Près de 40 degrés en été à Barcelone, et des canicules intenses en devenir. Le climat de la capitale catalane s’embrase au rythme du réchauffement climatique. Mais est-il suffisamment fort pour brûler les ailes des expatriés ou futurs arrivants ? Témoignages d’avertis, frileux de rester à Barcelone, et analyses d’experts.
Canicules à répétition, orages de plus en plus violents, sécheresse en continu et pluies diluviennes quand elles se réveillent. À Barcelone, les expatriés français sont aux premières loges du réchauffement climatique. Chaque été, le thermomètre bat des records. Chaque saison prend la forme d’un défi. Et face aux challenges, trois équipes se dessinent. Les visionnaires, qui vont de pair avec les souffre-douleurs de la chaleur. Les sensibilisés, bien au fait. Et les inarrêtables.
Car évoquer la notion de quitter Barcelone à cause de son climat, chez les Français, c’est presque, être à côté de la plaque. La majorité des expatriés venus d’Hexagone ont choisi la capitale catalane justement pour son soleil, et continuent de le faire. À tel point qu’une fois la question du réchauffement climatique posée sur la table, le silence devient le plat principal. « Dans mon expérience, les Français de Barcelone ne sont pas très sensibilisés. Je suis toujours la fille reloue qui saoule tout le monde avec l’écologie », commente Marie, 38 ans, consultante dans la transition écologique.
Expatriés divisés sur le climat
Dans son entourage, aucune personne ne songe à quitter la cité catalane en raison de sa météo brûlante. « Peu sont inquiets et encore moins changent leur mode de vie pour faire face aux défis actuels, qui vont s’accélérer et empirer. Je ne suis pas sûre d’ailleurs que le lien entre les canicules et le changement soit établi pour tous ». En réalité, la militante voit plutôt en ses compatriotes l’envie de « consommer Barcelone », « de profiter de la ville ». Tant qu’ils le peuvent.
Mais derrière les apparences, le réchauffement de la planète demeure bel et bien en toile de fond. « Je n’ai pas envie de partir, mais c’est vrai que c’est présent dans nos esprits », témoigne Julien, expatrié français. Alors que Loïk, lui, avant même que Barcelone ne se transforme en opportunité professionnelle, ne cachait pas sa crainte, dans la chronique de la Belle vie des Français de Barcelone, de vivre dans un endroit trop chaud. Le Breton et sa compagne cherchaient une destination « froide », au nord de l’Europe, pour éviter les conséquences du changement climatique.
Un futur au chevet de la clim à Barcelone
Car en réalité, ils le savent, la vie sous météo extrême leur pend (déjà) au bout du nez. « Les températures ont augmenté dans tous les quartiers de la ville au cours des 40 dernières années. Celles qu’il y a maintenant au Tibidabo étaient celles qu’on avait dans le centre, il y a un demi-siècle », déclare Javier Martin-Vide, climatologue catalan. Et cela continuera.
Dans le futur, Barcelone se convertira en une ville encore plus chaude qu’elle ne l’est déjà, avec des vagues de chaleur de plus en plus fortes, et des minimales nocturnes très élevées. « Le repos et le sommeil des Barcelonais seront affectés, sauf s’ils possèdent la clim », ajoute l’expert. Non sans rappeler, non plus, le quotidien complexifié par le manque d’eau à cause de la sécheresse qui ravage le pays.
La crainte des étés sous canicules
Dans ce contexte, Alix, Suisse de 26 ans, a baissé les bras. Hors de question de passer un été de plus dans la cité catalane, s’est-elle promise. « A Barcelone, je travaillais chez moi en temps normal. Mais à cause de la chaleur, je me déplaçais au bureau, pour avoir de l’air climatisé », raconte cette employée administrative d’une chaîne hôtelière. Elle partait donc tôt le matin, dans l’espoir d’avoir « encore un peu d’air frais », et de le conserver tout au long de la journée, relate Alix.
Les mauvais souvenirs remontent. Des jours entiers passés devant le ventilateur, en juillet et août 2022. « Je ne voulais rien faire. Même pas regarder la télé parce que c’était inconfortable. Pas envie de bouger non plus, j’avais la sensation de transpirer en permanence », confesse-t-elle. Une vie très différente de celle dans son pays d’origine, où le climat se montre bien plus confortable pour elle.
Alors après deux saisons comme celles-ci, la jeune femme a fini par plier bagage. « Je redoutais l’été. » Ni une, ni deux, Alix est partie retrouver la fraîcheur suisse. Un moindre mal, dit-elle, car à l’avenir, elle projette même de s’installer plus au nord encore. « Sur le long terme, je réalise que je suis d’accord de vivre dans un pays où il fait froid pendant 10 mois. Ça me permet de plus profiter des moments, plus rares, où il fait chaud justement ». Et de voir l’été comme un véritable luxe. Quand à Barcelone, il devient peu à peu une plaie, dont le remède suprême prend la forme d’un climatiseur.