la barque judiciaire de l’ancien président catalan dans un étrange bras de fer.
Puigdemont, depuis son refuge belge, et son groupe parlementaire à Madrid offrent au Premier ministre socialiste Pedro Sanchez, minoritaire au parlement, un soutien plus que relatif en échange d’un traitement de faveur afin d’éviter au leader catalan de passer sous les fourches caudines de la justice.
Le vaudeville dure depuis des mois. Poursuivi pour rébellion dans le cadre des violences ayant eu lieu pendant et après le référendum d’indépendance, Puigdemont a obtenu de Pedro Sanchez la suppression de ce délit du code pénal espagnol. Le juge d’instruction, en réponse, comme le sous-entend le gouvernement, a décidé de poursuivre l’ex-président catalan pour une charge de terrorisme, estimant que les émeutes entourant le processus indépendantiste relèvent de ce chef d’accusation.
Dans cette partie d’échecs, le gouvernement a ajouté des amendements à la loi d’amnistie, actuellement en cours de discussion au parlement, pour gracier les faits de terrorisme « tant que les droits de l’homme ne sont pas menacés », précise curieusement le texte.
Alors que l’affaire semblait pliée, énième rebondissement, le magistrat instructeur Gracia Castellon a ajouté avant-hier au dossier Puigdemont le délit de haute trahison, arguant que la Russie (suspectée par le juge de soutenir la cause indépendantiste afin de déstabiliser une puissance européenne) a informé Puigdemont la veille de l’attaque de l’Ukraine sans que celui-ci ne prévienne le gouvernement.
Évidemment, le camp Puigdemont a tenté d’ajouter le délit de haute trahison dans la loi d’amnistie. Ce que le gouvernement a refusé et qui a conduit les députés Puigdemontistes à voter contre leur propre texte d’amnistie. Le projet de loi repart donc en commission et les indépendantistes ont un mois pour renégocier avec le gouvernement et représenter le texte lors d’un nouveau scrutin au parlement.
Cette nouvelle déconvenue fragilise encore plus un Pedro Sanchez qui dépend plus que jamais de l’homme de Belgique.