Panique à gauche. La remontada qu’attendait Pedro Sánchez pour se relancer dans les sondages n’arrive pas. Une majorité droite et extrême-droite reste l’option la plus plausible après le scrutin législatif de dimanche prochain. Pour tenter d’inverser la tendance, le Premier ministre socialiste mise sur un vote massif des femmes devant le supposé risque de régression sociale en cas d’entrée au gouvernement de Vox.
Une théorie risquée qui consiste à prétendre qu’une partie de la population voterait de la même manière uniquement en raison de son genre. Ce week-end, Pedro Sánchez a qualifié son parti socialiste de « parti des femmes ». Mais à gauche, le Premier ministre sortant doit composer avec la concurrence de sa ministre du Travail. La communiste Yolanda Díaz, qui représente un peu moins de 14% des votes selon les sondages, n’hésite pas à parler au nom de l’ensemble des femmes : « Nous, les femmes, nous sommes la force essentielle pour reconquérir notre pays lors de ces élections. Nous, les femmes, avons déjà mis hors-jeu Mariano Rajoy (chef du gouvernement conservateur de 2010 à 2018 NDLR) ».
La bataille sociétale
En Espagne, il est vrai que la percée de l’extrême-droite ne se fait pas sur le terrain de l’insécurité et de l’immigration comme cela peut être le cas en France, mais plutôt sur les questions sociétales. Si le débat sur l’avortement reste très vif ici, il faut désormais ajouter les droits acquis par le collectif LGTB et les changements de genre facilités dès l’âge de 14 ans par le gouvernement sortant. Beaucoup de pédagogie institutionnelle est également appliquée pour lutter contre les violences conjugales, qui sont un fléau dans le pays.
Vox veut revenir sur l’ensemble de l’œuvre gouvernementale déployée depuis 2018 par la gauche. Interdire l’avortement en dehors des cas de force majeure, cesser les politiques en faveur du collectif LGBT, revenir sur le changement de genre dès l’âge de 14 ans. Enfin, Vox refuse d’admettre que les femmes sont les principales victimes des violences conjugales.
Le fiasco de la loi du consentement
Face à cette révolution conservatrice, le vote des femmes peut-il indubitablement se décanter du côté gauche de l’échiquier politique ? Rien ne l’indique. Car la gauche, usée par cinq ans de pouvoir, porte aussi en la matière un bilan en forme de boulet. Pedro Sánchez sait qu’il a déclenché une fronde du féminisme traditionnel, historiquement proche des socialistes mais qui ne se retrouve pas dans les politiques menées en faveur du collectif LGBT comme le changement de genre à 14 ans sans autorisation parentale. La mesure ne vient pas des socialistes, mais d’Irene Montero, ministre de Podemos en charge de l’Egalité.
Par ailleurs, et c’est probablement le fiasco majeur de ce gouvernement : la mauvaise rédaction législative du texte de loi du consentement sexuel en provenance du même ministère d’Irene Montero. Avec pour grave conséquence, la remise en liberté de centaines de délinquants sexuels. Quand il a négocié son gouvernement de coalition, Pedro Sánchez a veillé à ne donner aucun ministère sensible à Podemos : ni celui de l’Intérieur ni de l’Economie. Le socialiste était probablement loin d’imaginer que le petit ministère en charge de l’Egalité allait se retrouver sur le devant de la scène politique durant toute la dernière année de son mandat.
Cependant, Pedro Sánchez n’a pas voulu faire peser son poids de Premier ministre pour empêcher la promulgation de la loi du consentement, non pas par idéologie, mais par peur de voir les ministres de Podemos sortir du gouvernement et ainsi mettre en échec la coalition gouvernementale. Il aura fallu 7 mois, entre octobre et avril 2023, pour que Pedro Sánchez, politiquement et médiatiquement acculé, accepte de laisser modifier le texte de loi au Parlement, avec l’aide des députés de droite, mais contre Podemos. Un sérieux coup de canif dans l’héritage féministe, dont se revendique Pedro Sanchez.
Les femmes ne votent pas différemment des hommes
Enfin, pour savoir si le pari de la gauche, des femmes qui votent massivement contre l’extrême-droite, est une réalité ou une légende urbaine, il est intéressant de regarder les résultats du second tour de l’élection présidentielle française d’avril 2022. La candidate du Rassemblement national a réalisé un score de 41,8% face aux 58,2% d’Emmanuel Macron. Dans une enquête d’Ipsos, on apprend que 41% des femmes ont voté Le Pen (et 59% pour Macron). Quant aux hommes, ils sont 43% à avoir voté pour Le Pen et 57% pour Macron. La différence du choix des votes entre les hommes et les femmes est donc minime.
Toujours dans cette enquête Ipsos, on constate que le clivage se fait au niveau des revenus, de la classe sociale, de la profession et du parcours scolaire. À titre d’exemple, 67% des ouvriers ont voté Marine Le Pen et 71% des retraités pour Emmanuel Macron.
Les premières tendances du vote seront connues ce dimanche 23 juillet, à partir de 20 h.