A Barcelone, le soleil n’est pas le seul à chauffer : les câbles d’électricité aussi. Avec en prime, des coupures de courant. Énième répercussion du réchauffement climatique et d’un réseau à renouveler.
Sous les pavés des rues de Barcelone, les câbles électriques souffrent, eux aussi, des fortes chaleurs. À tel point que, comble de la canicule, l’électricité fait parfois faux-bond dans la cité comtale, privant ainsi les habitants de clim, frigo et lumière. Alors certes, mettre son logement dans le noir fait partie des astuces anti-canicule, mais lorsque ce n’est pas volontaire, c’est plus embêtant. Or ce sort estival, fruit de la montée du thermomètre, bon nombre de Barcelonais le connaissent. Mais selon le quartier, certains sont mieux lotis que d’autres. Question de réseaux.
Celui du Born ne peut se vanter. Jeudi 20 juillet, une rue perpendiculaire à l’Arc de Triomf s’est vue privée de courant pendant une journée entière. Le tout, accompagné d’une odeur de plastique brûlé, similaire à celle du gaz. « Ce sont les câbles qui ont fondu à cause de la chaleur », expliquent les techniciens et le voisinage. Une situation impossible d’après la cheffe de presse d’Endesa en Catalogne. « Les câbles peuvent résister à des chaleurs extrêmes. 70 degrés au moins ».
Cet été, le sol espagnol a déjà connu des températures atteignant les 60 degrés. Chiffrer celle du sous-sol à 70, après quelques heures d’exposition solaire, n’est donc pas irréaliste. Tout comme la chaleur n’est pas sans conséquence sur le réseau électrique, surtout lorsqu’il est enterré à seulement quelques centimètres de la surface. « J’ai déjà remplacé des câbles parce qu’ils cuisent », confirme Flavien Laville, électricien français.
Un réseau obsolète ?
C’est, en réalité, l’incidence de plusieurs facteurs. À la fois de climat, de consommation et de composition. Les câbles conduisent l’électricité via des fils de cuivre, tous entourés de résine mélangée avec du caoutchouc. « Mais en fonction de la matière utilisée, le câble résiste plus ou moins bien à la chaleur. Certains vieillissent mal et deviennent obsolètes », explique le professionnel. Et ça, les habitants des quartiers, comme ceux du Raval et de la Barceloneta, l’ont bien compris.
« On a dû réclamer, auprès de la mairie et d’Endesa, la rénovation des installations », racontent les présidents des riverains de ces deux quartiers, qui, les étés passés, souffraient régulièrement de coupures d’électricité. « Les câbles dataient d’au moins 50 ou 70 ans », estime Manel Martínez Vicente, porte-parole des résidents de la Barceloneta. D’après le média El Periódico, la ville aurait innové dans ce domaine à l’occasion des Jeux Olympiques de 1992. Mais les nouveaux cordages à base d’aluminium, plus résistants à la chaleur, n’existaient pas. Et le soleil ne frappait pas encore si fort.
Trop consommer peut faire fondre les câbles
« Le réchauffement climatique joue un rôle, il n’y a aucun doute. Ça amplifie les problèmes », renchérit Claude Chamerois, ancien électricien. En fait, la température extérieure s’additionne à celle de l’intérieur du câble. Et tant qu’à être dans un cercle vicieux, celle-ci provient en partie des usagers.
Car l’été, les compagnies d’électricité doivent faire face à une augmentation d’énergie. La climatisation et la ventilation étant nécessaires pour rafraîchir le quotidien. « Mais certains appareils peuvent surcharger la ligne », déclare la cheffe de presse d’Endesa, bien que le réseau soit normalement adapté à la surconsommation. Or, plus le fil de cuivre transporte d’électricité, plus il risque de chauffer. Surtout si sa taille est petite. « Et si on ajoute la chaleur extérieure, le caoutchouc tout autour peut fondre et provoquer des coupures de courant », ajoute Flavien Laville. Voire même de petits incendies ou étincelles, bien que ce soit « rare », insiste Endesa. À Barcelone, le climat n’en a donc pas fini de jouer avec le feu.