Depuis la guerre à Gaza, l’Espagne face à la radicalisation djihadiste

Services d’intelligence et forces de l’ordre sont sur le qui-vive en Espagne, avec une hausse rapide des cas de radicalisation djihadiste depuis octobre. Les arrestations se multiplient dans toute la péninsule ibérique. 

+ 67% : c’est l’augmentation annuelle des arrestations menées dans le cadre des opérations anti-djihadisme en Espagne, dont la plupart ont eu lieu lors des quatre derniers mois de l’année. En 2023, pas moins de 35 coups de filet ont permis d’arrêter 77 terroristes présumés, le chiffre le plus élevé depuis les attentats de Madrid en 2005.

Depuis les tueries du Hamas en Israël le 7 octobre dernier, l’Espagne fait face à une accélération de la radicalisation et à la préparation du passage à l’acte. Plusieurs individus surveillés ont d’ailleurs eu l’intention d’aller combattre en Palestine, certains sont vraiment partis. Une inquiétude pour le ministère de l’Intérieur qui considère le profil du combattant revenant en Espagne comme le plus dangereux pour la sécurité nationale. Mi-décembre, la Commission européenne avait déjà averti tous les pays membres de l’Union d’un « risque terroriste énorme ». Le gouvernement espagnol avait alors renforcé la sécurité dans les « points sensibles » en période de fêtes.

« Dans l’histoire du terrorisme moderne, il n’y a jamais eu de référence symbolique plus puissante que celle du conflit en Palestine, assure Miguel Torres Soriano, professeur en sciences politiques de l’université Pablo de Olavide de Séville, le désir de contribuer à la « cause palestinienne » sert de moteur pour un groupe hétérogène d’organisations violentes ». Selon cet expert du terrorisme en Espagne, la guerre à Gaza et l’antisémitisme réunissent des idéologies d’apparence opposées, venant de l’extrême gauche comme de l’extrême droite, et cette galvanisation collective peut mener à une nouvelle ère du terrorisme, « plus hétérogène que celle que nous avons vécu ces dernières décennies avec le seul djihadisme ».

Radicalisés de plus en plus jeunes

Mais si la situation géopolitique inquiète les experts, c’est le nouveau profil des suspects qui interpelle le plus les forces de l’ordre. Police nationale et Guardia Civil assurent que 2023 fut l’année du « boom des mineurs », avec un nombre record d’adolescents arrêtés. Depuis longtemps la cible privilégiée des recruteurs, les jeunes se radicalisent de plus en plus rapidement via les réseaux sociaux tandis que la propagande n’a jamais été aussi foisonnante que ces derniers mois.

Selon les forces de l’ordre, ces nouveaux aspirants djihadistes sont en général des adolescents très influençables, qui vivent dans des familles qui ne sont ni radicalisées ni même au courant de l’évolution idéologique de leurs progénitures et ainsi difficiles à détecter. L’une des dernières opérations a ainsi permis d’arrêter trois mineurs à Barcelone et Madrid avant leur passage à l’acte, pour délits présumés d’endoctrinement et conspiration d’homicide. Ils avaient déjà fabriqué leurs explosifs en vue d’un prochain attentat.

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