Le retour des péages sur les autoroutes espagnoles sème la zizanie alors que le pays se trouve en pleine campagne électorale.
C’est le patron de la Direction Générale du Trafic (DGT), Pere Navarro, qui a mis les pieds dans le plat. Le haut fonctionnaire a déclaré ce jeudi sur la chaîne catalane TV3, que « l’Europe obligeait l’Espagne à rétablir les péages sur ses autoroutes l’an prochain ».
Tempête politico-médiatique immédiate avec l’opposition de droite qui déplore que le Premier ministre socialiste Pedro Sanchez laisse ce terrible héritage au futur gouvernement. En pleine campagne électorale et alors que les conservateurs sont donnés gagnants, la question est même revenue dans le face-à-face télévisé qui a opposé Pedro Sanchez au candidat de la droite Alberto Feijóo.
Un véritable caillou dans la chaussure des socialistes. De fait, le gouvernement a immédiatement démenti le directeur Pere Navarro. Via la DGT d’abord qui a contredit son propre directeur : « nous n’avons pas d’informations pour nous prononcer à ce sujet ». Et par la ministre des Transports Raquel Sánchez ensuite : « je veux nier catégoriquement que le gouvernement envisage d’imposer des péages pour l’utilisation des autoroutes. »
Une promesse faite à l’Europe
Pourtant, en 2021, lors de la fin des concessions privées et du retrait des péages, la même ministre des Transports avouait que la mesure de gratuité n’était que temporaire. Raquel Sánchez, le 19 octobre 2021, expliquait que « le gouvernement étudie une tarification pour assurer le bon entretien du réseau autoroutier à grande capacité ».
Et cette fameuse étude, parue dans la presse, stipule que « le système de péages autoroutier opérationnel en 2024 » est un engagement du gouvernement espagnol devant Bruxelles pour percevoir une partie des fonds européens de récupération, mis en place après la crise du Covid. En effet, si on lit le rapport de la Commission européenne sur le Plan de récupération en Espagne, on trouve un passage concernant la mise en place de « taxes ou paiements liés à la mobilité tels que l’introduction de péages autoroutiers ».
D’ailleurs, selon des sources proches du Parlement espagnol, la mesure aurait dû figurer dans la loi de mobilité durable et financement des transports, que le gouvernement allait présenter avant la fin de l’année. Un texte qui est suspendu en raison de la convocation des élections législatives anticipées par le Premier ministre Pedro Sanchez après le fiasco de la gauche aux élections locales du 28 mai dernier.
« Le système de gratuité n’est pas durable »
En août 2022, lors de l’annonce de la gratuité des autoroutes, Ricard Font, ex-président du réseau de chemins de fer de la Generalitat de Catalogne, expliquait à Equinox que « le système actuel n’est pas durable, nous devons nous diriger vers un modèle harmonisé au niveau espagnol et européen qui permette de financer les routes à grande capacité ».
Déjà à l’époque, plusieurs possibilités étaient à l’étude, dont celle de créer un système où celui qui pollue le plus paie le plus. Des caméras seraient alors chargées de lire la plaque d’immatriculation du véhicule, qui contiendrait les informations nécessaires à son identification. La carte bancaire du conducteur associée au dispositif permettrait par ailleurs un paiement plus rapide.
La version définitive du projet sera annoncée après les élections du 23 juillet. Que ce soit la droite ou la gauche qui remporte le scrutin.